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DES

BOURBONS.

LOUIS XV,

Né à Versailles le 15 février 1710; parvenu à la couronne le 1" septembre 1715; sacré à Reims le 22 février 1723; marié le 4 septembre 1725, à Marie Leczinska de Lorraine; mort à Versailles le 10 mai 1774.

MINORITÉ DU ROI.

RÉGENCE DU DUC D'ORLÉANS.

N° 1. LETTRE de cachet adressée aux officiers du parlement de Paris pour qu'ils continuent leurs fonctions.

Versailles, 1er septembre 1715. ( Archiv.)

De par le Roi. Nos amés et féaux. La perte que nous venons de faire du roi notre très-honoré seigneur et bisaïeul, nous touche si sensiblement, qu'il nous seroit impossible à présent d'avoir d'autres pensées que celles que la piété et l'amour nous demandent pour le repos et le salut de son ame, si le devoir à quoi nous oblige l'intérêt que nous avons de maintenir la couronne en sa grandeur, et de conserver nos sujets dans la tranquillité, ne nous forçoit de surmonter ces justes sentiments, pour prendre les soins nécessaires à la conduite de cet Etat; et parce que la distribution de la justice est le meilleur moyen dont nous puissions nous servir pour nous en acquitter dignement, nous vous ordonnons et nous vous exhortons autant qu'il nous est possible, qu'après avoir fait à Dieu les prières que vous devez lui présenter pour le salut de feu notredit seigneur et bisaïeul, vous ayez, nonobstant cette mutation, à continuer la séance de notre parlement et l'administration de la justice à nos sujets, T. 1 DU Règne.

1

avec la sincérité que le devoir de vos charges et l'intégrité de vos consciences vous y obligent, et cependant nous vous assurons que nous recevrons avec satisfaction vos respects et vos soumissions accoutumées en pareil cas; et que vous nous trouverez toujours tels envers vous et en général et en particulier, qu'un bon roi doit être envers ses bons et fidèles sujets et serviteurs.

N° 2. — ARRÊT du parlement de Paris touchant la régence, et procès-verbal de ce qui s'est passé au parlement à ce sujet.

2 septembre 1715. (Archiv.)

EXTRAIT DES REGISTRES DU PARLEMENT.

Princes du sang. Le duc d'Orléans, le duc de Bourbon, le comte de Charolois, le prince de Conty, le duc du Maine, le prince de Dombes, le comte de Toulouse.

Pairs de France. L'archevêque duc de Reims, les évêques duc de Laon, duc de Langres, comte de Beauvais, comte de Noyon; les ducs d'Uzès, de Monbazon, de la Tremoille, de Sully, de Saint-Simon, de la Rochefoucault, de la Force, de Rohan, d'Albret, de Piney-Luxembourg, d'Estrées, de Gramont, de la Meilleraye, de Mortemart, de Noailles, d'Aumont, de Charrost, de Villars, d'Harcourt, de FitzJames, d'Antin, de Chaulnes, de Rohan-Rohan, d'Ostun. Premier président. Messire Jean-Antoine de Mesme, chevalier. Présidens. Messires André Potier, Jean-Jacques Charron, Chrestien de Lamoignon, Antoine Portail, Michel-Charles Amelot, Louis le Peletier, Nicolas-Louis de Bailleul.

Conseillers de la grande chambre. Le Nain, doyen. (Suivent les noms de trente-deux conseillers, dont onze conseillersclercs.

Présidents des enquêtes et requétes. (Suivent les noms de dixhuit présidents.)

Conseillers d'honneur. (Suivent trois noms.)
Maîtres des requêtes. (Suivent trois noms.)

Conseillers des enquêtes et requêtes. (Suivent soixante-quatorze noms. )

Ce jour les gens du roi sont entrés en la cour, et ont présenté la lettre de cachet du roi à présent régnant, dont la teneur suit. (V. la pièce précédente.)

Toutes les chambres ayant été assemblées, lecture a été

faite de la lettre de cachet; après laquelle M. le premier président a fait observer à Messieurs qu'il n'étoit point fait mention du nouveau serment, comme dans celle qui fut apportée an parlement après la mort du roi Louis XIII.

Il a été arrêté que des députés de la cour iront incessamment devers le roi le saluer de la part de la compagnie, l'assurer de ses respects et de ses soumissions, et supplier Sa Majesté de venir en son parlement le plus tôt que sa commodité le lui pourra permettre, se faire voir à ses sujets en son lit de justice.

Les gens du roi qui s'étoient retirés après avoir présenté la lettre, ont été mandés; M. le premier président leur a fait entendre l'arrêté de la compagnie, et leur a dit de savoir de M. le chancelier l'heure de la commodité du roi : ils ont dit qu'ils obéiroient aux ordres de la cour, et se sont retirés.

:

Et ensuite M. le premier président a dit, que M. le duc d'Orléans lui ayant fait l'honneur de lui dire la veille, qu'il viendroit ce matin en la cour pour assister à l'ouverture du testament du feu roi, il étoit nécessaire d'aviser de quelle manière il seroit reçu, attendu qu'il ne se trouvoit point d'exemple qu'il y eût eu de députation pour recevoir d'autres princes du sang que les fils de France: qu'il ne pouvoit s'empêcher de dire, que M. le duc d'Orléans lui-même lui avoit dit, que l'on ne devoit pas lui rendre les mêmes honneurs qu'aux fils de France mais qu'il paraissoit à lui premier président, que la naissance et le rang de M. le duc d'Orléans pouvoient porter la compagnie à lui faire une députation semblable à celles qui avoient été faites à M. le duc de Berry et à Monsieur, Gaston duc d'Orléans: sur quoi la cour ayant délibéré, il a été arrê1á qu'attendu le rang de M. le duc d'Orléans dans la conjoncture présente, deux présidents et deux conseillers iront le saluer à la Sainte-Chapelle et le conduiront à la cour, ainsi qu'il en a été usé pour feu M. le duc de Berry, le 15 mars 1713, et pour Monsieur, Gaston duc d'Orléans, toutes les fois qu'il est venu en la cour.

Sur les sept à huit heures sont venus en la cour successivement, MM. les ducs de Bourbon, comte de Charolois, prince de Conty, duc du Maine, prince de Dombes et comte de Toulouse, princes du sang; passant à leurs places à travers le parquet, et les pairs ecclésiastiques et laïques ci-dessus nommés par derrière le barreau; et comme ils étoient en grand nombre, ils ont rempli premièrement les trois bancs du parquet, et ensuite trois autres formes que l'on avoit mises de

vant le banc du côté du greffe, M. le Meusnier, conseiller, est demeuré à l'ordinaire au bout du premier; M. Robert au bout du second, et M. le Nain, doyen, au bout du troisième attenant la lanterne du côté du greffe.

Vers les huit à neuf heures, la cour ayant été avertie que M. le duc d'Orléans étoit à la Sainte-Chapelle où il entendoit la messe, MM. les présidents le Peletier et de Bailleul, Cadeau et Gaudart, conseillers, ont été députés pour l'y aller saluer au nom de la compagnie, ce qu'ils ont fait et l'ont conduit en la cour, MM. les présidents marchant à ses côtés, et MM. les conseillers derrière lui.

M. le duc d'Orléans a passé à travers le parquet; et lorsqu'il a été placé au-dessus de M. le duc de Bourbon, M. le premier président lui a dit:

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Monsieur, le parlement profondément affligé de la perte que la France vient de faire, conçoit de grandes espérances pour le bien public, de voir un prince aussi éclairé que vous, Monsieur, aussi pénétré que vous l'êtes de tous les sentiments de justice, venir dans la compagnie avec les dispositions que vous y apportez la cour m'a chargé de vous assurer, Monsieur, qu'elle concourra avec vous au service du roi et de l'Etat de toutes ses forces et avec tout le zèle qui l'a toujours distinguée des autres compagnies du royaume : elle m'a en même temps expressément ordonné de vous protester, Monsieur, qu'elle ira au-devant de tout ce qui pourra vous prouver le profond respect qu'elle a pour vous. »

M. le duc d'Orléans a marqué à M. le premier président beaucoup de satisfaction de ce qu'il lui avoit dit, et a témoigné ensuite vouloir parler à la compagnie en présence des gens du roi; aussitôt ils ont été mandés par M. le premier président, et M. le duc d'Orléans ayant salué la compagnie, a dit :

« Messieurs, après tous les malheurs qui ont accablé la France et la perte que nous venons de faire d'un grand roi,notre unique espérance est en celui que Dieu nous a donné : c'est à lui, Messieurs, que nous devons à présent nos hommages, et une fidèle obéissance. C'est moi, comme le premier de ses sujets, qui dois donner l'exemple de cette fidélité inviolable pour sa personne, et d'un attachement encore plus particulier que les autres aux intérêts de son Etat. Ces sentiments connus du feu roi, m'ont attiré sans doute ces discours pleins de bonté, qu'il m'a tenus dans les derniers instants de sa vie, et dont je crois vous devoir rendre compte. Après avoir reçu le viatique, il m'appela, et me dit: Mon neveu, j'ai fait un testament où je

s'il

vous ai conservé tous les droits que vous donne votre naissance; je vous recommande le dauphin, servez-le aussi fidèlement que vous m'avez servi, et travaillez à lui conserver son royaume; s' vient à manquer vous serez le maître, et la couronne vous appartient. A ces paroles il en ajouta d'autres, qui me sont trop avantageuses pour les pouvoir répéter, et il finit en me disant: J'ai fait les dispositions que j'ai cru les plus sages; mais comme on ne sauroit tout prévoir, s'il y a quelque chose qui ne soit pas bien, on le changera. Ce sont ses propres termes...... Je suis donc persuadé que suivant les lois du royaume, suivant les exemples de ce qui s'est fait dans de pareilles conjonctures, et suivant la destination même du feu roi, la régence m'appartient; mais je ne serai pas satisfait, si à tant de titres qui se réunissent en ma faveur vous ne joignez vos suffrages et votre approbation, dont je ne serai pas moins flatté que de la régence même. Je vous demande donc, lorsque vous aurez lu le testament que le feu roi a déposé entre vos mains, et les codiciles que je vous apporte, de ne point confondre mes différens titres, et de délibérer également sur l'un et sur l'autre, c'est-à-dire sur le droit que ma naissance m'a donné, et sur celui que le testament y pourra ajouter. Je suis persuadé même que vous jugerez à propos de commencer par délibérer sur le premier; mais à quelque titre que j'aie droit à la régence, j'ose vous assurer, Messieurs, que je la mériterai par mon zèle pour le service du roi, et par mon amour pour le bien public, surtout étant aidé par vos conseils, et par vos sages remontrances; je vous les demande par avance en protestant devant cette auguste assemblée que je n'aurai jamais d'autre dessein que de soulager les peuples, de rétablir le bon ordre dans les finances, de retrancher les dépenses superflues, d'entretenir la paix au dedans et au dehors du royaume, de rétablir surtout l'union et la tranquillité de l'Eglise, et de travailler enfin avec toute l'application qui me sera possible à tout ce qui peut rendre un Etat heureux et florissant. Ce que je demande donc à présent, Messieurs, est que les gens du roi donnent leurs conclusions sur la proposition que je viens de faire, que l'on délibère aussitôt que le testament aura été lu, sur les titres que j'ai pour parvenir à la régence, en commençant par le premier, c'est-à-dire par celui que je tire de ma naissance et des lois du >> royaume.

Les gens du roi se sont levés et ont dit par la bouche de maitre Guillaume François Joly de Fleury, l'un des avocats dudit seigneur, que la juste douleur qui les occupoit leur per

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