Images de page
PDF
ePub

tion de l'arsenic, contenaient des traces de ce poison. La quantité était plus forte les jours suivants; mais jamais elle n'a dépassé le maximum de 2 milligrammes. Quelques jours après que les matières fécales n'en donnaient plus, on en trouvait encore dans les urines, et ce liquide n'a cessé d'être arsenical que le trente-cinquième jour. On a sacrifié l'animal le trente-huitième. D'après M. Meurer de Dresde, l'arsenic absorbé se trouverait encore dans les matières fécales des chevaux, lorsqu'il n'en existerait plus dans les urines. L'élimination de ce poison par les urines paraît varier selon l'espèce animale. En général, l'urine des chiens n'en donne plus le douzième ou quinzième jour de l'intoxication. D'après M. Chatain, la promptitude de l'élimination serait en raison inverse de la faculté de résister au poison; il admet que l'homme qui résisterait à une certaine dose d'arsenic, l'éliminerait dans un temps qui ne pourrait excéder douze à quinze jours. Ces données, qui peuvent être exactes quand elles s'appliquent à une quantité donnée d'acide arsénieux absorbé, doivent varier, dans un cas d'intoxication, selon la dose, la forme du poison, la surface sur laquelle il est appliqué, et bien d'autres circonstances. D'après ce chimiste, l'arsenic est aussi éliminé par la peau, par le tube intestinal; ses eftets vénéneux, chez les animaux pris dans les mêmes conditions d'âge, sont en raison composée de la perfection du système respiratoire et cérébro-spinal; son absorption a lieu par le système veineux et non par les lymphatiques et les vaisseaux lactés, car il a retiré l'arsenic du sang et non du chyle du canal thorachique.

La chair des animaux empoisonnés par l'arsenic estelle toxique pour d'autres animaux? Après combien de temps peut-on manger la chair des animaux soumis à un traitement arsenical? Quelques auteurs anciens ont rapporté que la chair des volailles, tuées par l'arsenic, était toxique pour les chats, les chiens. Dans quelques cas de médecine légale, les sangsues appliquées à des personnes qu'on supposait intoxiquées ont succombé immédiatement. Les intestins des

volailles qui avaient péri pour avoir mangé des graines céréales arsenicales ont été funestes pour les chiens, les chats, ont occasionné des accidents très-graves. Ces derniers faits, comme on le conçoit, sont de peu de valeur, car, c'est comme si ces animaux eussent été empoisonnés directement par l'arsenic. MM. Flandin et Danger ont étudié cette question sous le point de vue toxicologique et d'hygiène publique. 1° Un jeune chien fut pris de diarrhée pour avoir été nourri exclusivement avec la chair de deux moutons qui avaient succombé le cinquième jour de l'empoisonnement arsenical. 2o Un autre chien, auquel on donna le foie, la rate, les poumons, les membranes de l'estomac préalablement lavées, fut plus malade encore; il eut des vomissements après le premier repas, refusa le second jour de prendre ces aliments, bien qu'il en acceptât d'autres. Pour l'y contraindre, on le tint à un jeûne prolongé; il finit par manger les viscères des trois moutons qui avaient servi à leurs expériences; il n'en mourut pas, mais il maigrit et dépérit sensiblement. Ils trouvèrent, à plusieurs reprises, de l'arsenic dans les urines, et surtout dans les selles, même pendant les six jours qui suivirent la cessation de ce régime. 3° Six personnes ont mangé de la chair, spécialement destinée à la boucherie, du mouton qui n'avait point succombé et avait été sacrifié ie trente-huitième jour, elles n'ont point été incommodées. Deux autres personnes en ont fait leur nourriture habituelle pendant deux jours et n'ont ressenti aucun accident. De ces faits, il résulterait: 1° que la viande des animaux qui sont encore sous l'influence d'une préparation arsenicale, pourrait occasionner des accidents graves, si du moins elle n'était pas mortelle; 2o qu'elle ne devrait être mise en circulation que lorsque les urines ne donneraient plus, depuis quelques jours, de l'arsenic à l'appareil de Marsh. Ces règles hygiéniques doivent être observées, avec d'autant plus de rigueur, que la santé du mouton qui avait pris 16 grammes d'acide arsénieux, n'a paru nullement altéré pendant toute la durée de l'expérience. Les expériences de MM. Flandin et Danger tendent à démontrer

[ocr errors]

que les plantes rendues arsenicales par absorption sont toxiques pour les animaux.

M. Gianelli, médecin italien, s'est aussi occupé de cette question, mais plutôt sous le point de vue toxicologique. Il résulterait de ses expériences: 1° que les oiseaux (moineaux, geai, chouette, poussins) seraient intoxiqués par les poumons, les urines et surtout par le sang des chiens, des lapins, des chevaux empoisonnés par l'acide arsénieux solide ou liquide, et ne le seraient point au contraire par le sang, les poumons, les urines de ces mêmes animaux à l'état normal ou tués par d'autres poisons, le sublimé, l'émétique, les acétates de cuivre, de plomb, les sels d'or, d'argent, de bismuth, de zinc, l'opium, les strychnées, l'acide hydrocyanique. Ces expériences ont été comparatives et faites avec le sang tiré de la veine pendant la vie, après la mort, et même après dix jours d'inhumation. Le cerveau, la moelle de ces animaux ne sont point toxiques. M. Gianelli conclut de ces faits, que l'on peut, en faisant avaler à des moineaux le sang d'une personne qu'on supposerait être empoisonnée par l'acide arsénieux, acquérir presque la certitude de l'empoisonnement, avant de recourir aux réactifs chimiques, réactifs qu'il considère cependant et avec raison, comme le seul moyen de mettre l'existence.de l'empoisonnement hors de doute. Ces conclusions sont assez sages, mais malheureusement plusieurs des oiseaux auxquels il a donné du sang intoxiqué, n'ont point succombé, et on conçoit qu'en pareil cas, on pourrait ne pas croire à l'empoisonnement, si l'on s'en rapportait à ces expériences seules, et négliger les recherches chimiques. M. Orfila, qui a répété ces expériences, a obtenu à peu près les mêmes résultats. Il a observé en outre que le sang des chiens tués par la noix vomique et quelquefois même le sang normal était toxique pour les oiseaux, ce qui, par conséquent, donnerait encore moins de valeur toxicologique aux expériences de Gianelli, dont il n'approuve pas l'application. Un fait qui mérite de fixer l'attention des toxicologistes, c'est que les mouches qui se déposent sur des cadavres, sur des matières organiques arsenicaux périssent presque

immédiatement (Blanchet, Blank, etc.). Tout récemment, aux assises des Bouches-du-Rhône, les experts ayant à constater un empoisonnement par le laudanum et les résultats étant négatifs, soupçonnèrent un empoisonnement arsenical, par cela seul que les mouches qui se déposaient sur les matières suspectes ne tardaient pas à périr. Ces soupçons furent confirmés par l'analyse (voyez les rapports). Ce fait toxicologique est d'autant plus important, que ces insectes ne sont pas intoxiqués par les matières en putréfaction; mais pour qu'il fût appliqué comme indice d'un empoisonnement arsenical (car il faut toujours en venir à l'analyse ), il faudrait que la chair des animaux ou de l'homme, les matières suspectes enfin, renfermant d'autres poisons, ne fussent point toxiques pour les mouches, ce qui n'est pas, du moins pour plusieurs poisons. Ce caractère n'en serait pas moins un indice général d'empoisonnement.

Traitement de l'empoisonnement arsenical.

Soustraire les organes à l'influence du poison, le neutraliser par un contre-poison, en combattre les effets, telles sont les indications à remplir. Quoique nous ayons assez insisté sur les deux premières données dans l'empoisonnement en général, nous croyons utile d'y revenir en peu de mots, en raison de l'importance du poison.

Lorsque l'acide arsénieux a été appliqué sur la peau, sur une plaie, sur une muqueuse externe, il faut lotionner ces parties avec des liquides mucilagineux ou huileux, et, si c'est sous forme de pâte, enlever autant que possible celle-ci; pratiquer des injections de même nature s'il a été déposé sur la muqueuse rectale ou vaginale; calmer ensuite l'inflammation par des bains locaux, des fomentations émollientes. Si la position de la partie le permettait, il conviendrait peut-être d'y appliquer des ventouses, de la scarifier même, d'établir une ligature du côté du cœur, afin d'empêcher l'absorption du poison qui a déjà pénétré dans l'interstice des tissus.

Dans l'empoisonnement par ingestion, si les vomissements ont lieu, il faut les seconder en administrant par verres assez

rapprochés des boissons mucilagineuses, albumineuses, gélatineuses ou lactées, seules, ou mieux encore associées à des huiles fixes, qui ont l'avantage de ne pas dissoudre le poison, d'en provoquer plus promptement l'expulsion par les vomissements, par les selles. S'il n'y avait pas de vomissements, il faudrait les provoquer, soit en déprimant la base de la langue, en titillant la luette avec la barbe d'une plume huilée, en même temps qu'on donnerait des boissons tièdes, soit enfin par 10 à 15 centigrammes d'émétique, 50 à 80 centigrammes de sulfate de zinc, dissous dans trois ou quatre verres d'eau. On a trop exagéré l'action irritante des vomitifs dans l'empoisonnement arsenical, car, à cette dose, ils n'agissent pas comme tels. En serait-il même ainsi, cet inconvénient serait beaucoup moins grave que le séjour prolongé du poison dans le tube intestinal. Si l'arsenic avait déjà franchi le pylore, si surtout, il y avait constipation, les purgatifs huileux, laxatifs ou cathartiques, sous forme de lavements, seraient indiqués, et même il n'y aurait pas d'inconvénient à les administrer par la bouche, si l'irritation gastro-intestinale n'était pas trop intense. La médication purgative, dont abusent en quelque sorte les médecins anglais, est peut-être un peu trop négligée par les médecins français. On débarrasse non-seulement ainsi le tube intestinal de l'arsenic ingéré, mais encore on ouvre une nouvelle voie d'élimination à celui qui est absorbé. D'ailleurs, la sécrétion muqueuse étant augmentée, l'absorption doit y être moindre. Lorsqu'il y a diarrhée, on peut se contenter de lavements émollients.

L'usage de la sonde ne nous paraît pas devoir être d'une grande utilité; car il serait difficile d'expulser ainsi l'acide arsénieux solide. Il est donc préférable de provoquer le vomissement.

Contre-poisons. Il faut, pendant qu'on provoque l'expulsion du poison par les vomissements, se procurer le contrepoison, et l'administrer immédiatement. Mais d'abord existet-il des contre-poisons de l'arsenic? Je crois que, dans l'acception rigoureuse du mot, on peut répondre négative

« PrécédentContinuer »