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cité, aux strychnées, et seconder ces moyens par les purgatifs drastiques.

L'amaurose saturnine a été traitée avec succès par les vésicatoires appliqués à la nuque, derrière les oreilles, aux tempes, à la région sourcilière; par des frictions avec la pommade stibiée ou ammoniacale au sinciput; par les cautères, les moxas; enfin par la strychnine, appliquée par endermie sur ces parties et par l'électro-poncture, pratiquée à l'aide de deux aiguilles correspondant au nerf frontal et sous-orbitaire, à leur sortie des trous sourciliers et sous-orbitaires. On donne en même temps à l'intérieur les purgatifs drastiques.

C. Pour l'anthralgie saturnine la plupart des auteurs prescrivent le même traitement que pour la colique, mais M. Tanquerel considère les bains sulfureux comme plus efficaces; il les prescrit tous les jours et pendant sept à huit jours. Sur quatre-vingt-six cas, il cite quatre-vingts guérisons. Lorsqu'il y a en même temps colique, on les associe aux purgatifs.

D. Le traitement de l'encéphalopathie, d'après plusieurs essais faits par MM. Rayer, Tanquerel, serait celui de la méthode expectante, secondée par quelques purgatifs en lavement, par des vésicatoires volants aux membres inférieurs, pat des ventouses scarifiées à la base de la poitrine.

Telles sont les diverses méthodes de traitement préconisées dans l'empoisonnement saturnin. M. Legroux prescrit aussi de brosser la peau avec une brosse imprégnée d'eau acidulée par l'acide acétique, an de dissoudre les molécules plombiques adhérentes à cet organe. M. Gabrini, considérant l'affection saturnine comme de nature hyposthénique et identique, quel que soit son mode de manifestation, adopte un traitement stimulant, le vin, la cannelle, les bains sulfureux chauds, et surtout l'opium, à cause de son action dynamique fixe, lente et durable, et de son effet électif sur les centres nerveux cérébro-rachidiens, sur lesquels le plomb paraît porter son action (Thèse et Mém. (Annales de Therapeut. et de Toxicol.). Mais la meilleure méthode, ce serait d'employer les moyens prophylactiques propres à empêcher l'absorption des molécules plombiques, et si

ces moyens étaient insuffisants, de remplacer les composés plombiques par d'autres préparations moins nuisibles, par les préparations antimoniales, d'après M. Ruolz.

Questions médico-légales. Erreurs à éviter. Plomb
normal. Rapports.

Les accidents par les préparations plombiques sont bien moins fréquents qu'autrefois, et, de nos jours, le vin ainsi que les autres boissons sont rarement sophistiques avec la litharge. Ces accidents peuvent avoir lieu dans les mêmes circonstances que les empoisonnements par le cuivre, c'est-à-dire par erreur ou plutôt par les boissons, les aliments, les médicaments, etc. préparés ou conservés dans des vases en plomb ou mal étamés. Les empoisonnements criminels sont encore bien moins communs, peut-être à cause du peu d'activité, de la saveur désagréable des composés saturnins. Les erreurs à éviter dans les recherches toxicologiques relativement au papier à filtrer, à l'eau distillée, aux acides et autres réactifs, aux vases, etc., sont absolument de même nature que pour les préparations cuivreuses. Il en est de même quant à la question du cuivre normal, car encore à cet égard les toxicologistes sont divisés en deux camps. Ayant traité ces diverses questions en parlant du cuivre (page 617), nous y renverrons pour tout ce qui est relatif au plomb, les mêmes réflexions lui étant applicables, et nous nous occuperons seulement de deux empoisonnements criminels dont l'un a soulevé des discussions assez vives, des questions toxicologiques assez importantes.

AFFAIRE POUCHON (assises de la Haute-Loire). Fouchon, veuf et père de trois enfants, avait épousé en secondes noces Marie Camus; il était atteint depuis quatre ans d'une affection grave de l'estomac pour laquelle il avait passé environ un an, à deux reprises différentes, à l'hôpital du Puy, affection qui se manifestait par crises et consistait en douleurs vives d'estomac, vomissements, selles sanguinolentes; il se sentait soulagé toutes les fois qu'il sortait de l'hôpital, et retombait bientôt après. Depuis environ un mois il se trouvait bien, ne vomis

sant plus, lorsque le 13 juillet 1842, après avoir bu, au dire d'un témoin, une bouteille de vin trouble dont la saveur lui parut détestable, ou, au dire de sa femme, après avoir mangé une salade, il fut pris d'accidents graves jusqu'à sa mort, qui eut lieu vers la fin du troisième jour. Ces accidents, toujours d'après les dépositions de sa femme et des témoins, peuvent se résumer ainsi douleurs vives, brûlantes d'estomac; vomissements noirâtres, abondants et persistants; selles sanguinolentes; contorsions des membres avec contractions des mains et des doigts de manière à ne pouvoir saisir les objets; convulsions de la face avec distorsion de la bouche à droite. Le malade poussait des cris qui s'entendaient du voisinage, éprouvait un grand feu dans l'estomac qu'il ne pouvait apaiser par l'eau froide, le lait, boissons qui étaient immédiatement vomies. L'intelligence s'est conservée jusqu'à la fin. La promptitude de la mort éveilla des soupçons; sa femme et le sieur Rocher, teinturier, avec lequel elle vivait en concubinage, furent inculpés, et, parmi les divers objets saisis chez eux, se trouvaient les matières de vomissements; MM. les docteurs Porral et Barse procédèrent à l'exhumation huit jours après. Afin d'abréger nous noterons seulement les lésions suivantes comme le plus en rapport avec notre sujet : « L'estomac distendu et recouvert dans la moitié droite par le foie, qui y adhérait par une de ces parties, nous a paru altéré dans sa forme et dans l'épaisseur de ses parois ; il offrait, à sa partie droite et en haut, une large ouverture, suite d'une ulcération cicatrisée, conduisant dans une petite poche, formée, dans sa partie supérieure, par la portion du foie que nous avons dit lui adhérer, et par des feuillets séreux, recouverts d'une membrane muqueuse comme il en existe dans les kystes ou tumeurs enkystées de nouvelle formation; il renfermait peu de liquide. Dans cette poche on voyait une grande quantité de petits corps durs de for me et de consistance différentes, avec quelques noyaux de cerises tachés en noir. Aucune lésion récente n'existait dans l'estomac. L'œsophage était rouge à sa partie supérieure dans toute sa circonférence, mais cette rougeur ne nous a pas paru

de nature inflammatoire. La surface de ces deux organes, et surtout du dernier, était couverte de petits corps durs, cristallisés irrégulièrement, de forme et de couleur différentes, semblables à des grains de quartz, tachés de points noirs; quelques-uns plus petits, à bords plus arrondis, comme usés, très-durs, craquant sous la dent, sans saveur ni odeur, insolubles dans l'eau distillée et rayant le verre comme le ferait le diamant. A la lumière nous avons remarqué plusieurs petites paillettes de mica. Parmi ces corps, les plus volumineux pesaient 10 centigr. environ; les plus petits étaient presque imperceptibles; les uns sous formes de lames noiràtres, plus friables; d'autres d'un jaune d'ocre, se laissant réduire en poudre et dissoudre imparfaitement dans l'eau distillée. Traités à froid par l'eau additionnée d'un peu d'acide acétique pur, après quelques minutes de contact, la liqueur filtrée n'a pas été troublée par la noix de galle, l'acide sulfhydrique et sulfurique. >>

MM. les experts ont carbonisé le décocté du tiers de l'estomac, de l'œsophage, les liquides qu'ils renfermaient, avec une portion du foie, des intestins, des poumons, de la vessie, par l'acide sulfurique, dans une marmite en fonte. Le résidu, sou mis à l'appareil de Marsh, aux réactifs de sels de cuivre, a donné des caractères négatifs. Une autre portion du foie, de l'estomac, des intestins, a été soumise à l'ébullition dans de l'eau aiguisée d'acide acétique; le décocté évaporé a siccité et le résidu traité par l'acide azotique et un sesquisel de fer, n'a pas offert les réactions des alcalis végétaux. Les auteurs concluaient que le corps de Pouchon ne renfermait aucun poison appartenant au règne végétal, ni aucun composé arsenical, antimonial, cuivreux et ferrugineux, lorsque M. Barse, sur leur demande, leur fut adjoint.

Expertise du 5 août 1842. Les experts divisent leurs opérations en trois séries. 10 dans le but de reconnaître s'il existait un poison végétal, ils font bouillir dans de l'eau, fortement aiguisée d'acide acétique, une partie de l'œsophage, de l'estomac et du cœur, précipitent le décocté

d'abord par l'acétate de plomb, puis par l'acide sulfhydrique; évaporent jusqu'à siccité les liqueurs filtrées. Le résidu traité par l'acide azotique et le sesqui-chlorure de fer n'a pas donné les réactions des alcalis végétaux. 2o après avoir bien décapé une marmite en fonte par l'acide azotique et la potasse, et s'être assurés que l'eau des lavages ne donnait pas des taches à l'appareil de Marsh, n'offrait pas les réactions des sels de cuivre et de plomb, ils ont fait bouillir dans ce vase le foie, la rate, une partie des poumons, des intestins grêles et de la vessie avec de l'eau distillée et 20 gram. de potasse. Une portion du bouillon, saturée par l'acide azotique et additionnée d'azotate, a été soumise au procédé de l'incinération; l'autre portion a été carbonisée par l'acide azotique, et le charbon traité par l'acide chlorhydrique. Dans les deux cas, les deux produits n'ont pas donné les réactions de sel de cuivre, des taches antimoniales et arsenicales à l'appareil de Marsh, mais ont précipité par les acides sulfurique, sulfhydrique, etc., ce qui a fait soupçonner la présence du plomb. Pensant que ce métal, s'il existait en effet, se trouverait en plus grande quantité dans les organes déjà épuisés par l'eau, ils les ont carbonisés dans la marmite en foute. Le charbon a été calciné pendant une heure avec de la potasse dans un creuset de hesse; le produit, traité par l'eau distillée, a laissé déposer du charbon qui, examiné à la loupe, laissait apercevoir de petits globules métalliques à peine appréciables à la vue. Ce charbon, calciné de nouveau avec de la potasse pendant deux heures, a donné un culot renfermant une grande quantité de globules plombiques appréciables à la vue et offrant les caractères physiques et chimiques du plomb.

Comme, dans les analyses précédentes, les experts s'étaient servis d'acétate de plomb, et que, par un hasard malheureux, ce sel aurait pu se mêler aux matières suspectes, il ont soumis à une nouvelle série d'expériences les matières vierges: ainsi, dans la même marmite en fonte, décapée comme précédemment, ils ont carbonisé sans addition le gros intestin et une fraction de l'intestin grêle. Le charbon, calciné avec de

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