Images de page
PDF
ePub

bassin du Tech, l'Administration a fait étudier plusieurs projets de barrages qui emmagasineraient de l'eau en quantité suffisante.

On a cherché les emplacements favorables dans le lit même du Tech. On a cru d'abord avoir découvert le meilleur endroit en désiguant le Pas du Loup; on a proposé très sérieusement d'y construire un grand réservoir. Pour emmagasiner là 12 millions de mètres cubes d'eau, il aurait fallu élever une digue de 60 mètres de hauteur. Les ingénieurs justifiaient le choix de cet emplacement par la nature. du terrain, qui est granitique et par conséquent imperméable.

Il est aujourd'hui inutile d'énumérer les dangers permanents qu'aurait présentés la construction d'une maçonnerie de cette élévation à travers le terrible courant du Tech. En cas de rupture du barrage, les beaux villages d'Arles, d'Amélie-les-Bains et de Palalda, ainsi que les nombreux moulins construits en aval de la rivière, étaient sous le coup d'une brusque inondation qui aurait déterminé une véritable catastrophe.

Le réservoir du Pas du Loup présentait d'autres inconvénients. La pente du Tech est très inclinée. Au moment des fortes crues, la rivière charrie des blocs de rocher de dimensions énormes et une quantité incalculable de gros cailloux. Comment déblayer des dépôts de cette espèce? Le nettoyage aurait été littéralement impossible. Le réservoir aurait été vite comblé. Si elle ne s'était pas rompue, la digue serait devenue inutile au bout de quelques années. On aurait dépensé des millions pour faire une cascade sur le cours du Tech.

Nous n'insisterons pas davantage sur les inconvénients du réservoir du Pas du Loup. L'Administration a été la première à les reconnaître. Ce projet a été abandonné, et on a repris les études du réservoir de la Fou, dont on parle depuis le règne de Louis-Philippe.

La vallée du Tech est généralement granitique; il y existe toutefois des îlots calcaires assez importants. L'un des flancs du vallon de la Fou est formé par l'un de ces massifs; c'est dans le calcaire que le travail des eaux a creusé un défilé étroit qui offre l'emplacement propice pour établir un barrage.

M. Sorel, qui est allé sur les lieux et qui a étudié avec soin le projet, prétend que, « si le défilé est avantageux, le vallon est peu favorable à cause de son énorme pente». Il faut élever un mur de 45 mètres de hauteur pour retenir 2 millions de mètres cubes. M. Sorel a calculé qu'avec une digue de 65 mètres on dépasserait le chiffre de 5 millions; mais il fait observer que «l'Administration hésiterait à construire un barrage aussi haut ». Tous les ingénieurs sont d'accord pour reconnaître qu'il sera très difficile de retenir l'eau sur une

grande hauteur dans le bassin de la Fou. Nous savons par le rapport de M. Sorel, auquel nous empruntons les renseignements techniques relatifs à ce projet de réservoir, qu'il existe dans la gorge une source jaillissant du massif calcaire et qu'en amont du point désigné pour la construction du barrage les eaux du ravin disparaissent dans le sol. M. Sorel, qui semble persuadé que ses persévérantes recherches sont condamnées à rester infructueuses, n'hésite pas à dire :

« Sans déclarer absolument impossible la construction d'un réservoir dans ces conditions, on doit considérer cette œuvre comme assez aléa toire. Il paraît bien difficile d'être jamais sûr d'avoir étanché le terrain; il n'existe pas d'ailleurs de moyens d'investigation pouvant servir de base à une analyse raisonnée et à des conclusions formelles. Cependant il est clair que dans une affaire de cette espèce, il y a une question de mesure qui doit jouer un grand rôle. Les difficultés crois sent évidemment avec la hauteur: ce qui serait possible avec 30 mètres peut devenir difficile avec 50 et impossible avec 80. »

Malgré ces réflexions décourageantes, l'ingénieur de l'Administration continue son rapport en présentant les chiffres approximatifs des frais de construction de ce barrage. Ils s'élèvent à 1,400,000 francs, auxquels il faudrait ajouter 250,000 francs pour un canal de 5 kilom. qui amènerait les eaux du Riuferrer dans le bassin de la Fou, beaucoup trop petit pour assurer le remplissage du réservoir.

D'après ces données, la dépense totale pour emmagasiner 5 millions de mètres cubes d'eau s'élèverait à 1,650,000 francs. On craint avec raison que ce chiffre ne soit encore « augmenté notablement à la suite d'une étude régulière ».

Avons-nous tort de dire que le réservoir de la Fou, de l'avis même des ingénieurs qui ont présenté le projet, n'est guère réalisable?

Dans l'espoir d'offrir une satisfaction moins platonique aux désirs exprimés par le Conseil général du département, et pour s'acquitter en conscience de la mission dont on les a chargés, les ingénieurs ont songé à faire alimenter les canaux d'arrosage par des forages artésiens ou par des galeries de captation sous le thalweg du Tech; mais ils ne se bercent ni ne veulent bercer le public d'aucune illusion sur le résultat de leurs recherches. Il n'y a, pour se convaincre du peu de confiance des ingénieurs de l'Administration dans leurs propres projets, qu'à lire les tristes conclusions de leurs rapports.

« En résumé, écrit M. Sorel en terminant son instructif travail, l'Administration a été saisie de tous les projets de réservoirs qui ont paru économiques et, par suite, réalisables dans les conditions ordinaires. En ce qui touche la vallée du Tech, il existe une solution, déjà 28

VIII.

repoussée il y a quelques années, mais qui pourrait être reprise : le réservoir de la Fou constitue une œuvre difficile et présentant un aléa important à cause de la nature du terrain. De plus, elle est très coûteuse. On peut, avec un mur de 65 mètres de hauteur, emmagasiner 5 millions de mètres cubes moyennant une dépense de 1,650,000 fr. Il ne semble pas qu'il y ait lieu de chercher à faire des forages dans la vallée du Tech; quant à une captation souterraine, elle coûterait au moins 700,000 francs pour un résultat incertain comme dans toutes les opérations de cette espèce. »

L'avis de l'ingénieur en chef, M. Parlier, est plus décourageant encore que le rapport de l'ingénieur ordinaire.

A propos du barrage de la Fou, M. Parlier s'exprime ainsi :

« L'un des flancs de la vallée est un massif calcaire d'où sortent des sources importantes, ce qui indique une perméabilité plus ou moins grande. L'autre est du granit. L'Administration supérieure jugea les conditions de ce réservoir inacceptables et rejeta le projet, par décision du 24 février 1866.

« C'est le barrage de la Fou qui semble à certains esprits devoir être l'ancre de salut de la vallée du Tech. Malheureusement, le terrain n'a pas changé, la surface n'a pas augmenté et les prix de la main-d'œuvre ne se sont pas abaissés. La solution ne sera ni moins coûteuse ni moins difficile au point de vue de l'art, ni moins aléatoire sous le rapport des filtrations. D'ailleurs, tel qu'il a été projeté autrefois, il serait insuffisant et ne serait qu'un palliatif de quelques jours. »

Il nous semble difficile de conserver la moindre illusion sur la réalisation du projet du barrage de la Fou après la lecture des rapports des ingénieurs de l'Administration.

Mais, ce projet serait-il facilement réalisable, nous ne croyons pas qu'il puisse donner satisfaction aux légitimes exigences des propriétaires, payant déjà de fortes taxes d'arrosage, et en même temps aux besoins d'eau de tous les périmètres arrosables de la vallée du Tech. (A suivre.)

Nous avons reçu de M. le Ministre de l'Instruction publique, et nous publions ci-dessous, le programme des questions qui seront soumises aux diverses sections du Congrès des Sociétés savantes qui aura lieu à Paris, en 1886.

Ministère de l'Instruction Publique, des Beaux-Arts et des Cultes.
Programme du Congrès des Sociétés savantes à la
Sorbonne en 1886.

I. SECTION D'HISTOIRE ET DE PHILOLOGIE.

1. Mode d'élection et étendue des pouvoirs des députés aux États provinciaux.

2. Les esclaves sur les bords de la Méditerranée au moyen-âge. 3. Recherche des documents d'après lesquels on peut déterminer les modifications successives du servage.

4. Origine et organisation des anciennes corporations d'arts et métiers.

5. Origine, importance et durée des anciennes foires.

6. Anciens livres de raison et de comptes et journaux de famille. 7. Liturgies locales antérieures au xvII° siècle.

8. Origine et règlements des confréries et charités antérieures au XVIIe siècle.

9. Études des anciens calendriers.

10. Indiquer les modifications que les recherches les plus récentes permettent d'introduire dans le tableau des constitutions communales tracé par M. Augustin Thierry.

11. Des livres qui ont servi à l'enseignement du grec en France, depuis la Renaissance jusqu'au xvin siècle.

12. Les exercices publics dans les collèges (distributions de prix, académies, représentations théâtrales, etc.), avant la Révolution. 13. Anciennes démarcations des diocèses et des cités de la Gaule, servant encore aujourd'hui de limite aux départements et aux diocè

ses.

14. Étude des documents antérieurs à la Révolution pouvant fournir des renseignements sur le chiffre de la population dans une ancienne circonscription civile ou ecclésiastique.

15. L'histoire des mines en France avant le xvIIe siècle.

16. De la signification des préfixes EN et NA devant les noms propres dans les chartes et les inscriptions en langue romane.

17. Objet, division et plan d'une bibliographie départementale.

II. SECTION D'ARCHÉOLOGIE.

1. Quelles sont les contrées de la Gaule où ont été signalés des cimetières à incinération remontant à une époque antérieure à la

conquête romaine? Quels sont les caractères distinctifs de ces cimetières?

2. Dresser la liste, faire la description et rechercher l'origine des œuvres d'art hellénique, des inscriptions et des marbres grecs qui existent dans les collections publiques ou privées des divers départements. Distinguer ceux des monuments qui sont de provenance locale de ceux qui ont été importés dans les temps modernes.

3. Dresser la liste des sarcophages païens sculptés de la Gaule. En étudier les sujets, rechercher les données historiques et les légendes qui s'y rattachent et indiquer leur provenance.

4. Signaler les nouvelles découvertes de bornes miliaires ou les constatations de chaussées antiques qui peuvent servir à déterminer le tracé des voies romaines en Gaule ou en Afrique.

5. Grouper les renseignements que les noms de lieux-dits peuvent fournir à l'archéologie et à la géographie antique.

6. Signaler dans une région déterminée les édifices antiques de l'Afrique tels que arcs de triomphe, temples, théâtres, cirques, portes de ville, tombeaux monumentaux, aqueducs,, ponts, etc., et dresser le plan des ruines romaines les plus intéressantes.

7. Etudier les caractères qui distinguent les diverses écoles d'archi. tecture religieuse à l'époque romane, en s'attachant à mettre en relief les éléments constitutifs des monuments (plans, voûtes, etc.).

8. Rechercher, dans chaque département ou arrondissement, les monuments de l'architecture militaire en France aux différents siècles du moyen-âge. En donner les statistiques, signaler les documents historiques qui peuvent servir à en déterminer la date.

9. Signaler les constructions rurales élevées par les abbayes, telles que granges, moulins, étables, colombiers. En donner, autant que possible, les coupes et plans.

10. Étudier les tissus anciens, les tapisseries et les broderies qui existent dans les trésors des églises, dans les anciens hôpitaux, dans les musées et dans les collections particulières.

11. Signaler les actes notariés du xive au xvi siècle contenant des renseignements sur la biographie des artistes et particulièrement des marchés relatifs aux peintures, sculptures et autres œuvres d'art commandées, soit par des particuliers, soit par des municipalités ou des communautés.

12. Étudier les produits des principaux centres de fabrication de l'orfèvrerie en France pendant le moyen-âge et signaler les caractères qui permettent de les distinguer.

13. Quelles mesures pourraient être prises pour améliorer l'orga

« PrécédentContinuer »