Images de page
PDF
ePub

des vomissements énormes et un ténesme continuel (Portal). Cependant, la terminaison est rarement aussi prompte et aussi funeste. Quelquefois les malades se rétablissent promptement, après avoir éprouvé des accidents qu'on pourrait confondre avec ceux d'une indigestion. Le plus souvent, ce n'est qu'après cinq, huit, quinze jours, un mois et plus que le rétablissement est complet, et après une grande sévérité dans l'alimentation." Les malades, après la cessation, la diminution des symptômes alarmants, conservent encore une grande irritabilité du tube intestinal, une grande faiblesse, des coliques, diarrhéiques avec ténesme, etc. Enfin, plus rarement encore, survient la période des effets consécutifs, et alors le patient, outre son état d'émaciation, offre les symptômes d'une affection chronique du tube intestinal ou de tout autre organe, tels que, epigastralgie, vomissements habituels (Observ. IV); toux opiniâtre, faiblesse, tremblements, paralysies. Cependant, il est peu d'observations où il soit question des effets consécutifs.

EMPOISONNEMENT LENT. Nous manquons encore de faits" bien précis à cet égard; mais, comme les pilules de Gerbier, à dose médicamenteuse longtemps continuée, ont produit des accidents très-graves, et surtout un état scorbutique avec grand affaissement, hémorragies des muqueuses, etc.; qu'ensuite, l'usage du pain cuivreux détermine un état de dépérissement, effets qui cessent par la suppression de cette alimentation, nous sommes porté à conclure que les préparations cuivreuses, comme les autres poisons minéraux, peuvent donner lieu à ce genre d'intoxication.

Altérations pathologiques. Les auteurs ont porté la même négligence à bien préciser les lésions, surtout aux diverses périodes de l'intoxication, que dans la plupart des autres empois sonnements. Tous s'accordent à dire que les cuivreux laissent des traces d'inflammation, des taches ecchymosiques noirâtres dans les diverses parties du tube intestinal et surtout dans l'estomac, les petits intestins, le rectum, et, plus rarement des épaississements, des ulcérations et même des perforations. M. Andral, chez la personne qui s'était empoisonnée avec

50 gram. (1 once), du sulfate de cuivre, et qui a succombé environ 12 heures après, a trouvé dans toute son étendue l'œsophage de couleur bleue, résistant au lavage, et sa muqueuse, ainsi que celle du tube intestinal, d'un bout à l'autre, d'un rouge foncé. Dans le cas de Laporte, déja cité, l'estomac offrait une ecchymose générale. Sur les deux hommes de Portal, le tube intestinal était distendu par une grande quantité de gaz, rouge en divers endroits, surtout dans les intestins grêles; le pylore et le duodenum étaient gangrenés, le rectum percé en divers points, le pharynx et l'esophage dans l'état naturel, les poumons gorgés de sang. Chez un enfant qui a succombé après avoir avalé une dissolution de vert de-gris, Portal a trou vé l'estomac enflammé et très-épais dans sa substance, surtout vers le pylore, dont le contour était si gonflé, que l'orifice en éta t oblitéré; les intestins grêles étaient enflammés dans toute leur étendue, gangrénés en divers endroits, même percés, et, une partie de la liqueur verdâtre du tube intestinal épanchée dans le péritoine; le gros intestin étant distendu outre mesure en quelque endroit, très-rétréci en d'autres, le rectum ulcéré dans toute sa surface interne et percé en plusieurs points. Portal n'a pas trouvé, chez cet enfant, les vaisseaux sanguins érodés, comme on le pensait avant lui, non plus que sur les chiens empoisonnés par le verdet. Chez un ecclésiastique, le même auteur a trouvé tout le canal alimentaire excorié et le rectum percé en plusieurs endroits. Dans l'Observ. Ille la muqueuse du pharynx, des petits intestins, de l'estomac était enflammée çà-et-là et même gangrenée près du pylore et du cardia, le sang du cœur et des gros vaisseaux, noir, fluide, épais. Sur une chèvre (Observ. V), la muqueuse de l'intestin grêle était enflammée, la séreuse injectée, le mésentère, l'épiploon, les glandes mésentériques gorgés de sang. Dans les diverses expériences sur les chiens on a aussi noté l'inflammation muqueuse gastro-intestinale, et, quelquefois celle de la séreuse, des taches ecchymosiques noiràtres, même lorsque les sels de cuivre étaient appliqués à l'extérieur, rarement des ulcérations, et enfin, d'après Drouart, l'extravasation d'un liquide san

guin noirâtre dans le tube intestinal. Les auteurs ont noté l'engorgement du système sanguin et des poumons, mais ils sont fort peu explicites sur l'état du sang, s'il est liquide out coagulé. M. Orfila, a observé, sur deux chiens, des taches rouges à la partie interne du cœur. Nous manquons de faits précis, quant aux altérations des autres organes. Il est bon de noter aussi la coloration verdàtre des tissus atteints par la préparation cuivreuse, celles des matières renfermées dans le tube intestinal, la présence du poison en nature dans cet organe, quoique ces caractères ne soient pas constants..

TRAITEMENT. Il faut se conformer aux principes généraux que nous avons donnés dans l'empoisonnement par les poisons minéraux, arséniaux, mercuriels, etc. Dans la plupart des cas, on s'est contenté des boissons, des lavements émollients, et laxatifs, la casse, la manne, les huileux pour seconder l'expulsion du poison par les vomissements on par les selles. Dans quelques-uns on a administré les opiacés, les anti-spasmodiques, pour calmer et combattre les coliques, les symptômes nerveux. Plus rarement encore, on a eu recours aux sangsues, aux saignées. Une diététique sévère est nécessaire pour le complet rétablissement.

Contre-poison. S'il fallait se diriger d'après les réactions chimiques on ne manquerait pas de contre-poison. Navier a proposé les sulfures alcalins, de potasse, de chaux, de fer. Drouart les a expérimentés sans succès sur les chiens. Mais on ne peut rien conclure de ces essais, car il les a donnés à dose toxique. Dans une série d'expériences, il a donné le précipité obtenu par la réaction des sels de cuivre et de ce contrepoison, et les chiens ont été intoxiqués; ce qui indiquerait que le sulfure de cuivre est toxique, mais il serait nécessaire de répéter ces expériences. Les alcalis minéraux, leurs carbonates, ne peuvent servir de contre-poisons, puisque les oxydes, les carbonates de cuivre sont toxiques. Nous en dirons autant' des décoctés des substances astringentes (noix de Galles, quinquina, etc.), vantés par Chantourelle. Le sucre a eté pre conisé par Marcelin Duval, d'après des faits recueillis chez

l'homme et des expériences sur les animaux. M. Lartigue (Observ. VIII) en est aussi partisan. Le docteur Postel, guidé par les idées de Vogel, de M. Girardin, de Rouen, que le sucre décompose soit à froid, soit à chaud, les sels de cuivre et en précipite le cuivre à l'état de métal ou d'oxyde, dit avoir essayé ce contre-poison avec quelque succès sur les chiens. M. Orfila n'a point été aussi heureux et n'a pas en outre constaté la transformation des deuto-sels de cuivre en protoxy de dans l'estomac des chiens. Il résulte pour nous de la lecture attentive des faits que le sucre, la cassonade, donnés à l'état sec ou sous forme liquide, ont paru calmer les effets locaux, retarder l'intoxication. Quoique l'albumine, considérée par M. Orfila comme le contre-poison des préparations cuivreuses, forme avec elles un composé insoluble, nous ferons les mêmes réflexions que pour le sublimé corrosif (page 546). Il en est de même pour le charbon conseillé par Bertrand. Le cyanure jaune de potassium et de fer a été essayé aussi sans succès par M. Orfila.

Le seul contre-poison, selon nous, qui devrait inspirer quelque confiance, serait la limaille de fer bien décapée; le cuivre précipité de ses dissolutions, à l'état de métal, n'est point ainsi attaqué par les acides de l'estomac; MM. Edwards et Dumas ont arrêté les effets toxiques de 60 centigram. de verdet, sur un chien, en lui donnant de la limaille de fer, l'œsophage étant lié, l'animal a succombé le septième jour. Comme la limaille de fer est très pesante, ils conseillent, afin de faciliter la réaction chimique, de l'incorporer dans du miel, sous forme d'électuaire. Comme sous cette forme elle n'est pas facile à administrer, on pourrait la suspendre dans un décocté concentré de guimauve, de graine de lin, d'amidon, un soluté de gomme. Mais il est rare que le médecin ait ce contrepoison à sa disposition, du moins non oxydé. MM. Sandras et Bouchardat, dans le mème but, proposent la limaille de

zinc.

Questions médico-légales; erreurs à éviter dans les recherches du cuivre, cuivre normal.

Les homicides par les préparations cuivreuses sont assez rares, et ont lieu, le plus souvent, avec les acétates, le sulfate, le cuivre ou les sous oxydés, mis à macérer dans le vin ou tout autre véhicule. Au contraire, les empoisonnements par accident, surtout par les aliments, les boissons, les médica ments devenus accidentellement cuivreux, sont extrêmement fréquents et sont bien plus souvent le sujet d'une expertise légale. Dans le premier cas, c'est-à-dire dans les empoisonnements criminels, il importe d'éviter, autant que possible, les erreurs qui peuvent provenir soit des réactifs, soit des aliments préparés ou conservés dans des vases de cuivre. Comme aux faits pratiques nous indiquons la plupart des circonstances qui peuvent entraîner ces sortes d'erreurs, nous signalerons seulement les suivantes. 1o M. Dupaquier, de Lyon, s'est assuré que la potasse à l'alcool, donnée comme pure, que l'eau distillée, que les acides considérés aussi comme tels, renfermaient quelquefois du cuivre et du plomb. 2o Le papier à filtrer contient ordinairement de ces métaux, qui peuvent être entraînés ou dissous par la simple filtration des liqueurs acides. Ce fait, connu depuis longtemps, a été constaté tout récemment, même sur du papier dit de Berzelius, qui doit en être exempt. 5o Les aliments, les boissons, les eaux distillées, préparés ou conservés dans des vases en cuivre, les matières suspectes déposées dans ces vases, sur des tables peintes, enveloppées dans des papiers peints, dans des linges humides, qui ont reçu le contact des instruments, des pièces de monnaie en cuivre, etc., peuvent aussi s'imprégner de ce métal. En raison de l'usage fréquent des vases en cuivre, des préparations cnivreuses dans les arts, il. sera donc bien difficile, pour ne pas dire impossible, dans la majorité des cas, de se soustraire à ces causes d'erreurs.

Nous voudrions rapporter quelques cas d'empoisonnements criminels, ou du moins discuter les questions qu'ils auraient pu soulever; mais, malheureusement, les cas rapportés dans les

« PrécédentContinuer »