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INTRODUCTION.

La toxicologie, τοξικολόγος, de τοξικόν poison et de λόγος discours, est la science qui traite des poisons et des empoisonnements sous le point de vue médical, chimique et légal.

Est considéré comme poison tout corps qui, par suite de son action chimico-dynamique locale, et surtout de son absorption, donne lieu à des accidents graves ou mortels.

Les médicaments ne diffèrent des poisons que par le but qu'on se propose, par le résultat à obtenir; car plusieurs, à haute dose, variable pour chacun d'eux, agissent comme poisons, et ceux-ci, à faible dose, sont administrés comme médicaments.

Les substances telles que le verre pilé, etc., considérées par quelques toxicologistes comme des poisons mécaniques, que l'art. 301 du Code pénal assimile en quelque sorte aux poisons, n'ont pas d'action chimique locale, ne sont pas absorbées, agissent comme agents physiques, doivent par conséquent faire partie des corps vulnérants.

Les venins, les virus, les miasmes, etc., ne diffèrent pas des poisons dans le sens absolu du mot, mais ils sont d'origine organique, se produisent dans des circonstances particulières. Les venins, sécrétés par des appareils propres aux animaux dits venimeux, sont toxiques par inoculation, par la muqueuse pulmonaire, inertes par la voie gastro-intestinale et les autres muqueuses. Les virus, après une incubation plus ou moins longue, donnent lieu à des maladies spécifiques (rage,

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syphilis), à un produit morbifique identique, transmissibles par inoculation. Les miasmes, les effluves, etc., proviennent des matières organiques en décomposition ou d'individus malades, et, portés à une plus ou moins grande distance par l'intermédiaire de l'air, ils produisent des maladies endémiques ou épidémiques, à forme périodique (fièvres intermittentes), continues (peste, typhus, etc.).

On donne le nom d'intoxication, d'empoisonnement, à l'ensemble des effets produits par un poison. Cependant, la dernière dénomination a un sens plus étendu, comprend, en outre, l'action d'empoisonner, l'attentat à la vie ; par conséquent, elle est plus médico-légale.

Il y a empoisonnement, légalement parlant, toutes les fois qu'un poison ou une substance (cuivre, plomb, etc.), administrée dans des circonstances à pouvoir le devenir, ont été donnés dans un but coupable, quel qu'en soit le résultat, par conséquent, sous le point de vue de la criminalité, on considère l'effet du poison et l'intention dans laquelle il a été administré.

LEGISLATION. Est qualifié d'empoisonnement tout attentat à la vie d'une personne par l'effet de substances qui peuvent donner la mort, plus ou moins promptement, de quelque manière que ces substances aient été employées ou administrées, et quelles qu'en aient été les suites (Code pénal, art. 301.)

Tout coupable d'assassinat, de parricide, d'infanticide ou d'empoisonnement, sera puni de mort (Code pén., art. 301).

ÉTATS DES POISONS.-RECHERCHES TOXICOLOGIQUES.

Les minéraux, les végétaux fournissent la plus grande partie des substances toxiques; l'art en fabrique un très-grand nombre; il s'en produit dans les réactions chimiques, l'altération spontanée ou par le feu des matières organiques; aussi, les poisons sont répandus avec une telle profusion dans la nature, que si ce n'étaient l'instinct, l'expérience acquise par l'homme et les animaux, les perfectionnements apportés dans

les arts économiques, industriels, la vie serait continuellement compromise.

Dans quel but la nature a-t-elle été si prodigue de substances nuisibles aux êtres vivants? Ce ne peut être comme moyen de destruction en général, car ils s'entre-détruisent assez d'eux-mêmes, sont assez décimés par les épidémies, mais plutôt parce que tout est relatif en ce monde, le bien comme le mal; c'est à l'homme à bien utiliser ce qui l'entoure : ainsi les poisons peuvent servir à détruire les espèces nuisibles, et, convenablement administrés, sont des médicaments précieux.

La plupart des poisons inorganiques en usage sont le produit de l'art. Ceux qui existent dans le sein de la terre s'y trouvent à l'état insoluble ou peu soluble, fort heureusement, car, dissous par l'eau, ils rendraient ce liquide toxique; bien plus, la petite quantité qui est entraînée par les eaux minérales, en forme souvent un des principes constituants le plus important.

Les poisons organiques sont répandus sur toute la surface de Ja terre, et, depuis les productions cryptogamiques qui se développent spontanément sur les matières alimentaires, jusqu'aux plantes qui font l'ornement de nos jardins, il est bien peu de familles qui ne fournissent de substances toxiques. Leurs propriétés résident dans des produits acides, alcalins, résineux, huileux, oléorésineux, disséminés dans toute la plante, condensés dans un organe, ou renfermés dans des réservoirs spéciaux, de manière à ne pas passer dans la grande circulation, à rester inertes, tandis que par les voies ordinaires de l'absorption ils sont toxiques, même pour l'animal, la plante qui les ont fabriqués.

Les poisons inorganiques et organiques sont solides ou liquides; plusieurs peuvent se réduire à l'état de gaz, de vapeurs, soit par l'action de la chaleur, soit par réaction chimique; cependant la plupart des gaz toxiques ou asphyxiants, stables à la température ordinaire, se dégagent du sein de la terre, résultent de l'altération spontanée ou par le feu des

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matières organiques. Depuis la découverte des agents anesthésiques, la toxicologie pneumatique a acquis une trèsgrande importance.

L'expert peut être appelé à reconnaître les poisons dans les états suivants : 4° en nature ou tels qu'on les trouve dans le commerce; 2° dissous dans l'eau ou tout autre véhicule incolore ou coloré; 3° dans les matières alimentaires, les boissons, celles des vomissements, des déjections, le tube intestinal; 4° dans les organes (foie, rate, etc.), les liquides (urines, sang, etc.), où ils ont pénétré par absorption; 5° dans la terre du cimetière, l'atmosphère, etc.

I.-Les poisons solides, tels qu'on les trouve dans le commerce, peuvent être reconnus aux caractères physiques et organoleptiques (couleur, odeur, saveur, aspect, densité, forme cristalline, etc.), microscopiques, botaniques, zoologiques, pharmacologiques, à leur solubilité ou insolubilité dans l'eau, l'alcool, l'éther, aux modifications qu'ils éprouvent au chalumeau, sur les charbons ardents. Dans ces tâtonnements le charbon est un réactif précieux. Les poisons inorganiques peuvent fondre, déflagrer, se vaporiser en vapeurs colorées ou incolores avec ou sans odeur, se réduire même si c'est un poison de la 4 section; mais ne noircissent pas, ne se carbonisent pas, ne donnent pas des produits empyreumatiques comme les poisons organiques qui, en outre, ont une saveur amère, âcre, vireuse, mais non salée, métallique, et plusieurs une structure fibreuse, celluleuse. Nous avons une telle habitude de ces expériences, qu'avec deux charbons ardents, même sans le secours du chalumeau, nous pourrions distinguer la plupart des poisons inorganiques.

II.-Les poisons naturellement liquides ou dissous dans un liquide incolore, peuvent aussi se reconnaître aux caractères physiques, organoleptiques et pharmacologiques, à leur réaction au papier tournesol, et surtout par les réactifs généraux, l'acide sulfhydrique, qui ne précipite pas les poisons acides et à base alcaline, et précipite en blanc les sels de zinc ;

en jaune les arsénicaux, les antimoniaux, les deutosels d'étain; en noir les autres poisons de cette section, dont la plupart fournissent ensuite des réactions caractéristiques par la potasse, le cyanoferrure de potassium, l'iodure, le chlorure, un fil de fer, de cuivre en spírales, etc.

Lorsque le poison est dissous dans des liquides colorés, la matière colorante masque ces réactions. Pendant longtemps on les a préalablement décolorés par le charbon pur ou le chlore. Le charbon décolore parfaitement, mais il absorbe aussi le poison. Cet inconvénient a été un peu exagéré, et nous avons décoloré avec succès le vin pour la recherche de l'iodure de potassium, de l'acide nitrique, de l'arsenic. Mais il faut que la décoloration soit prompte. On agite vivement le liquide avec le charbon, et on filtre immédiatement. Le chlore précipite l'iode, les sels de plomb; d'argent, les protosels de mercure, transforme certains poisons. A cause de ces inconvénients, le chlore et le charbon ne sont que très-rarement employés comme corps décolorants. Il est mieux de précipiter le poison par un courant de gaz sulfhydrique en sulfure (vin plombique), qu'on transforme ensuite en azotate par l'acide azotique, ou bien d'évaporer les liquides à siccité, et d'agir sur le résidu comme s'il provenait des liquides chargés de matière organique.

III. Recherche des poisons dans les matières alimentaires, celles des vomissements, des déjections, le tube intestinal. Ils peuvent s'y rencontrer à l'état 4° solide; 2o de dissolution; 3o de combinaison. Après avoir constaté l'odeur, la couleur, l'aspect, la saveur de ces matières, delayez-les dans s. q. d'eau et décantez-les dans un autre vase, afin de s'assurer si, au fond, sur les parois, il n'existe aucune trace de poison. Séparez les parties liquides des solides; étendez cellesci par petites couches sur une lame de verre, et examinez-les à une bonne lumière. Le tube intestinal et son contenu seront soumis au même examen (voyez arsenic, cantharides). Chauffez graduellement les parties solides et liquides en vase clos, afin

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