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tire du sang d'un animal durant les phases diverses d'un empoisonnement par l'arsenic, l'antimoine, le cuivre, etc., on ne trouve jamais des traces bien sensibles de poison dans ce liquide. On ne les y retrouve pas non plus après la mort. M. Orfila a cependant retiré de l'arsenic du sang d'une saignée. Ils expliquent cette anomalie, en admettant que le poison n'est porté que par intervalles par le sang dans les organes, et en si petite quantité qu'elle devient inappréciable. Ensuite, comme ils ont observé que lorsqu'un poison, un sel de cuivre, par exemple, déposé sous la peau, ne tarde pas à être rejeté en partie en même en totalité par les vomissements ou les selles, si la dose n'est pas mortelle, que, dans ce cas même, le sang ne donne pas de traces sensibles de cuivre, quelle que soit la période de l'intoxication, ils pensent que le poison arrive dans le tube intestinal par la circulation capillaire superficielle, par cet ordre de vaisseaux absorbants sons cutanés qui, de la peau, vont s'aboucher ou s'ouvrir à la surface de la muqueuse gastro-intestinale, laquelle, étant dépourvue d'épiderme, exhale, perspire le poison. C'est ainsi, d'après ces chimistes, que s'opéraient les empoisonnements miasmatiques, plombiques, cuivreux, etc. M. Roard, directeur de la fabrique de Cichy, leur a assuré que les ouvriers qui se brossaient, se lavaient exactement la peau et surtout les mains, ne contractaient pas l'affection saturnine comme ceux qui ne prenaient pas ces précautions. Nous laissons à MM. Flandin et Danger la responsabilité de leurs opinions sur le passage des poisons dans les organes internes sans l'intermédiaire du sang. Lorsque les poisons sont introduits dans le tube intestinal, c'est par le système de la veine porte surtout que se fait l'absorption et qu'ils sont portés dans le foie, où la plupart se rencontrent spécialement. Mais comment, se demandent ces chimistes, les uns sontils éliminés par les urines, les autres par la muqueuse intestinale? comment certains se rencontrent-ils dans les muscles, les poumons, tandis que d'autres ne s'y trouvent point? Ici commence le champ des hypothèses. Cependant ce fait empirique démontre que, dans les recherches toxicologiques, il n'est pas

indifférent d'agir sur tous les organes, sur tout le cadavre, mais bien plutôt sur les organes où le poisón se localise; d'abord sur le foie, le tube intestinal, puis sur la rate, le pancréas, les reins, les urines, les poumons. Le sang, le cœur, d'après MM. Flandin et Danger, ne contiennent jamais assez de poison pour être le sujet de recherches toxicologiques. Mêler les organes qui ne contiennent pas de poison avec ceux qui en contiennent, c'est entra vcr les opérations, en compromettre le résultat. Dans les cas ordinaires, 100 grain. ou la dixième partie du foie est un maximum suffisant pour déceler le poison en quantités bien appréciables; même dans quelques cas, il suffit d'agir sur 40 à 60 gram. Pour déceler le plomb absorbé, c'est encore par les procédés d'incinération simple de carbonisation par l'acide sulfurique, de carbonisation par l'acide azolique et le chlorate de potasse. MM. Flandin et Danger, par le second procédé, ont décelé 1/100,000 de plomb. M. Orfila, toujours dans le but de ne pas confondre le plomb d'absorption avec le plomb normal, propose de modifier le troisième procédé comme nous l'avons indiqué pour le cuivre (page 604), c'està-dire, de faire bouillir pendant 1 heure les organes coupés par morceaux dans de l'eau aiguisée de 1/50m d'acide acétique ou azotique, d'évaporer les liqueurs filtrées à siccité, de carboniser le résidu par l'acide azotique et le chlorate de potasse, d'épuiser le charbon par l'acide azotique étendu de son volume d'eau, de filtrer, d'évaporer à siccité, de dissoudre le résidu dans un peu d'eau, de précipiter la liqueur par l'acide sulfhydrique, de transformer le sulfure en nitrate par l'acide azotique étendu de son volume d'eau, et de constater ensuite les réactions plombiques.

Quant aux urines, M. Orfila les évapore à siccité, carbonise le résidu par l'acide azotique et le chlorate de potasse et ensuite procède comme il vient d'être dit. En agissant ainsi sur les urines d'une jeune fille qui s'était intoxiquée avec 30 ou 40 grains d'acétate plombique, il a constaté la présence de plomb vingt-cinq heures après l'intoxication. Ce chimiste fait remarquer, comme pour le cuivre, que les organes des personnes

non intoxiquées donnent du plomb par la carbonisation directe, et qu'il n'en est pas ainsi par la modification qu'il propose. Il ajoute qu'il ne faut pas non plus carboniser le charbon nitrique jusqu'au rouge, parce qu'encore on obtiendrait du plomb normal. Voyez aux préparations cuivreuses les réflexions que nous avons présentées à cet égard.

Effets toxiques des préparations plombiques.

Les préparations de plomb, comme les autres poisons minéraux, peuvent donner lieu à un empoisonnement aigu et lent; mais elles ont cela de particulier que le premier genre d'intoxication ne peut se produire que par la voie d'ingestion, et qu'ensuite il est bien moins connu dans son expression symptomatique que le second. Cette anomalie dépend de ce que l'usage du plomb étant fréquent dans les arts, et l'empoisonnement lent ayant lieu le plus ordinairement par les émanations plombiques, on a été plus à même de l'observer, tandis que l'empoisonnement aigu est très-rare, en raison de la saveur désagréable du poison, et peut-être aussi de son peu d'activité. Ne possédant que peu de faits chez l'homme sur ce dernier, nous serons obligé de mettre à contribution les expériences sur les animaux.

A. Empoisonnement aigu.

Le plomb pur, entier, en grains ou en limaille, n'est pas poison. Les observations chez l'homme et les expériences sur les animaux démontrent qu'il peut séjourner dans les tissus sans autres accidents que ceux qui résultent d'un corps étran ger. Par conséquent, ce métal, comme le cuivre, ne s'oxyde pas dans le tube intestinal, ne devient toxique qu'en passant à l'état d'oxyde ou de sel. C'est ainsi qu'on peut expliquer l'intoxication par les boissons, les aliments etc., préparés, conservés dans des vases en plomb, ou étamés avec un mauvais étamage (voyez encore page 623). Il est bon de faire remarquer que les accidents peuvent dépendre aussi du cuivre lorsqu'on se sert de vases mal étamés. Si la colique de plomb s'est développée chez un homme, six jours après l'in

gestion de 300 grammes (10 onces) de grenaille de plomb, probablement que ce métal était en partie oxydé. (Gazette médicale, 1837.)

Les oxydes, le carbonate, et en général les autres préparations plombiques insolubles seraient doués d'effets toxiques peu marqués, et même inertes d'après quelques auteurs. Le carbonate à la dose de 8 grammes (2 gros), le minium à celle de 16 grammes (1/2 once) n'occasionneraient d'autres accidents que quelques vomissements (Orfila). Cependant un chien auquel M. Canuet a administré 16 grammes (1/2 once) de litharge, a éprouvé, aussitôt après, des vomissements répé tés de matières jaunâtres, filantes, puis de l'abattement; le lendemain, refus d'aliments, inappétence et une soif ardente; le troisième jour, de la tristesse; le quatrième jour il était complétement rétabli. Les mêmes effets ont été observés par M. Orfila sur un chien auquel il avait donné 24 grammes (12 gros) de minium; seulement l'animal ne s'est rétabli que le sixième jour. M. Canuet administre au chien de son expérience précédente une dose double de litharge, en deux fois; à onze heures du matin, plusieurs vomissements avec violents efforts dans l'intervalle; abattement; respiration fréquente, stertoreuse; langue couverte d'un enduit jaunâtre, pendante hors de la bouche; salive abondante et visqueuse; mort à huit heures du soir, précédée de roideur tétanique des membres. Dans les deux intoxications, il ne s'est manifesté aucun mouvement convulsif.Autopsie. Le cerveau, la moelle épinière, n'offraient rien de particulier; la muqueuse gastrique et duodénale présentaient des taches rouges, de la largeur d'un pouce, dont l'une d'elles, près du pylore, était ponctuée de noir. La même quantité de litharge étant ingérée dans l'estomac d'un lapin (œsophage lié), a produit des efforts violents de vomissement, de l'abattement, des mouvements convulsifs avec tremblement de membres, et la mort en vingt-cinq minutes. La muqueuse gastro-duodenale, qui offrait les mêmes altérations que dans l'expérience précédente, était remplie de bile. La vessie renfermait de l'urine rouge; les poumons, le cœur droit

étaient gorgés de sang non congulé, de même que les méninges, le rachis et la moelle épinière.

D'après M. Dupaquier, de Lyon, les préparations plombiques insolubles, celles enfin qui par les acides de l'estomac, des aliments ne sont pas susceptibles de passer à l'état soluble, les phosphate, borate, oxalate, tartrate, tannate, sulfate et les sulfure naturel et artificiel seraient tout à fait inertes, n'auraient enfin pas plus d'effet que le sable, même à dose trèsélevée, 10 à 60 grammes; et les sels peu solubles, le chlorure par exemple, n'exerceraient qu'une action passagère, peu intense, détermineraient soit des vomissements, soit de la diarrhée, phénomènes qu'ils n'ont pas observés, à la suite de l'administration des sels de plomb tout à fait insolubles. Ces sels insolubles, le sulfure artificiel récemment préparé excepté, étant solubles, soit dans les acides de l'estomac (acétique, hydrochlorique), soit dans ces acides et le chlorure de sodium, d'après M. Orfila, probablement que s'ils ne peuvent produire l'empoisonnement aigu, pourraient donner lieu, par un usage un peu prolongé, à la colique saturnine. Comme venanta l'appui de cette assertion, nous rappellerons: 1o qu'un ouvrier broyeur, occupé seulement depuis deux jours dans l'atelier, a contracté cette affection, parce que ses camarades avaient saupoudré son pain avec de la céruse; 2o que M. Tanquerel des Planches a determiné la colique de plomb sur un chien, en introduisant trois fois par jour et pendant six jours, 60 centig. (12 grains) de minium dans la trachée-artère ; 3° qu'enfin Nicandre et autres auteurs grecs, latins et arabes parlent de l'intoxication chez l'homme par l'ingestion dans l'estomac du carbonate, des oxydes de plomb. Les symptômes qu'ils donnent sont à peu près ceux de la colique de plomb. Dioscoride cite comine symptôme se développant à la suite de l'ingestion de la cérɩ.se, du minium, de la litharge, du carbonate : Hoquet, toux, sécheresse de la langue, refroidissement des extrémités, hébétude, paralysie des membres, pesanteur épigastrique, coliques très-vives, déchirantes, suppression des urines (Tanquerel des Planches.) L'iodure de plomb est administré à un chat, à la dose de

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