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experts, donnaient, par l'azotate d'argent: l'estomac 2 gr., 810 de chlorure; les intestins 7 g., 971; le foie 6 g., 654, autant enfin que les mêmes organes de la fille Darveng; 2° que cette fille ayant vécu assez longtemps, l'acide chlorhydrique aurait été rejeté par le vomissement ou éliminé, ou bien serait passé à l'état de chlorure, et qu'alors il était impossible, même quelques jours après son ingestion, de le retirer à l'état libre de ces organes.

ASSISES DE L'AISNE 1847. Chez Poudron, âgé de 3 ans et demi, MM. Fleurquint et Allart constatent comme lésions principales: bords des lèvres, partie antérieure et supérieure de la langue brun-noirâtre, corrodés; dents et voile du palais peu altérés; au cou, à la partie antérieure de la poitrine, l'épiderme s'enlève facilement; pharynx et œsophage d'un rouge très-vif; muqueuse stomacale rouge, boursouflée, détruite en quelques endroits ainsi que la musculeuse; trois perforations à bords arrondis, minces près du pylore; liquide brun sanguinolent dans l'abdomen. Conclusions: La mort est due à un liquide corrosif introduit violemment dans la bouche de l'enfant.

Le. 4 août 1847, les experts ayant à analyser des taches rougeâtres d'une calotte en velours et les organes, comme ils n'offraient pas de coloration jaune, ils recherchent d'abord l'acide sulfurique par le procédé de l'éther, sans résultat. Ils précipitent la matière organique par l'alcool, filtrent, soumettent les liqueurs à une distillation prolongée. Le produit distillé se troublait à peine par l'azotate d'argent, tandis que le résidu de la cornue, très-acide, donnait un précipité caractéristique. Quoiqu'ils n'aient pas obtenu d'acide chlorhydrique à la distillation, par l'abondance du précipité et les corrosions de l'estomac, ils conclurent à l'ingestion de cet acide concentré. Comme dans l'affaire Denisty, l'expertise chimique pourrait être attaquée; mais combinée avec les lésions, les conclusions nous paraissent avoir toute leur valeur toxicologique.

EMPOISONNEMENT PAR L'EAU RÉGALE.-Elle dissout l'or, offre les caractères de l'acide chlorhydrique et azotique, et agit comme ce dernier.

EMPOISONNEMENT PAR L'ACIDE PHOSPHORIQUE.-V. Phosphore.

EMPOISONNEMENT PAR L'ACIDE acétique.

On trouve dans le commerce plusieurs sortes d'acide acétique 1o l'acide acétique pur ou concentré, vinaigre radical des pharmacies. Il est liquide, incolore, assez fluide, d'une saveur mordante, fortement acide, d'une odeur particulière de vinaigre, piquante, agréable et ranimante. Il se solidifie en masses lamelleuses entre + 4 à 5o. Sa densité est de 1,063. Il s'enflamme lorsqu'il est chauffé dans des vaisseaux ouverts, et brûle avec une flamme bleue. Il est soluble dans l'eau et dans l'alcool. Il forme avec la potasse un sel déliquescent, et ne précipite pas par le nitrate d'argent, l'eau de chaux, les sels de baryte. Ces quatre caractères, et surtout son odeur particulière, le distinguent des autres acides, et en particulier des acides nitrique, hydrochlorique, phosphorique et sulfurique. Si l'acide acétique était étendu d'eau, pour constater ces caractères et surtout son odeur, il faudrait, après l'avoir saturé par la potasse, l'évaporer à une douce chaleur jusqu'à siccité; le résidu salin, traité par quelques gouttes d'acide sulfurique, laisserait dégager des vapeurs blanches ayant l'odeur caractéristique de l'acide acétique. On pourrait recueillir ces vapeurs en opérant dans un appareil distillatoire, comme il sera dit ciaprès. 2o L'acide pyro-acétique, pyro-ligneux, vinaigre de bois, vinaigre de Mollerat, qui s'obtient par la distillation du bois rectifié. Il est liquide, d'une saveur fortement acide, avec un arrière-goût pyrogéné, dont on peut cependant le débarrasser. Il sert à composer les acétates, et, étendu d'eau, à remplacer le vinaigre dans l'art culinaire. 3 Le vinaigre de vin, de cidre, de bière, liqueurs très-complexes et qui ont pour base l'acide acétique; 4o enfin le vinaigre distillé, qui n'est que le précédent dépouille des matières salines et colorantes par la distillation. Il sert dans les pharmacies à composer les oxymellites, etc.

Acide acétique et matières organiques. Le vinaigre radical, ainsi que le vinaigre de bois non étendu, agissent sur le vin, le cidre, le thé, le café, le lait et la bile, comme les autres aci

des. Ils blanchissent d'abord les muqueuses, les colorent ensuite en brun, et les réduisent en une espèce de gelée. Pour déceler l'acide acétique dans les matières alimentaires, dans les tissus du tube intestinal, etc., on sépare les parties liquides des solides. On délaie les matières solides dans de l'eau distillée, on passe de nouveau et on filtre; les liquides réunis sont distillés jusqu'à presque siccité, sans cependant les carboniser, au bain de chlorure de calcium, comme nous l'avons indiqué à l'acide hydrochlorique. Le produit distillé, saturé par la potasse, évaporé au bain-marie jusqu'à siccité, et le résidu salin chauffé avec la moitié de son poids d'acide sulfurique, dans une cornue à laquelle est adapté un matras constamment refroidi, donne un produit qui possède tous les caractères de l'acide acétique. Les liquides organiques qui contiennent de l'acide acétique, en offrent ordinairement l'odeur caractéristique, ou du moins saturés par la potasse, évaporés à siccité, ils laissent un résidu salin qui, traité par l'acide sulfurique, dégage cette odeur.

Dans les cas d'expertise légale, il faut ne pas perdre de vue : 1° Que le vinaigre sert dans l'art culinaire; 2o que la muqueuse stomacale, surtout dans certains états morbides, sécrète l'acide acétique; 5o que cet acide se forme par l'altération spontanée de matières organiques. Par conséquent, on ne doit se prononcer que lorsque la quantité obtenue est assez notable, et surtout, lorsque les résultats analytiques sont corroborés par les symptômes, par les altérations pathologiques.

Effets toxiques, altérations pathologiques. Les diverses formes d'acide acétique sont toxiques, mais à des degrés variables. Le vinaigre radical et de Mollerat concentrés, qui irritent, rubéfient et vésiquent assez promptement la peau, sont doués d'une très-grande activité. Le vinaigre ordinaire est de beaucoup moins actif. Un gentleman en prit par mégarde 250 gramm., pendant le repas, sans être incommodé; ce qui dépend probablement de l'état de plénitude des organes gastriques. Pris à dose élevée, mais non toxique, ou à doses trop fréquemment répétées, le vinaigre produit des désordres graves des organes

ques,

digestifs, l'amaigrissement, et même la mort. Ces accidents s'observent surtout chez les jeunes filles chlorotiques, qu'un goût dépravé porte à boire du vinaigre, ou chez les personnes qui en prennent pour perdre de leur embonpoint. Les coliles douleurs abdominales, sont quelquefois si violentes que les personnes se roulent à terre, demandent l'application d'un corps froid sur le ventre. Pelletan rapporte le cas d'un enfant, chez lequel l'abus du vinaigre a déterminé l'amincissement des tuniques de l'estomac, et Desault, celui d'une demoiselle qui réussit si bien à se faire maigrir, qu'elle devint phthisique. Il est à remarquer que, chez plusieurs personnes qui ont succombé dans la période des effets consécutifs de l'empoisonnement par les acides minéraux, on a rencontré des tubercules dans les poumons. MM. Mérat et Delens ont observé chez de jeunes personnes des irritations chroniques de l'estomac qui, dans quelques cas, ont été funestes. Quant aux altérations pathologiques, nous ne croyons mieux faire que de renvoyer à l'observation suivante, la seule qui soit à notre connaissance.

Traitement. Le même que pour les acides minéraux.

Une jeune fille de 19 ans, enceinte de 3 mois, abandonnée de son amant, prit, pour mettre fin à ses jours, de l'acide acétique concentré de Mollerat, dans une des rues de Gentilly, près Paris, le 7 mai 1851. A onze heures du soir, on l'entendit se plaindre; elle paraissait ivre, et partit cependant après avoir demandé son chemin. Le 8, à trois heures et demie du matin, elle fut trouvée couchée et souffrante contre le mur du marchand de vin du Petit-Gentilly; à 4 heures, on lui fit prendre du lait et du vin sucré chauds : elle eut de fortes convulsions, se plaignit de l'estomac; les accidents devinrent tellement graves qu'elle mourut peu de temps après.

Autopsie (MM. Merat et Lemis). Pourtour de la bouche et des ailes du nez couverts d'un liquide écumeux, en partie desséché, légèrement brunâtre, sans altération du tissu de la peau; un liquide semblable, du poids environ de 60 à 90 gram., à odeur alcoolique, s'écoule de la bouche. Mâchoires fortement rapprochées; dents blanches et non altérées. Muqueuse des joues et

du palais à l'état normal; celle de la langue, surtout vers le milieu de la face supérieure, est coriace, ratatinée, brunâtre; ses papilles sont très-apparentes. La muqueuse œsophasienne offre les mêmes lésions, mais à un degré plus marqué; elle est d'un brun noirâtre, non tapissée, pas plus que celles de la bouche, par de fausses membranes. Estomac distendu, saillant, de couleur violette, nuancé de plaques noires dans toute son étendue vers le pylore cette teinte est presque noire; les vaisseaux se dessinent sous formes d'arborescences d'une couleur plus intense; à l'intérieur il contient environ 250 à 350 gram. (8 à 10 onc.), d'un liquide brun-noirâtre, légèrement fétide, et faisant effervescence sur la dalle; ses parois sont tapissées par une matière brune extrêmement adhérente, semblable à de la suie, dont la couche est d'autant plus épaisse qu'on approche du pylore. La membrane muqueuse, nettoyée avec une éponge humide, offre, au grand cul-de-sac, des bandes de couleur noirâtre, larges de 27 millim. ou 1 pouce, formant des saillies de 14 millim. ou 112 pouce au moins, alternant avec d'autres, de même largeur dans l'état sain. Ce désordre augmentait en se rapprochant du pylore, près duquel on remarquait trois ou quatre indurations ovoïdes, de 9 millim, ou 115 de pouce de diamètre. La coloration noire était généralement répandue sur la surface de la membrane muqueuse et dans les parties indurées, ainsi que dans les deux autres tuniques de l'estomac, en sorte qu'on les eût dit gangrenées. Tous les vaisseaux étaient fortement injectés et remplis de sang coagulé, ainsi que les indurations ovoïdes; ce n'était autre chose que des ecchymoses, puisque les trois membranes avaient conservé leur texture et n'étaient point ramollies. Mais, au premier aspect, ces lésions offraient la plus grande analogie avec celles que produit l'acide sulfurique (Ann. d'hyg. et de Med., lég. tome IV).

Réflexion. Cette observation qui nous éclaire fort peu sur la symptomatologie de l'empoisonnement par l'acide acétique, n raison du peu de détails qui ont été donnés, démontre que les altérations pathologiques offrent la plus grande analogie avec celles que produit l'acide sulfurique. MM. Barruel et Orfila,

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