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d'isoler les poisons solubles et inégalement volatils; examinez séparément le produit distillé et les liquides de la cornue par les réactifs généraux des poisons inorganiques. Si les résultats sont nuls, consacrez une portion des matières solides et liquides à la recherche des alcalis végétaux (voyez t. II, p. 2). Enfin, le restant sera consacré à la recherche des poisons minéraux quiforment des composés insolubles avec les matières organiques (arsenic, antimoine, mercure, cuivre, plomb, et autres poisons de la 4 section), par l'un des procédés que nous avons décrits dans la toxicologie générale, et sur lesquels nous reviendrons, aux préparations arsénicales, cuivreuses, etc. Ils ont pour but, en général, de détruire la matière organique. Ce sont les procédés de Reinch, par le chlore, par l'eau-régale, par l'acide azotique ou chlorhydrique et le chlorate de potasse, la carbonisation par l'acide sulfurique ou azotique, l'incinération simple ou par l'azotate de polasse.

La carbonisation par l'acide sulfurique est le procédé le plus souvent employé dans les cas d'expertise; c'est le plus simple, il s'applique au plus grand nombre des cas. Les liquides sont évaporés en consistance sirupeuse, et, ainsi que les parties molles, introduits dans une cornue suivie d'un récipient entouré de linges froids, additionnés à froid de 1/3 environ d'acide sulfurique pur, chauffés ensuite jusqu'à carbonisation. Le charbon est broyé, humecté d'eau-régale, desséché et broyé de nouveau, puis mis à bouillir dans l'eau distillée. Les liqueurs filtrées et concentrées, sont examinées par les réactifs généraux, l'acide sulfhydrique, des fils de fer, de cuivre, et l'appareil de Marsh pour la recherche de l'arsenic, de l'antimoine. Le charbon sulfurique est ensuite incinéré, les cendres sont traitées par l'acide azotique, l'excès d'acide est évaporé, le résidu repris par l'eau, et la liqueur filtrée et concentrée, essayée par les fils de fer, de cuivre, le cyanoferrure de potassium, l'iodure, le chlorure, pour y déceler le cuivre, le plomb, le bismuth, l'argent, etc. Dans le produit distillé, on recherche les métaux volatils (arsenic, mercure).

IV.-Recherche des poisons absorbés. Dans le cours de ce traité, surtout aux préparations cyaniques, aux strychnées, aux animaux venimeux, nous rapportons des faits et expériences qui démontrent que les poisons sont absorbés par toutes les voies et transportés dans les organes par les veines. Quoique M. Homolle, après avoir pris un bain avec l'iodure de potassium, ou un décocté de 1 à 2 kilogr. de feuilles de belladone ou de digitale, n'ait pas trouvé d'iode dans les urines, n'ait éprouvé aucun effet narcotique, nous citons cependant des empoisonnements par la peau non dénudée avec l'opium, les solanées, etc. Le curare, les yenins, le sont par la muqueuse pulmonaire, le tissu cellulaire, non par les muqueuses gastrointestinale et externes. Orfila, qui pendant longtemps a nié l'absorption des acides, a constaté que les urines des chiens empoisonnés par les acides sulfurique, chlorhydrique, précipitaient plus abondamment par le nitrate de baryte, d'argent, que les urines normales. M. Devergie a trouvé l'acide tartrique dans le sang, le foie des chiens intoxiqués. Enfin, tous les poisons minéraux, la plupart des poisons organiques, l'acide cyanhydrique, plusieurs huiles essentielles, l'alcool, l'éther, le chloroforme, et parmi les alcaloïdes, la morphine, la nico tine, la conicine, ont été décélés dans le foie et autres organes, le sang, les urines et autres liquides. C'est dans le foie qu'ils se condensent spécialement; cependant la nicotine, la conicine, se trouvent en plus grande quantité dans les poumons (MM. Stas, Orfila), le chloroforme dans le cerveau, le sang (M. LudgerLallemand).

Les poisons envahissent les organes les plus vasculaires et. ensuite ceux qui le sont moins, le cerveau, la graisse, les os. Leur séjour y est d'autant plus long qu'ils sont donnés par doses fractionnées et plus longtemps prolongées, qu'ils forment des composés insolubles avec les produits immédiats. Dans les empoisonnements aigus, l'élimination peutêtre complète en cinq, quinze jours. M. Quevesne, après avoir pris 60 centig, d'iodure de potassium ou 4 gramme d'iodure de fer, constate l'iode

dans ses urines, 10, 45 minutes après, et n'en trouve plus le quatrième jour; il n'y a presque pas trouvé de fer. Chez les personnes auxquelles Kramer administrait l'iodure de potassium pendant 50 jours, l'iode ne se trouvait plus dans les urines cinq jours après. On admet que l'arsenic est éliminé en quinze jours; cependant MM. Flandin et Danger, chez un mouton, ont constaté ce poison dansles urines jusqu'au trente-troisième. MM. Millon et Laveran donnent à des chiens, tous les jours et pendant une semaine, 3 décig. d'émétique, mêlé à leurs aliments, et retirent l'antimoine du foie, du cœur, des muscles, du tube intestinal, des poumons, et n'en trouvent pas dans le cerveau, la graisse, les os. Quand l'administration était continuée pendant quinze à vingt-cinq jours, la distribution de l'antimoine était la même. Le foie en donnait six fois plus que la même quantité des autres organes réunis. Ils mêlent, par jour, aux aliments de six chiens, 4 décig. d'émétique; dès les premiers jours, appétit dévorant, bientôt dégoût, et, six jours après, refus d'aliments. L'émétique est diminué de moitié et supprimé quatre jours après, parce que les animaux n'y touchent plus, sont d'une maigreur extrême. Quatre reprirent peu à peu leur état normal; deux moururent dans une consomption complète, l'un en quinze, l'autre en vingt et un jours, avec des tremblements continuels et un grand affaiblissement des membres postérieurs; on ne trouva pas de lésion évidente, si ce n'est que le foie était très-friable, très-volumineux, et en poids, de 1 à 10 ou 12, relativement à celui du corps. Dans l'état normal, ce rapport est de 1 à 32 ou 40. L'antimoine était disséminé dans tous les organes précités; mais, chez le second chien, le cerveau était celui qui en contenait le plus. Le premier chien avait succombé à une sorte de diathèse, et le second, à une espèce d'encéphalopathie antimoniales. Les quatre autres chiens se rétablirent au bout de vingt jours. Chez trois, tués trois mois après, l'antimoine s'était surtout condensé dans le foie, la graisse; chez le quatrième, qui le fut quatre mois après, il s'était accumulé dans les os. Le foie, dont le poids était, à

celui du corps, de 1 à 24, en contenait beaucoup, les autres tissus fort peu. De l'émétique étant donné à une chienne cinq jours avant qu'elle ne mît bas, le foie des petits qui vinrent à terme contenait de l'antimoine en quantité notable.

M. Louis Orfila a institué des expériences dans le même genre. Il donnait 0,05 à 0,50 d'un sel d'argent, de plomb, de cuivre ou de mercure, pendant quinze jours, un, deux mois, examinait les urines les premiers jours, après avoir cessé l'administration du poison, tuait les chiens en un certain laps de temps, afin de savoir dans quels organes il se trouvait.

4° Avec le nitrate d'argent, donné à la dose de 0,10 à 0,25 tous les jours, pendant quinze jours à un mois et demi, il ne trouve pas d'argent dans les urines et le retire cinq mois après du foie, mais non après sept mois. Il n'en a pas trouvé dans l'estomac, les intestins, la graisse, la peau, les veines, non plus que dans le foie de deux petits allaités par une chienne.

2o Le sulfate de cuivre, donné à la dose de 0,12 à 0,15 pendant quinze jours, deux mois, a été constaté dans les urines seulement les trois premiers jours, et au moins huit mois après dans le foie. L'estomac, l'intestin, le fémur, la peau, la graisse, n'en contenaient pas.

3o L'acétate de plomb administré pendant un mois, à la dose de 0,50 par jour, a été retiré des urines les trois premiers jours; le foie, les intestins, le cerveau, le femur, en donnaient encore après huit mois. L'estomac, les veines, la graisse, l'épiploon, n'en donnaient pas à cette époque. Le foie de deux petits allaités par une chienne, fournit du plomb trois, quatrejours après la cessation de l'acétate, et celui de la mère ainsi que l'estomac, soixante jours après.

4o Le sublimé, à la dose de 0,01 à 0,50 par jour, se trouve dans les urines cinq, six jours après son introduction dans l'estomac, et dans la salive, quand il y a salivation, les premiers jours seulement, non le cinquième. M. Orfila a retiré le mercure du foie, des intestins, des reins, et ne l'a pas trouvé dans la graisse, les poumons, les os. 11 pense qu'il est éliminé en

un mois, et considère les reins comme le principal émonctoire, tandis que, d'après M, Colson, ce serait la muqueuse stomacopharyngée,

Les expériences de MM. Millon et Laveran, L. Orfila sont très-importantes relativement à l'influence du mode d'administration des poisons sur leur dissémination, leur séjour dans les organes, leur élimination. Elles peuvent élucider certains faits thérapeutiques et toxiques que nous rapportons aux préparations mercurielles et plombiques, résoudre plusieurs questions médico-légales relatives aux poisons minéraux de la quatrième section.

La recherche des poisons absorbés doit porter sur les organes vasculaires, le foie, la rate, les reins, les poumons, le cœur, les muscles, et parmi les liquides, les urines, le sang. L'analyse du tube intestinal et de son contenu, du foie, des muscles, suffit pour la solution de la plupart des questions toxicologiques. C'est seulement à défaut de ces organes et dans quelques cas exceptionnels qu'on y soumet les autres parties. Il faut d'abord y chercher les poisons solubles et volatils, puis les alcalis végétaux, et enfin les poisons minéraux de la quatrième section, par le procédé de carbonisation sulfurique, en procédant comme nous l'avons indiqué page 6. M. L. Orfila a expérimenté comparativement les procédés de carbonisation sulfurique, par l'acide azotique et le chlorate de potasse, et celui qui consiste à faire bouillir les matières dans l'eau acidulée par l'acide azotique, à évaporer le décocté à siccité, à carboniser le résidu par l'acide azotique. Il donne la préférence à ce dernier, comme plus délicat et moins sujet à erreur (voyez cuivre, plomb).

V.-Recherche des poisons dans la terre du cimetière.— La terre du cimetière peut être phosphorique, arsénicale, cuivreuse, plombique, etc. On peut donc objecter que le poison retiré des organes provient de cette source. Dans la toxicologie générale et à l'empoisonnement par l'arsenic, nous donnons les moyens de résoudre ces questions. Pour s'assurer si le poison s'y trouve à l'état insoluble ou soluble, il faut

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