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Je prévois la cenfure & les critiques auxquelles je m'expofe par cette apparente témérité; mais connaiffant l'état des Finances de ma patrie, je manquerais à ce que je lui dois, à ce que je ne puis lui refufer, & à mes propres fentimens, fi je fupprimais des idées qui, par événement, peuvent lui devenir avantageufes.

Si l'attachement & l'ardeur que j'ai pour le bien public avaient pu fe refroidir par l'accueil que la première efquiffe de cet ouvrage a reçu de la part de plufieurs perfonnes à qui je l'ai communiqué, j'aurais au même inftant ceffé d'écrire, & renoncé à la tâche pénible que je viens de m'impofer.

CONVAINCU néanmoins le plus fortement & le plus invariablement de la vérité des principes que j'annonçai dans ce temps fur les Finances, j'attribue mon défaut de fuccès à la manière dont je les établis alors, & je me crois obligé de faire tous mes efforts pour les préfenter fous une forme plus claire & plus concluante.

Si je fuis affez heureux pour mériter l'approbation des gens éclairés, & parvenir enfin à rendre fervice à la fociété dont je fuis membre, se me croirai suffisamment récompensé de mon

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travail, & pleinement dédommagé des déplaifirs paffagers auxquels je dois naturellement

'm'attendre.

C'EST uniquement à la Grande-Bretagne que je confacre le fruit de mes recherches.

LE Siftême que j'entreprens de développer ne peut avoir d'exécution que fous un Gouvernement tel que le fien.

DANS les Etats DESPOTIQUES (1), l'intérêt particulier duSouverain, ou celui de fes Miniftres, fe trouvent trop fouvent en opposition avec celui des Peuples; mais dans un païs libre, tel fur-tout que celui pour lequel j'écris, les individus de chaque claffe travaillent à leur profpérité perfonnelle, & contribuent à celle de la Nation par le crédit qu'ils accordent & par les Taxes auxquelles ils fe foumettent.

On a cru, jufqu'à préfent, que les moïens les plus efficaces pour accroître le crédit de la Grande-Bretagne, pour encourager fon induftrie, & pour donner de l'extenfion à fon

(1) Par les Etats Defpotiques, l'Auteur entend-il les Monarchies? J'aurais d'autant plus de peine à le croire, qu'il ne doit point ignorer la différence d'un Monarque un Defpere.

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commerce, étaient d'établir une Caiffe d'Amortiffement, fondée fur des Taxes additionnelles, & d'acquitter graduellement par ce moïen la Dette nationale.

JE foutiens au contraire que cette opinion eft erronée, & qu'on ne faurait trop-tôt y renoncer.

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L'ETAT critique, où fe trouve maintenant la Grande Bretagne, la forcera fans doute à renoncer à toute idée d'établir une Caisse d'Amortiffement: l'obligation même de recourir aux emprunts annuels, pour fournir aux dépenfes en temps de paix, eft devenue néceffaire, & fera toujours, fuivant ma manière de voir, une ressource dans tous les temps, quoique les progrès de l'induftrie, de la consommation intérieure & du commerce extérieur qu'on doit -fe procurer par la voie des emprunts, fans

recourir à des nouvelles taxes & en facilitant la circulation des espèces, puiffent mettre le produit des contributions actuelles au niveau des befoins annuels de l'Etat."

CETTE idée pourrait au premier coup d'œil paraître un paradoxe (1); mais l'inefficacité du

(1) C'eft bien auffi fous ce point de vue que j'ai envifagé cette idée, d'après l'ouvrage de M. Rilliet de

fiftême opposé donne à mon idée un degré de probabilité qu'on ne peut contefter, d'où il fuit qu'on ne peut fe difpenfer d'adopter un, fiftême différent.

ON fe confolera cependant, en quelque forte, quand on faura que ce n'eft pas le rembourfement des capitaux empruntés qui infpire de la confiance aux Capitaliftes, ni qui affure le crédit public d'une Nation telle que la GrandeBretagne, mais bien l'accroiffement des moïens d'en païer les intérêts, & l'exactitude dans les termes du païement.

LORSQU'UN peuple libre a une certitude morale que l'intérêt des fommes empruntées pour le fervice de l'Etat ne diminuera jamais, à moins qu'on n'offre un remboursement, & que cet intérêt se trouvera toujours prêt aux époques fixées, il doit naturellement fuivre de cette certitude une confiance fans bornes de la part du Public, parce que la stabilité du revenu annuel foutiendra toujours la valeur intrinsèque des capitaux. (1)

Samffure, dans le début de mon Mémoire fur l'Emprunt & la Libération, parce qu'il paraît peu probable, de toujours emprunter, de ne jamais rembourfer, & de ne pas fe

ruiner.

(1) Mais en empruntant toujours, la maffe des intérêts

JE confidère la Dette Nationale comme une excroiffance furvenue au corps politique, & qui, de fa nature, eft tellement inhérente à fa conftitution, que fon accroiffement même a prévenu les autres maladies qui auraient pu l'affiéger. Ce ferait donc manquer de politique, ce qui ferait fort malheureux, que de chercher à la réduire, puifque ce ferait attaquer les principes vitaux que d'entreprendre de l'extirper.

LE remède que je propofe pour arrêter les 'dangers qui menacent la Grande-Bretagne, ne peut qu'augmenter le volume de cette excroiffance, mais le corps auquel elle est adhérente, en acquiert plus de force & de vigueur pour l'aider à la supporter; en définitif, il lui faudra moins d'aliment, & elle finira par se diffoudre naturellement & d'elle-même.

Ce n'eft donc pas, je le répète, le rembourfement d'un capital, mais l'exactitude & la certitude du paiement des intérêts qui forment le crédit public de la Grande-Bretagne, & qu'on peut, qu'on doit même emploïer ce crédit

doit également s'accroître, & les facultés pour les acquitter doivent diminuer en même proportion; dans ce cas-là que deviendront & les capitaux & les intérêts?

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