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que nous avons eu le soin d'apprécier dans l'introduction, peuvent apporter quelques modifications dans le pronostic.

EMPOISONNEMENT PAR L'ACIDE nitrique.

L'acide nitrique ou azotique, dans les recherches toxicologiques, peut être : 1o à l'état pur et du commerce, 2o étendu d'eau, 3o mêlé avec des liquides organiques, 4o mêlé ou combiné avec les matières des vomissements ou contenues dans le tube intestinal, avec les tissus du tube intestinal ou des autres organes, avec les vêtements, etc.

Caract. phys. L'acide azotique pur est liquide, incolore; il donne à l'air de légères vapeurs blanches, d'une odeur particulière et analogue à celle de l'acide azoteux. Il s'altère et se colore en jaune-rougeâtre à la lumière directe. Sa densité est de 1,5033. Il bout et se volatilise à + 80o. Il ne peut exister sans eau; le plus concentré en contient 14 à 15 part. pour %; aussi, les corps qui, comme l'acide sulfurique concentré, la lui enlèvent, en dégagent des vapeurs rutilantes d'acide nitreux

L'acide nitrique du commerce, eau-forte, esprit-de-nitre, est presque toujours légèrement coloré en jaune-verdâtre, coloration qu'il doit à l'acide nitreux ou au chlore. Il contient quelquefois de l'acide sulfurique, et, plus rarement du nitrate de potasse. Sa densité varie entre 1,220 à 1,250, et son point d'ébullition et de volatilisation entre 100 à 120. Il donne aussi de légères vapeurs à l'air.

Caract. chim. L'acide azotique, qu'il soit pur ou du commerce, offre les caractères chimiques suivants: 1° il rougit fortement la teinture de tournesol; 20 il colore les matières organiques en jaune, un fragment d'allumette, l'épiderme, etc.; la tache, qui ne disparaît ni à l'air, ni par la chaleur, devient plus foncée et plus brillante par l'ammoniaque ; 3o la limaille de cuivre ou de fer, l'étain, le mercure, etc., en dégagent à froid, et avec effervescence, des vapeurs nitreuses, reconnaissables à leurodeur particulière, et à leur couleur orangée-rougeâtre ourutilante. Ces métaux s'oxydentaux dépens de l'oxygène de l'acide

azotique, le font passer à l'état de gaz bioxyde d'azote, dont la propriété, est de former des vapeurs nitreuses, en se combinant avec l'oxygène de l'air; aussi, pour constater ce caractère, fautil opérer au contact de l'air. Le charbon, le sucre, ou toute autre matière organique, en dégagent aussi, mais à chaud, des vapeurs rutilantes; 4o l'acide azotique colore la morphine en jaune-orangé, la dissout, et prend une couleur rouge, qui, par un contact prolongé, passe au jaune brillant. D'après M. Devergie, la coloration de la morphine est due à l'acide nitreux, résultant de la décomposition de l'acide nitrique; en effet, pendant la réaction, on peut constater l'odeur du premier acide; d'ailleurs, la morphine, plongée dans les vapeurs nitreuses, se colore aussi en rouge.

L'acide azotique pur se distingue de l'acide du commerce, parce qu'il ne laisse aucun résidu après évaporation, et qu'il ne précipite pas par les solutés étendus de nitrate d'argent et de baryte, réactifs, qui indiquent, le premier, la présence du chlore ou de l'acide hydrochlorique, le second, celle de l'acide sulfurique.

Le dégagement de vapeurs nitreuses par un corps oxydable, la coloration de la morphine, sont les deux caractères propres, et par conséquent caractéristiques de l'acide azotique. Les autres acides, et en particulier les deux acides minéraux les plus répandus, ne possèdent pas ces caractères, puisque, l'hydrochlorique dissout la morphine sans se colorer, et le sulfurique la noircit, la carbonise.

Acide azotique étendu d'eau.

L'acide azotique se mêle en toutes proportions avec l'eau, en produisant une légère élévation de température. Les eauxfortes, dites première, seconde, troisième, dont on se sert dans les arts, ne sont que de l'acide du commerce étendu d'une plus ou moins grande quantité d'eau, et en offrent ordinairement les caractères chimiques. Mais, lorsque l'acide nitrique est délayé dans plus de 5 à 6 part. d'eau, pour constater ces caractères, il faut avoir recours à des procédés particuliers.

Procédé ordinaire. Constatez la réaction acide des liquides par le papier bleu de tournesol; si cette réaction est très-mar-quée; si enfin la quantité d'acide est supposée être un peu forte, concentrez-les dans une cornue, afin de ne pas perdre les portions d'acide qui pourraient se volatiliser, et constatez ensuite directement, comme il a été indiqué, le dégagement des vapeurs rutilantes par la limaille de cuivre et la coloration de la morphine. Si au contraire la réaction acide est faible, si les liquides renferment peu d'acide azotique, saturez-les par la potasse, c'est-à-dire, ajoutez y peu à peu un soluté de potasse, jusqu'à ce que le papier rouge de tournesol soit ramené au bleu; évaporez-les ensuite jusqu'à siccité dans une capsule de verre ou de porcelaine. Le résidu cristallin, introduit avec quelques gouttes d'eau et que'ques fragments de limaille de cuivre dans un tube de verre fermé à l'une de ses extrémités, laissera dégager, par l'addition de quelques gouttes d'acide sulfarique, surtout à l'aide d'une légère chaleur, des vapeurs nitreuses, reconnais sablés à leur couleur et à leur odeur, et à ce qu'elies colorent la morphine en rouge. On pourrait encore, après avoir saturé les liquides par la potasse, les concentrer jusqu'à consistance sirupeuse, et laisser le vasé en repos dans un lieu frais; au bout de vingt-quatre à quarante huit heures, on obtiendrait des cristaux d'azotate de potasse, sel, qui déflagre sur les charbons ardents, et qui, traité par la limaille de cuivre et l'acide sulfu rique, comme il vient d'être dit, donne les réactions indiquees. Mais on perd ainsi l'azotate de potasse resté dans les eauxmères. D'ailleurs, la propriété de déflagrer sur les charbons ardents appartient aussi aux chlorates, aux iodates, etc.

Le but de ces opérations est facile à comprendre. Le degré de volatilisation de l'acide azotique étant à peu près celui de l'eau, on sature les liquides par la potasse, afin de ne pas perdre de cet acide pendant la concentration. L'acide sulfurique s'empare de la potasse, déplace l'acide azotique, qui réagit alors sur la limaille de cuivre, comme s'il était concentré; aussi, il importe que le résidu ne soit pas trop étendu d'eau, laquelle, en délayant l'acide, empêcherait cette réaction.

Ce procédé suffit dans la majorité des cas, puisqu'on peut décéler ainsi 5 à 10 centigr. d'acide azotique dans un liquide. Cependant, lorsqu'on opère sur de petites quantités, quoique l'odeur de l'acide nitreux soit ordinairement assez prononcée, la couleur ne l'est pas toujours, et, les personnes peu exercées pourraient conserver quelques doutes. Pour corroborer ce caractère, et surtout, pour décéler de très-faibles quantités d'acide azotique, O. Saugnessey et Devergie, proposent chacun un réactif, fondé sur la propriété qu'a l'acide nitreux de colorer la morphine en orangé-rougeâtre et le soluté de proto-sulfate de fer en noir. MMrs Liebig et Desbassin de Richemont ont aussi indiqué chacun un réactif pour décéler de faibles quantités d'acide azotique.

Procédé O. Saugnessey et Christison. Ils saturent les liquides par la potasse, les évaporent jusqu'à consistance sirupeuse, pour obtenir l'azotate de potasse cristallisé, introduisent ce sel dans un tube avec quelques gouttes d'acide sulfurique, et projettent à la surface quelques cristaux de morphine. Celle-ci se colore d'abord en orangé-rougeâtre, et communique ensuite une couleur rose au mélange. Il est quelquefois nécessaire d'activer la réaction à l'aide d'une légère chaleur. On pourrait encore, plonger dans les vapeurs nitreuses une baguette de verre, chargée à son extrémité de quelques fragments de morphine, et constater ensuite que, ainsi colorée, elle passe au rougefoncé ou amarante quand on la touche avec une goutte de soluté de potasse.

Ces deux chimistes considèrent la coloration de la morphine comme une preuve évidente de l'acide azotique. Christison observe que la morphine pure n'est point colorée; que celles des pharmacies prend une teinte moins foncée; que celle dont il se sert est en cristaux non tout à fait incolores. Nous avons opéré avec de la morphine en cristaux légèrement jaunâtres, qui nous a donné une bonne réaction. Il importe donc, avant de se servir de la morphine comme réactif, de l'essayer en décomposant quelques fragments d'azotate de potasse par l'acide sulfurique. Cette propriété appartenant à une matière étrangère à la mor

phine serait par conséquent moins caractéristique que le dégagement de vapeurs nitreuses.

Procédé Devergie. Ayant remarqué que le chlore colorait la morphine en jaune-serin, couleur qui passe au rouge-cerise par le soluté de potasse, M. Devergie, pense qu'on pourrait commettre une erreur, si les liquides à examiner contenaient des chlorures, quoique cependant, cette coloration, soit un peu différente de celle que prend la morphine par l'acide azoteux et la potasse. Afin d'éviter cette cause d'erreur, il propose d'adjoindre à la morphine le sulfate de fer. A un tube de verre, dans lequel il introduit le résidu de l'évaporation des liquides saturés par la potasse, une ou deux gouttes d'eau et d'acide sulfurique, et quelques fragments de limaille de cuivre, il adapte un autre tube coudé, plus petit, contenant quelques cristaux de morphine, effilé et renversé, afin de mieux constater l'odeur de l'acide azoteux tube qu'il remplace ensuite, après avoir constaté la coloration de la morphine, par un autre tube courbé en , dont la courbure inférieure renferme 4 ou 5 gouttes de soluté de proto-sulfate de fer. Ce soluté se colore d'abord en brun, puis en noir, en absorbant le bioxyde d'azote. M. Devergie ne connaît pas d'autre acide qui colore ainsi ce soluté. Le chlore lui donne une couleur rougeâtre.

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Par ce procédé on peut constater à la fois quatre caractères propres à l'acide azotique : l'odeur et la couleur de l'acide azoteux, la coloration de la morphine et celle de sulfate de fer; par conséquent on doit lui accorder la préférence. Nous reviendrons ci-après avec plus de détails sur ce procédé, et nous donnerons une manière de procéder qui permettra de constater simultanément ces quatre caractères.

Procédé Liebig. Il est fondé sur la propriété qu'a l'acide azotique de décolorer le bleu de composition (sulfate d'indigo ou d'indigotine). On mêle au liquide à examiner, suffisante quantité de sulfate d'indigo, pour le colorer en bleu clair ou en bleu de ciel, et on fait bouillir quelques instants. Le liquide se décolore complétement ou passe au jaune-sale. On peut ainsi décéler, d'après Liébig, la 1/4000 p. d'acide azo

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