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digne de confiance, qui vous est déjà connu sous certains rapports, et que vous apprendrez à mieux connaître en.core. Tant que les décrets et la providence de Dieu ont permis qu'il habitât parmi nous, il a non seulement affermi l'Eglise de Jésus-Christ, mais il l'a encore étendue (9). » · C'est là tout ce que nous savons de la vie de cet homme remarquable, et qui exerça une si grande influence sur son siècle. Quant à ce qui lui est arrivé depuis; quant au lieu et au temps de sa mort, nous l'ignorons complétement. Saint Jérôme ayant remarqué qu'il a fleuri sous Septime Sévère et sous son successeur Caracalla, il faut qu'il soit mort au plus tard en 217 (10). Les premiers Pères, surtout ceux d'Orient, lui donnent le titre de saint, et le martyrologe d'Usuardus place sa fête au 4 décembre; mais depuis Benoît XIV il en a été retiré (11).

I. Ecrits.

C'est par Clément que s'ouvre la dernière période dont nous avons parlé, où la foi, qui jusqu'alors s'était tenue à l'écart de la science, l'attire vers elle, et, après lui avoir communiqué un essor plus élevé, la dirige vers le but qui lui est propre. Clément ne se montre pas seulement le précurseur significatif de cette direction chrétienne et scientifique, mais nous osons dire que c'est lui qui transmet à son siècle l'impulsion qu'il avait lui-même reçue directement de l'Eglise. Nous ne pouvons nous empêcher d'admirer le maintien assuré avec lequel il se présente comme écrivain et devance les siens sur cette route nouvellement frayée.

Ainsi que nous l'avons déjà remarqué, il règne dans ses

(9) Euseb., h. e. VI, 11. — (10) Hieron. catal., c. 38. (11) Les motifs en sont développés dans une lettre servant d'introduction à la nouvelle édition du Martyrologe romain en 1751.

écrits un plan facile à reconnaître. On remarque ce plan dans la Disciplina arcani, ouvrage par lequel il s'efforçait de prévenir la profanation et l'abus de la doctrine chrétienne. Cette précaution regardait les hérétiques autant que les païens, à qui il s'agissait de rendre le Christianisme et l'Eglise plus respectables, en les enveloppant de mystères et en les traitant avec une haute vénération.

Clément s'occupait principalement de la conversion des païens. De même que les juifs, les païens avaient une règle particulière d'après laquelle ils jugeaient les choses. Ce que les livres saints étaient aux Israélites, la philosophie le devenait pour les païens bien élevés, et quiconque les approchait de ce côté, pouvait espérer de triompher de leur cœur et de leur conviction. Clément se proposait d'après cela, dans ses ouvrages, de démontrer l'harmonie qui existe entre le Christianisme et la vraie philosophie, et d'écarter par là toute objection que l'on pourrait faire contre lui sous ce rapport. Son immense érudition lui rendit à cet égard les plus grands services. Nous trouvons son projet développé dans trois ouvrages qui ensemble forment un tout.

Le premier a pour but de faire voir que le paganisme est contraire à la raison, le second contient des instructions pour mener une vie vertueuse, et le troisième enfin développe, après cette introduction, les mystères du Christianisme. Le catéchuménat et l'initiation aux mystères chrétiens, offraient aux Grecs une grande ressemblance avec la méthode d'enseignement de Pythagore, et c'est par cela même que cette espèce d'éducation ecclésiastique devait avoir de grands charmes pour les païens (12).

1o Le premier de ces ouvrages a pour titre koyos porpane

(12) Strom., VII, 4, p. 843. ́Ezui nai apo one two postupiai mapadem καθαρμούς τινας προςάγειν τοις μυείσθαι μελλουσιν ἀξιουσιν· ὡς όμον την άθεον ἀποθεμένους δόξαν ότι την αληθη προτεσθαι παραδόσε

σεως,

tuża (cohortatio ad gentes). C'est une exhortation aux Gentils pour les engager à adopter la croyance chrétienne. Son authenticité est incontestable et suffisamment attestée par l'histoire. Son but fait voir clairement qu'il a précédé les deux autres, et Photius en fait aussi la remarque; de sorte qu'il a dû être écrit et publié avant la fin du deuxième siècle, probablement entre les années 190 et 194. Le titre suffit pour en indiquer le contenu. Clément y prouvé avec un grand luxe d'érudition que la religion païennè, ses oracles et l'histoire de ses dieux, sont autant d'inventions et de supercheries. Dans un exorde plein de grâce, il dit : « D'àprès une ancienne tradition, Amphion le Thébain et Arion ⚫ de Méthymine se sont distingués par une si grande puissance de chant, que celui-ci attirait les poissons par ses accords, et que celui-là entoura sa patrie de remparts, ⚫ tandis qu'Orphée apprivoisait les bêtes féroces par sa voix mélodieuse. Mais renvoyons à l'Hélicon et au Cythéron ces récits des poètes, avec tout ce qui s'y rattaché ét ⚫toute la troupe des dieux, et prêtons l'oreille à mon chan<tre : car c'est lui qui a apprivoisé les bêtes les plus féroces «de toutes, les hommes, et les hommes de toutes les espèces; ceux qui ont des ailes, c'est-à-dire les hommes frivoles et légers; les reptiles, c'est-à-dire les fourbes; les lions, c'est-à-dire les furieux; les cochons, c'est-à-dire les voluptueux; les loups, c'est-à-dire ceux qui vivent de rapines; il n'y a pas jusqu'aux bois et aux pierres, c'est-àdire aux hommes d'un esprit altier, auxquels il n'ait su imprimer le mouvement. Mais un homme enseveli danš l'ignorance est encore plus insensible qu'une pierre. C'est ainsi que la parole consolanté du prophète s'est accomplie : ‹ Dieu est assez puissant pour changer ces pierres en enfans ‹ d'Abraham. Voyez donc quelle est la puissance de cette nouvelle musique qui sait changer en hommes des animaux et des pierres, et qui ressuscite jusqu'aux morts.

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• Je dis qu'ils sont morts, parce qu'ils ont été privés de cette vie qui est la seule véritable. »

Clément sáisit cette occasion pour expliquer la cause qui a faitexécuter de si grandes choses à ce chant. C'est la même qui a donné de l'harmonie à l'univers, qui a appris aux élémens opposés à s'accorder entre eux; en un mot, c'est la parolè créatrice. Ce chant n'est donc pas nouveau. « Au commen• cement était le Verbe, et le Verbe était avec Dieu, et « Dieu était le Verbe. » En tant que le Verbe existait avant la Création, il était et il est la cause divine de toutes choses. Mais en tant qu'il a reçu le nom de Christ, prédit long-temps d'avance, il est nouveau. Jadis il nous a donné l'existence, car il était en Dieu; maintenant il nous a donné la vertu, car le Verbe s'est fait homme. Il est à la fois Dieu et homme, et par conséquent l'origine de tout ce qui est bon. C'est donc là le nouveau chant, l'apparition parmi nous du Verbe, qui existait depuis le commencement et avant le commencement. Le Sauveur, qui existait avant tout ce qui existe, à paru depuis peu; celui qui, comme Verbe, a paru dans ce qui est, a paru pour nous instruire. Le Verbe, qui dans l'originé, comme Créateur du monde, nous a formés, et qui, par son souffle, nous a donné la vie, s'est manifesté à nous comme docteur, pour nous apprendre à bien vivre, afin qu'un jour, comme Dieu, il puisse nous donner la vie éternelle.

Clément décrit ensuite les différentes manières dont, selon les temps, le Verbe s'est révélé aux hommes de diverses natures, et finit par indiquer les marques distinctives du paganisme et du Christianisme. Pour vous approcher de Dieu, dit-il, ne vous parez point de laurier, ne vous couronnez pas de bandeaux de pourpre; mais faites briller votre âme par la justice et efforéez-vous d'acquérir Jésus-Christ. II vous dit Je suis la porte. En effet, les portes de l'esprit absolu sont spirituelles (at 7p di rou Aoyou, mukŽI),

et c'est avec la clef de la foi qu'on les ouvre. Dieu ne reconnaît que le Fils et celui à qui le Fils le révèle. Mais celui qui ouvre la porte auparavant fermée, révèlera aussi ce qu'elle cache (c'est-à-dire que la foi est suivie de la science).

Clément passe ensuite à l'examen des mystères grecs, qui étaient censés devoir donner la connaissance des choses surhumaines. Il soulève le voile qui couvre ces mystères, dans lesquels il avait été lui-même initié et dont il fait connaître divers usages et coutumes jusqu'alors inconnus ; il montre que l'initiation à leurs rites n'apprenait rien de nouveau, ou du moins rien qui ne fût scandaleux et mauvais. Il passe en revue tous les dogmes du paganisme, toujours avec la plus profonde érudition; il en expose l'absurdité et l'immoralité, afin d'éloigner les hommes d'une religion si infâme.

L'auteur s'adresse après cela aux philosophes. Il avoue, tant à leur égard qu'à celui des poètes, qu'il appelle euxmêmes en témoignage de la doctrine de la révélation, qu'ils ont connu et dit de bonnes et d'excellentes choses, par le secours du Verbe de Dieu. Toutefois, ils sont souvent en contradiction les uns avec les autres, et c'est dans les livres des Hébreux qu'ils ont puisé tout ce qu'ils ont dit de meilleur. Or, comme tout ce que les savans païens offrent çà et là de bon, se trouve aussi dans les écrits des prophètes, lesquels, inspirés qu'ils étaient par un seul Dieu, sont tous parfaitement d'accord entre eux, Clément tire occasion de cette circonstance pour engager vivement les philosophes à adopter cette croyance. Il dépeint avec une grande force la vraie différence entre le Christianisme et le paganisme; les bénédictions qui accompagnent l'un, et les suites malheureuse de l'autre; la déraison du culte des idoles qui ravale l'homme au-dessous même de la bête, et la sublimité de la foi chrétienne qui élève les hommes jusqu'à Dieu. La foi en Jésus-Christ surpasse tout, Le Verbe étant descendu du

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