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d'avoir à diminuer de voile, être annoncé par un coup de canon tiré à blanc, et qu'en outre le croiseur ne doit pas à ce moment s'approcher trop près du navire marchand, de façon à faire craindre à celui-ci des intentions rien moins que pacifiques de sa part. Dès que le navire marchand diminue de voile, le croiseur a droit d'envoyer un détachement de son équipage en canot pour aller à bord, examiner ses papiers, et, s'il est nécessaire, inspecter son chargement, et le capitaine du navire marchand est tenu de soumettre tous ses papiers à l'examen et de permettre des perquisitions dans son chargement. Le juge Story paraît ne pas reconnaître que le coup de canon d'assurance soit de règle ou d'obligation universelle. « Ce peut être », dit-il,' « la loi des États maritimes du continent européen, fondée sur leurs usages ou des règlements positifs; mais il ne s'ensuit pas que ce soit obligatoire pour toutes les autres nations ».

Le général Halleck, ci-devant secrétaire d'État pour la Californie, dans son ouvrage sur le Droit international, publié à San-Francisco en 1861, fait observer que « le mode usité, adopté par la plupart des puissances maritimes d'Europe, pour sommer un neutre d'avoir à subir la visite, est un coup de canon tiré par le belligérant. Cet avertissement est appelé par les Français semonce, coup d'assurance, et par les Anglais affirming gun. Il est sans doute du devoir du neutre d'obéir à cette semonce; mais le belligérant n'est tenu par aucune obligation positive de tirer ce coup d'assurance, car l'usage n'en est nullement universel. Bien plus, toute autre méthode, telle que, par exemple, le hêlage par signaux, etc., de sommer un neutre d'avoir à se soumettre à un examen peut être également aussi efficace et aussi obligatoire que le coup d'assurance, si la semonce est effectivement adressée au neutre et que celui-ci la comprenne. Le moyen employé n'est pas essentiel; mais le fait d'une semonce adressée effectivement est nécessaire pour rendre

1 The Mariana Flora, 11, Wheaton, p. 50.

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le navire qui procède à la visite irresponsable de tous les dommages qui pourraient en résulter pour le neutre qui s'y opposerait. >> De son côté, Sir R. Phillimore semble être d'opinion que le mode reçu de sommer le neutre de subir la visite consiste dans un coup de canon tiré par le belligérant, et que c'est la distance à laquelle ce coup doit être tiré qui a été le sujet de conventions particulières. M. Heffter fait remarquer que l'exercice du droit de visite a été plus particulièrement réglementé par le traité des Pyrénées," dont les dispositions sur cette matière sont devenues en quelque sorte le droit maritime de l'Europe. En passant en revue avec attention la pratique des puissances européennes dans les temps modernes, on voit qu'aucun navire marchand n'est tenu de diminuer de voile qu'à moins que le croiseur belligérant ne tire un coup de canon pour le prévenir de son intention de le visiter. Que le canon soit tiré avant que le croiseur ait hissé son pavillon ou aussitôt après qu'il a montré ses couleurs, peu importe. Les deux conditions qui doivent être remplies par le croiseur belligérant, par esprit de justice à l'égard du capitaine du navire marchand neutre, avant que celui-ci puisse être jugé coupable d'avoir contrevenu à un droit du belligérant, sont que le vrai caractère du croiseur lui-même soit, par le déploiement de son pavillon militaire, porté à la connaissance du neutre, et que le croiseur notifie au neutre par un coup de canon son intention de le visiter en vertu de son droit de belligérant. Si le navire neutre a mis à la voile antérieurement aux hostilités, et que son capitaine et son équipage ignorent parfaitement l'existence de la guerre et par conséquent n'ont pas conscience d'avoir des droits de neutralité. à remplir, une simple tentative de leur part d'échapper à

1 Chap. XXV, On Visitation and Search, § 15.

2 Commentaries, vol. III, § 332.

3 Das Europaïsche Volkerrecht, § 169.

Dumont, Tome VI, part. II, p. 264. - Schmauss, Corp. jur. gent.,

p. 683.

un navire armé, qui prouve ensuite être un croiseur belligérant, ne sera pas une violation des obligations des neu

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94. Par l'article XVII du traité des Pyrénées du 7 novembre 1659, qui est considéré comme comportant le droit des gens commun sur ce sujet, le but du droit de visite est interprété comme étant l'inspection du passeport ou de la lettre de mer d'un navire, au moyen de laquelle on peut constater la nature de son chargement, ainsi que le domicile, la résidence et les noms du capitaine et de l'armateur, et la nationalité du navire même. La pratique des nations relativement au passeport d'un navire a subi quelque modification. Lorsque des traités existent concernant la présentation d'un passeport ou d'une lettre de mer, les navires pourvus du passeport ou de la lettre de mer normale ont seuls droit aux privilèges des traités, quels qu'ils soient. Dans d'autres cas le passeport n'est pas aujourd'hui un document indispensable, s'il existe d'autres papiers de bord établissant d'une manière satisfaisante le caractère, la propriélé et la destination du navire et du chargement. Parmi ces papiers, le plus important est le contrat du constructeur, ou l'acte de vente, dans le cas où le navire ait changé de propriétaires; il faut y ajouter le certificat d'inscription, si la loi municipale du port où le navire met à la voile, exige l'inscription. Si ces deux documents se trouvent à bord et qu'on n'en puisse mettre en doute la bonne foi, la preuve de la propriété en ce qui regarde le navire est suffisamment complète, autant qu'on peut l'établir à l'aide de pièces justificatives. Quant au chargement, si le navire est un bâtiment adapté à un service général, son manifeste et les connaissements sont les meilleures preuves de la propriété et de la destination du chargement. D'autre part, si le navire doit être frété, la charte-partie doit être à bord;

1 San Juan Bautista, 5. Ch. Robinson, p. 35.

cependant l'absence de la charte partie ne justifierait pas la condamnation du navire, pas plus que l'absence de la facture des marchandises; mais la non-production d'un papier de bord, formant, en droit strict, la preuve documentaire relativement au navire mème ou au chargement, justifie l'envoi du navire dans un port pour y être soumis à une enquête,' afin que le capitaine puisse rendre compte d'une manière satisfaisante devant un tribunal de prises de l'absence du papier qui fait défaut.

95. - Le droit de détention pour enquête est le corollaire du droit de visite et de recherche. Si le commandant d'un navire de guerre belligérant, après avoir examiné les papiers trouvés à bord d'un navire marchand, découvre des raisons justes et suffisantes pour arrêter ce navire afin de procéder à de plus amples perquisitions, il peut envoyer à son bord un équipage de prises pour le conduire au port de sa nation le plus proche et le plus à sa convenance, sauf pleine et entière responsabilité quant aux frais et aux dommages, s'il a agi sans cause juste et suffisante, selon l'opinion d'un tribunal de prises dûment constitué « C'est une règle de droit», dit lord Stowell, « que le navire neutre doit se soumettre aux perquisitions proposées, en comptant avec confiance sur ces tribunaux, dont les fonctions les plus nobles (et j'espère aussi que ce ne sont pas les moins agréables consistent à réparer par voie de compensation les inconvénients de ce genre, s'il en est survenu par accident ou par erreur, et de redresser par voie de compensation et au moyen de perquisitions les offenses qui ont été commises à dessein.2

1 D'Abreu indique 9 papiers à bord d'un navire pour qu'il soit en règle: 1° le passeport; 2° les lettres de mer; 30 le journal; 4° le certificat de santé; 5 l'appartenance ou la propriété du navire; 6° l'inventaire des marchandises; 7° la charte-partie; 8° les connaissements; 9° la facture. Il ne comprend pas le rôle d'équipage au nombre des papiers nécessaires, que cependant Kluber énumère. Kluber, Droit des gens, § 294. The Maria, 1. Ch. Rob. 374.

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96. Tout croiseur belligérant a le droit d'insister pour vérifier le caractère neutre de tous les navires qu'il rencontre sur la haute mer portant un pavillon neutre ; et c'est une maxime de droit évidente que « un navire neutre est tenu, relativement à son commerce, de se soumettre au droit de recherche qui appartient au belligérant. » C'est pourquoi un navire marchand neutre ne peut adopter des mesures ayant pour object direct de soustraire son commerce en pleine mer à l'exercice du droit de recherche par un croiseur belligérant. Un navire marchand neutre n'a donc pas la faculté de mettre son navire à l'abri du droit de recherche appartenant au belligérant, en le plaçant sous le convoi d'un navire de guerre neutre ou ennemi. « Le seul fait de naviguer sous la protection d'un convoi belligérant ou neutre », dit le chancelier Kent, « est une violation de la neutralité.» Wheaton semble partager cet avis, lorsque, à propos des captures danoises effectuées en vertu de l'ordonnance de 1810, il se demande «< pourquoi l'acte de naviguer sous le convoi d'un vaisseau de guerre neutre était regardé comme une cause concluante de condamnation ». « C'était parce que cet acte tendait à entraver et à détruire le droit belligérant de recherche, à faire de la tentative d'exercice de ce droit légal une lutte de violence, à troubler la paix du monde, et à soustraire au tribunal compétent la décision de pareilles controverses, en empêchant violemment l'exercice de la juridiction de ce tribunal ». Une résistance effective de la part du navire de guerre convoyeur n'est pas nécessaire pour établir le caractère, contraire à la neutralité, de l'acte du navire marchand qui navigue sous sa protection. Lord Stowell, en commentant l'allégation que l'intention de résister au droit de recherche n'a jamais été mise à exécution par un navire neutre ayant mis à la voile sous le convoi d'un navire de guerre, fait observer que «l'intention est in

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Le juge Story, dans The Nereide, 9 Cranch, p. 438.

2 Commentaries, Tome I, p. 154.

3 Elements of international law, Part. IV, Ch. III, p. 597, éd. 1857.

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