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à Saint-Germain-en-Laye, le vingt-septième d'avril mil six cent quatre-vingt. Ainsi signé, COLBERT. Et scellé.

REMARQUES.

On a fait dans le mémoire suivant des remarques particulières sur ce bref et sur l'arrêt. On observera seulement ici,

1.0 Qu'il y avoit à Jouarre du désordre dans le spirituel, assez grand pour venir aux oreilles du roi, et pour être porté par le roi à celles du pape; et il paroît que ce monastère avoit besoin de réforme dans le chef et dans les membres.

2.o Le roi avoit fait visiter le monastère par M. de Saillant, prêtre de l'Oratoire, à présent évêque de Poitiers; et ainsi sa majesté étoit bien informée du mal de ce monastère qu'elle se crut obligée d'exposer au pape.

3.0 Les religieuses protestèrent contre le bref adressé aux sieurs Boust et Vinot, lorsqu'ils firent leur visite à l'abbaye de Jouarre; à ce que, direntelles, l'exécution dudit bref ne pût nuire ni préjudicier à leurs immunités et exemptions, comme relevantes et dépendantes immédiatement de sa sainteté : ce qui paroît par l'acte de protestation passé par-devant Royer, notaire apostolique à Meaux, en date du 27 juin 1679; lequel est signé de celles qui sont aujourd'hui les premières de l'abbaye.

4.0 o Les sieurs Boust et Vinot ayant fait une seconde visite, sa Majesté confirmée dans la connoissance qu'elle avoit des besoins de ce monastère, les expose de nouveau au pape, et demande pour visi teur M. l'archevêque de Paris.

5.o Ce prélat ne voulut point se charger de cette commission; ni il n'a accepté le bref, ni il ne l'a intimé au monastère de Jouarre, ni il n'a subdélégué comme il en avoit le pouvoir, ni il n'a fait aucune visite, ni aucun acte juridique en vertu de ce bref. On a lu à l'audience quelques lettres de compliment du même prélat, qui ont bien fait voir qu'il ne songeoit à aucune fonction; de sorte que ce bref est demeuré entièrement sans exécution.

:

6.0 Dix ans après le bref obtenu, l'abbesse et les religieuses, envers qui il n'a jamais eu d'exécution, s'avisent de vouloir s'en servir, et cela lorsque l'évêque fait sa charge de sorte que tout l'effet de ce bref est de laisser les religieuses dans l'indépendance si l'évêque ne disoit mot, et de l'empêcher lorsqu'il feroit son devoir.

7.0 Ce bref est si peu connu des abbesses et religieuses et si peu en leur pouvoir, que lorsqu'elles ont voulu s'en servir dans le procès, elles ont été obligées de le tirer par un compulsoire des registres du secrétariat de l'archevêché de Paris.

8.o Ce n'étoit donc point un bref qui eût eu la moindre exécution, puisqu'en ce cas le premier pas qu'il eût fallu faire, eût été de l'intimer aux religieuses. M. l'archevêque de Paris ne songeoit pas plus à s'en servir, puisqu'on le tire de lui par un compulsoire, et qu'il n'agit pas pour le faire valoir, n'ayant en aucune sorte paru dans la cause, et n'ayant fait aucune action pour revendiquer la juridiction.

9.o Selon toutes les maximes du droit, ce bref est

suranné

şuranné, et entièrement devenu caduc par la mort du pape déléguant avant toute exécution.

10.0 L'arrêt du conseil n'a non plus été exécuté, ni même signifié.

11.o Ces brefs ne dérogent pas aux décrets des conciles de Vienne et de Trente, qui par conséquent demeurent en leur entier.

12.o Si l'évêque eût fait son devoir, le roi n'auroit pas songé à impétrer un tel bref contre l'esprit des conciles et de l'ordonnance, qui veulent que les monastères aient un gouvernement réglé.

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MÉMOIRE

POUR

MESSIRE JACQUES-BENIGNE BOSSUET,

ÉVÊQUE DE MEAUX,

CONTRE

Dame HENRIETTE DE LORRAINE, abbesse de Jouarre.

SUR L'ARTICLE XXVII

DE L'ORDONNANCE DE BLOIS,

ET SUR LE BREF de l'archevêque de paris.
Article xxvII de l'ordonnance de Blois.

Tous monastères qui ne sont sous chapitres généraux, et qui se prétendent sujets immédiatement au saint Siége apostolique, seront tenus dans un an, se réduire à quelque congrégation de leur ordre en ce royaume, en laquelle seront dressés statuts et commis visitateurs, pour faire exécuter, garder et observer ce qui aura été observé pour la discipline régulière; et en cas de refus ou délai, y sera pourvu par l'évêque.

MADAME l'abbesse de Jouarre prétend que M. l'évêque de Meaux ne peut se prévaloir contre elle de cette ordonnance, parce qu'il ne l'a point sommée de s'agréger.

Il répond que la sommation seroit nécessaire pour

la constituer en demeure, si l'ordonnance n'avoit point déclaré ce qui se doit faire, au cas que les monastères négligent de se réduire en congrégation dans un an; mais elle a dit : Et en cas de refus ou délai, y sera pourvu par l'évêque. S'il se présente donc un monastère qui ait différé plus d'un an à s'agréger, l'ordonnance ne porte pas qu'il sera sommé de le faire; elle veut en ce cas, que l'évêque y pourvoie. Dans le commencement de l'article, elle oblige les monastères à faire diligence de s'agréger dans un an; l'obligation leur en est imposée par ces mots, seront tenus : ce n'est pas l'évêque qui est chargé de poursuivre leur agrégation, ce sont les monastères auxquels il est enjoint d'y procéder.

Madame l'abbesse de Jouarre n'allègue point de causes canoniques pour excuser son monastère de ce qu'il n'y a point satisfait. Les abbesses qui l'ont précédée avoient bonne connoissance de l'ordonnance de Blois, qui avoit été publiée dans tous les bailliages du royaume dès l'an 1580. Cette loi les a interpellées de jour à autre de s'unir à quelque congrégation de leur ordre; cependant elles ont négligé de le faire pendant plus de cent ans; et après ce long temps, lorsque M. l'évêque de Meaux se présente pour exercer sa charge, madame l'abbesse de Jouarre soutient qu'elle n'est point en demeure de s'agréger, sous prétexte que les prédécesseurs de M. l'évêque de Meaux ne l'en ont point sommée. Ils n'y étoient point obligés : le terme d'un an limité aux monastères pour se réduire en congrégation, est purement et simplement une grâce à l'égard des monastères de religieuses, parce que le

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