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MASCARILLE.

Je vous dis que Lucile agit par honte ainsi.

ALBERT.

Je te dis que j'aurai raison de tout ceci.

MASCARILLE.

Connaissez-vous Ormin, ce gros notaire habile ?....

ALBERT.

Connais-tu bien Grimpant, le bourreau de la ville?...

MASCARILLE.

Et Simon le tailleur, jadis si recherché?

ALBERT.

Et la potence mise au milieu du marché?

MASCARILLE.

Vous verrez confirmer par eux cet hyménée.

ALBERT.

Tu verras achever par eux ta destinée.

MASCARILLE.

Ce sont eux qu'ils ont pris pour témoins de leur foi.

ALBERT.

Ce sont eux qui dans peu me vengeront de toi.

MASCARILLE.

Et ces yeux les ont vus s'entre-donner parole.

ᎪᏞᏴᎬᎡᎢ.

Et ces yeux te verront faire la capriole.

MASCARILLE.

Et, pour signe, Lucile avait un voile noir.

ALBERT.

Et, pour signe, ton front nous le fait assez voir.

MASCARILLE.

O l'obstinė vieillard!

ᎪᏞᏴᎬᎡᎢ.

O le fourbe damnable!

Va, rends grâce à mes ans qui me font incapable De punir sur-le-champ l'affront que tu me fais: Tu n'en perds que l'attente, et je te le promets.

SCÈNE XI.

VALÈRE, MASCARILLE.

VALÈRE.

Hé bien? ce beau succès que tu devais produire ?....

MASCARILLE.

J'entends à demi-mot ce que vous voulez dire.
Tout s'arme contre moi; pour moi de tous côtés
Je vois coups de bâtons et gibets apprêtés.
Aussi, pour être en paix dans ce désordre extrême,
Je me vais d'un rocher précipiter moi-même,
Si, dans le désespoir dont mon cœur est outre,
Je puis en rencontrer d'assez haut à mon gré.
Adieu, Monsieur.

VALÈRE.

Non, non, ta fuite est superflue; Si tu meurs, je prétends que ce soit à ma vue.

MASCARILLE.

Je ne saurais mourir quand je suis regardé,
Et mon trépas ainsi se verrait retardé.

VALÈRE.

Suis-moi, traître, suis-moi; mon amour en furie Te fera voir si c'est matière à raillerie. MASCARILLE, seul.

Malheureux Mascarille, à quels maux aujourd'hui Te vois-tu condamner pour le péché d'autrui!

FIN DU TROISIÈME ACTE.

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Le sort absolument a conclu ma ruine.

Cette affaire venue au point où la voilà
N'est pas absolument pour en demeurer là,
Il faut qu'elle passe outre : et Lucile et Valère,
Surpris des nouveautés d'un semblable mystère,
Voudront chercher un jour dans ces obscurités,
Par qui tous mes projets se verront avortés.
Car enfin, soit qu'Albert ait part au stratagème,
Ou qu'avec tout le monde on l'ait trompé lui-même,
S'il arrive une fois que mon sort éclairci
Mette ailleurs tout le bien dont le sien a grossi,
Jugez s'il aura lieu de souffrir ma présence:
Son intérêt détruit me laisse à ma naissance;
C'est fait de sa tendresse. Et quelque sentiment
Où pour ma fourbe alors pût être mon amant,

Voudra-t-il avouer pour épouse une fille
Qu'il verra sans appui de bien et de famille?

ROSINE.

Je trouvé que c'est là raisonner comme il faut :
Mais ces réflexions devaient venir plutôt.
Qui vous a jusqu'ici caché cette lumière?
Il ne fallait pas être une grande sorcière

Pour voir, dès le moment de vos desseins pour lui,
Tout ce que votre esprit ne voit que d'aujourd'hui :
L'action le disait; et dès que je l'ai sue,

Je n'en ai prévu guère une meilleure issue.

ASCAGNE.

Que dois-je faire enfin? mon trouble est sans pareil: Mettez-vous en ma place, et me donnez conseil.

FROSINE.

Ce doit être à vous-même, en prenant votre place,
A me donner conseil dessus cette disgrâce;
Car je suis maintenant vous, et vous êtes moi:
Conseillez-moi, Frosine. Au point où je me voi,
Quel remède trouver? Dites, je vous en prie.

ASCAGNE.

Hélas! ne traitez point ceci de raillerie;

C'est prendre peu de part à mes cuisans ennuis Que de rire et de voir les termes où j'en suis.

FROSINE.

Ascagne, tout de bon, votre ennui m'est sensible,
Et pour vous en tirer je ferai mon possible.
Mais que puis-je, après tout? Je vois fort peu de jour
A tourner cette affaire au gré de votre amour.

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