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JUSTINE, DUBOIS,

CHAMPAGNE.

JUSTINE donnant un billet à Champagne.

A Dieu,dis à ton maître,

>>Qu'on n'a de tous ces vers vanté que le Sonnet, Et qu'on feroit ravi de fçavoir qui l'a fait. CHAMPAGNE.

Serviteur.

病症

SCENE VII.

JUSTINE, DUBOIS,

L

DUBOIS.

E détour merite qu'on le louë. J'en attendois de vous un meilleur, je l'avouë. C'étoit donc là des vers? vous mocquez-vous de moy? Il faut ou plus d'efprit, ou plus de bonne foy. JUSTINE à part.

Je voudrois bien gagner ce maudit Secretaire.

DUBOIS.

Que marmotez-vous-là, la belle?

JUSTINE à part.

Comment faire ;

Secretaire, Greffier, Procureur, ny Sergent,
N'ont jamais pû, dit-on, tenir contre l'argent.
Seroit-il le premier ?

DUBOIS à part.
Fidelle à fa maîtreffe,

Elle a crû m'abuser avec ce tour d'adreffe.

JUSTINE à part.

Que rumine-t-il là?

DUBOIS à part.

Ne pourray-je jamais

Obtenir d'être admis dans leurs confeils fecrets?

Que luy dire?

JUSTINE à part.

Je veux faire un coup de ma tête. DUBOIS à part.

Je fens je ne fçai quoy qui m'étonne & m'arrête.

JUSTINE à Brt.

Tout coup vaille: parlons, je ne puis reculer.
DUBOIS à part.

Avançons : un grand cœur ne doit jamais trembler.* *Chacun s'avance de fon côté. Ils fe rencontrent nez à nez JUSTIN E.

Hay, pardon.

DUBOIS.

De quel trouble êtes-vous donc preflée!
JUSTIN E.

.

Mais vous fur quel objet portiez-vous la pensée?
Vous étiez en fecret puiffamment agité:
De grace contentez ma curiofité.

DUBOIS.

Je ne penfois qu'à vous.

JUSTINE.
A moy?

DUBOIS

Je vous le jure.
JUSTINE

.

JUSTINE.

Je ne penfois qu'à vous auffi, je vous affeure,

Quelle rencontre !

DUBOIS.

JUST IN E.

Aprés quelque reflexion
Sur le malheur du monde & fa confufion:
Car vous devez fçavoir que j'excelle en morale,
Par quel ordre cruel, par quelle loi fatale,
Me difois-je à moy même, eft-il donc arrêté ?
Qu'on ne trouve par tout que contrarieté ?
Pourquoy des gens fenfez que le deftin affemble,
Ne s'accordent-ils pas pour vivre heureux ensemble

DUBOIS.
Je penfois juftement ce que vous avez dit.
JUSTIN E.

Par exemple; Dubois, difois-je, a de l'efprit.
Tout le monde connoît fes talens, fa prudence,
S'il vouloit avec nous être d'intelligence,
Rien ne troubleroit plus nos innocens plaifirs,
Et l'on voudroit en vain contraindre nos defirs
Cependant comme il eft l'efpion de Dorante,
Que nous craignons fes yeux, & fa langue piquante,
Qu'à nous garder de luy nous travaillons toûjours,
Il empoisonne feul le bonheur de nos jours.

DU BOI S.

Et moi, je me difois, fe peut-il que Juftine,
Que l'on vante par tout, & que l'on croit fi fine,
Juge affez mal des gens pour ne pas prefumer,
Qu'un homme tel que moy ne doit point l'alarmer?
Que mes foins, mes emplois, ma longue experience
M'ont acquis dans le monde affez de connoiffance,
Pour m'avoir convaincu qu'il faut fermer les yeux,
Et tirer le rideau fur ce qu'on voit le mieux;
Sur tout lors qu'il s'agit de la paix d'un ménage
Qu'on trouble fans retour par le plus foible ombrage,

B

JUSTINE.

Il faut que je lui parle à ce Monfieur Dubois
Et que je fçache au moins s'il entend le François,
Ai-je dit. Hfe plaint qu'il demeure inutile,
Qu'il meurt dans le loifir d'une Charge fterile.
L'employ de Secretaire eft mince chez Monfieur,
Il ne tiendra qu'à luy d'en avoir un meilleur.
Je l'en revêtiray; j'en répons fur mon ame;
Il gagnera bien plus à l'être de Madame.

DUBOIS.

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C'en eft trop ai-je dit. Changeons nôtre deftin.
Allons trouver Juftine. Expliquons-nous enfin.
Faifons-lui concevoir qu'un homme de ma forte
Sent toûjours vers le bien une ardeur qui l'emporte:
Que pour en acquerir, & pour la contenter,
Il n'eft aucun employ qu'il ne veuille accepter:
Qu'en me formant le Ciel m'infpira cette envie,
Qui ne peut de mon cœur fortir qu'avec la vie.

JUSTINE.

Ainfi fans le fçavoir nous nous entretenions.

DUBOIS

Et voyez cependant comment nous raisonnions.
JUSTINE.

On ne peut pas plus jufte, & nôtre intelligence
Me donne deformais une entiere efperance.
Parle; car entre nous il n'eft plus de façons:
Monfieur foupçonne-t-il ce que nous luy braffons
Eft-il content de moy, de fa fœur, de sa femme?
Car tu n'ignores rien des fecrets de fon ame.
DUBOIS.

Ouy toûjours avec moy fon cœur s'est épanché;
Sur cet article feul il s'eft encore caché,

Je ne fçai rien.

JUSTINE.

Bon bon..

DUBOIS.

Non. La pefte me tuë. De quelques foins pourtant fon ame eft combatu: Car depuis quelques jours il fait de grands foupirs, Et femble avoir perdu fon goût pour les plaifirs Mais file mal qu'il fent redouble fes atteintes, il me viendra bientôt faire entendre les plaintes. Je n'en fçaurois douter.

JUSTINE.

C'est là que je l'attends: Et pour t'inftruire à fonds de ce que je pretends; que dés l'inftant fans aucun artifice,

Il faut

De tout vôtre entretien, ton rapport m'éclairciffe; Que ce qu'il t'aura dit, je l'apprenne de toy.

DUBOIS.

Mais ne fçauray-je pas pourquoy cela?

JUSTINE.

Pourquoy?

Pour choisir là-deffus la route qu'il faut prendre, Dans le deffein d'unir Julie avec Clitandre,

Et d'obtenir l'aveu de Dorante.

DUBOIS.

Vrayment
Si tu crois les unir par fon confentement,
Tu t'abuses: jamais il n'y voudra foufcrire.
JUSTIN E.

Promets-moy feulement de te laiffer conduire :
Le refte me regarde. Adieu. Mais à propos
Il eft bon de te dire encore quatre mots.
Clitandre au poids de l'or veut payer tes paroles.
Et les taxe, dit-il, à quatre cent piftoles.
DU BOI S.

C'eft parler comme il faut.

JUSTINE.

Sur ce pied-là je croy

Que fans trop me flater, je puis compter fur toy.

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