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curiels dans les matières organiques. Nous approuvons le conseil de M. Nicole, et rien ne s'oppose à ce qu'on essaie sur une petite partie de matière suspecte. La lame de cuivre proposée par Reinch et déjà employée bien avant lui, à la manière de M. Nicole, peut remplacer la pile de Smithson.

Enfin, M. Luneau, propose la carbonisation par l'acide sulfurique des matières suspectes dans des vaisseaux fermés; mais, comme ce procédé, adopté par M. Orfila, s'applique surtout au sublimé absorbé, nous le décrirons ci-après.

SUBLIMÉ CORROSIF ABSORBÉ. L'absorption des mercuriaux a été admise de tous temps, mais elle n'avait point encore été prouvée chimiquement, ou plutôt, les résultats des expériences sur les animaux, des observations chez l'homme étaient trèscontradictoires. Voici les trois ordres de faits sur lesquels on s'appuyait 1° la présence de globules mercuriels dans les organes, les liquides; 2. le blanchiment des pièces d'or, de cuivre par les liquides, les tissus; 5o l'analyse chimique. Les faits du premier ordre sont très nombreux: Fallope, Brassavole, Fernel, etc., ont trouvé du mercure en globules dans les ventricules du cerveau; Marchand, dans le cerveau; Rhodius, dans les capsules synoviales; Moulin, dans les plèvres; Vieussens, dans les humeurs de l'œil; Mead, dans le tissu cellulaire du périnée; Brachmann, au-devant du sternum; Fallope, dans une phlyctène, au-devant du tibia; Jourdan, dans le sédiment des urines; Dumeril, dans les diverses parties du corps. Enfin, on a trouvé aussi ce métal infiltré dans les os du crâne, du bassin, du tibia, etc. Les faits du second ordre sont moins nombreux et plus contestés. D'après Walter Pope, une personne qui ne travaillait plus depuis six mois aux mines de mercure, blanchissait encore une pièce de cuivre en la frottant avec les doigts. Dumeril a observé aussi le blanchiment des bagues, des bijoux en or, chez les personnes soumises à un traitement mercuricl. Ce fait cependant n'a pas été vérifié chez les filles publiques à l'hôpital des vénériens. Une pièce d'or, placée dans la bouche d'une personne affectée de salivation mercurielle, serait blanchie d'a

près Fallope. M. Devergie a laissé dans la bouche d'une femme qui avait une salivation abondante, une pièce de 20 francs en or, depuis 7 heures du matin jusqu'à 7 heures du soir, en a déposé une autre dans la salive, et ces deux pièces n'ont pas changé de couleur. D'après Colson, le sang des personnes traitées par l'onguent mercuriel, par le sublimé, blanchirait les plateaux, les lames en cuivre. M. Devergie, qui a répété ces expériences, a obtenu des résultats négatifs. Mêmes contradictions quant aux analyses chimiques. Zeller, Buchner, Schubart disent avoir retiré du mercure de la salive, du sang, de la bile, des urines des animaux empoisonnés par le sublimé; tandis que Bergmann, Klaproth, Meisner, Schweigger, etc., ont obtenu des résultats contraires. Cantu a retiré de 60 livres d'urine des syphilitiques plus de 20 grains de mercure. M. Orfila, par le même procédé, est arrivé à des résultats différents. Le professeur Piket, Schubart ont obtenu du mercure, par la distillation, le premier, du cerveau d'un malade soumis pendant longtemps à l'usage du sublimé, et le second, du sang d'un cheval frictionné pendant 29 jours avec l'onguent mercuriel. Christison, par son procédé, n'a pu retirer du mercure du sang, des organes d'un lapin intoxiqué par le sublimé. M. Devergie a analysé aussi, sans plus de succès, par le procédé du chlore, le sang, la salive et 10 litres d'urines des personnes soumises à l'usage des pilules mercurielles ou du sublimé. M. Peligot n'a pu déceler non plus le mercure dans le lait d'une ânesse à laquelle il donnait de ce poison.

Tel était l'état de la question, lorsque M. Orfila s'est livré à quelques expériences pour la résoudre. Il a empoisonné des chiens avec 2, 4, 8 gram. de sublimé dissous, a lié l'œsophage et la verge, les a tués 2 heures après, et a retiré du mercure du foie, par le procédé du chlore et de l'eau régale, et surtout, par le procédé de carbonisation par l'acide sulfurique. Mêmes résultats avec un chien auquel il a donné 5 centigr. de sublimé et qu'il a tué 30 heures après. Les résultats ont été douteux ou négatifs en opérant sur 230 gram. de sang tiré de la veine, 20 minutes, 2 heures après l'intoxication. L'urine a

donné aussi, par le procédé du chlore, un bon nombre de globulés mercuriels caractéristiques. Il a aussi obtenu, ainsi que M. Audouard de Béziers, du mercure des urines des personnes qui étaient traitées par le sublimé. Enfin M. Kramer a retiré du mercure du sang des animaux auxquels il faisait prendre du sulfure de mercure, préparation insoluble; ce qui tendrait à faire croire que tous les mercuriaux sont absorbés, soit directement, soit après avoir été transformés en sublimé, comme le pense M. Mialhe. Pour décéler le sublimé absorbé, M. Orfila a adopté le procédé suivant..

Procédé de carbonisation par l'àcide sulfurique. M. Orfila le considère comme plus délicat que son procédé par le chlore et l'eau régale (page 525), que ceux de M. Devergie et Lassaigne, et l'applique à toutes les matières solides (aliments, tube intestinal, foie, rate, etc.). Quant aux matières des vomissements, au tube intestinal, il propose de les faire bouillir dans l'eau, de filtrer, et, après avoir acidulé les liqueurs, de les essayer par les lamelles de cuivre, comme nous l'avons indiqué page 519, et, quel que soit le résultat, d'évaporer les liqueurs jusqu'à siccité, de carboniser le résidu, de même que les matières solides, comme il suit.

Manuel opératoire. Dans une cornue de verre bitubulée et bouchée à l'émeri, à laquelle est adapté un ballon, qui communique, à l'aide d'un tube recourbé, avec une éprouvette à moitié remplie d'eau distillée, introduisez, coupée par petits morceaux, la matière suspecte (aliments, tube intestinal, foie, rate, etc.); ajoutez peu à peu 176me de son poids d'acide sulfurique concentré et pur; chauffez graduellement et avec soin, afin d'éviter les projections, le passage du mélange dans le récipient. La matière se liquefie d'abord, brunit, se boursoufle, se réduit en un charbon qui reste dans la cornue, en vapeurs plus ou moins épaisses qui se condensent dans le ballon et en partie dans l'éprouvette. Ces deux récipients doivent être constamment entourés d'eau froide. Lorsqu'il ne se dégage plus de vapeurs, démontez l'appareil, et soumettez le résidu charbonneux, les liquides des récipients aux analyses suivantes.

a. Résidu charbonneux. Divisez-le dans la cornue même avec une baguette de verre; faites-le bouillir avec s. q. d'eau régale pour le mouiller complétement, jusqu'à ce que la majeure partie de celle-ci soit évaporée et que le charbon reste à peine humide; traitez celui-ci par l'eau à chaud; filtrez, et, dans une petite partie de liqueur, qui, en général, est incolore ou jaunâtre, immergez plusieurs lamelles de cuivre décapé. Celles-ci se couvrent bientôt d'une couche grise ou blanchâtre. Alors on les sort, on les laisse quelques minutes dans une solution d'ammoniaque faible pour dissoudre l'oxyde ou le sousoxychlorure de cuivre qui auraient pu se former, et, après les avoir lavées et desséchées, on en sépare le mercure par sublimation dans un tube effilé. L'autre portion de liqueur est mêlée et agitée pendant quelques minutes avec 114 ou parties égales d'éther; celui-ci, après reposition, decanté, comme nous l'avons indiqué page 520, évaporé, laisse, pour résidu, du su

blimé facile à caractériser.

Liquides des récipients. Ils contiennent ordinairement une quantité plus considérable de sublimé que le charbon, de l'acide sulfureux, des produits empyreumatiques, etc. Après les avoir réunis, portez-les à l'ébullition pendant quinze ou vingt minutes avec de l'eau régale; laissez refroidir; faites passer, pendant une heure environ, un courant de chlore gazeux; filtrez pour séparer quelques flocons graisseux et albumineux; évaporez au bain-marie. Si la quantité de sublimé est un peu notable, il se forme, vers la fin, une pellicule à la surface des liqueurs, et alors, en laissant refroidir lentement le vase, ce sel se dépose en cristaux. Si la quantité de sublimé est faible, évaporez jusqu'à presque-siccité, pour chasser l'excès d'acide. Lorsque le dépôt sera refroidi, délayez-le dans un peu d'eau, et, sur un tiers de produit, agissez par les lamelles de cuivre, et sur les deux autres tiers, par l'éther.

Quant aux urines, M. Orfila fait passer à travers un courant de chlore gazeux, préalablement lavé; laisse réagir pen dant vingt-quatre heures; filtre; évapore au bain-marie jusqu'à presque-siccité; délaie le résidu dans de l'eau légèrement aci

dulée par de l'acide chlorhydrique, et traite le soluté par les lamelles de cuivre. Si l'urine a déposé, comme le dépôt contient un composé mercuriel insoluble, chauffez-le avec de l'eau régale, et ensuite agissez par le chlore et les lanelles de cuivre. M. Orfila pense qu'on pourrait décéler le mercure dans le lait, la salive des individus soumis à un traitement mercuriel Audouard l'a en effet retiré de la salive.

Nous avons expérimenté le procédé de carbonisation par l'acide sulfurique. Il nous a paru bon, très-délicat et d'exécution assez facile. En multipliant moins les opérations, on obtient des résultats aussi certains, si ce n'est plus. Ainsi, si on chauffe le charbon avec un peu d'eau régale, d'abord jusqu'à siccité, puis au rouge-brun, le bichlorure de mercure se sublime complétement en partie dans le récipient, en partie dans le col de la cornue; mais en portant de l'eau en ébullition dans celleci, la totalité de sublimé est entraînée dans le récipient par la les raisons que nous avons vapeur d'eau. Il est mieux aussi, par données, page 526, de traiter seulement par le chlore le liquide des récipients réunis, au lieu d'employer préalablement l'eau régale. Il serait même convenable de réunir à ces liquides l'eau des lavages du charbon. Nous ne voyons pas l'utilité de l'éther, car il ne démontre pas que c'est du sublimé, puisqu'on s'est déjà servi de chlore ou d'eau régale. A quoi bon multiplier les réactions, surtout lorsqu'on agit sur des quantités minimes de poison.

Effets toxiques du bi-chlorure de mercure.

Le sublimé est un des poisons minéraux des plus actifs et le plus souvent mortel. Ses vapeurs sont promptement funestes. Respirées par petites quantités, elles produisent de la toux, de la sécheresse, des picotements, de la constriction au pharynx et au larynx, de la dyspnée, l'œdème de la glotte, la suffocation, la salivation, et autres accidents mercuriels. Ce poison est absorbé par la peau non dénudée. Le docteur Guerhard a observé le ptyalisme après trois bains de sublimé. M. Jules Cloquet a éprouvé des accidents très-graves tels que, douleurs épigastriques,

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