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si grande que les hommes sont contraints de se faire de certaines garnitures pour se mettre à l'abri de leurs entreprises (1). Selon M. Smith (2), les choses ne vont pas mieux dans les petits royaumes de Guinée. Il semble que, dans ces pays-là, les deux sexes perdent jusqu'à leurs propres lois.

CHAPITRE XI.

De la servitude domestique indépendante de la polygamie.

Ce n'est pas seulement la pluralité des femmes qui exige leur clôture dans de certains lieux d'Orient; c'est le climat. Ceux qui liront les horreurs, les crimes, les perfidies, les noirceurs, les poisons, les assassinats que la liberté des femmes fait faire à Goa, et dans les établissements des Portugais dans les Indes, où la religion ne permet qu'une femme, et

(1) Aux Maldives, les pères marient les filles à dix et onze ans, parce que c'est un grand péché, disent-ils, de leur laisser endurer nécessité d'hommes. (Voyage de François Pirard, Chapitre XII.) A Bantam, sitôt qu'une fille a treize ou quatorze ans, il faut la marier, si l'on ne veut qu'elle mène une vie débordée. ( Recueil des Voyages qui ont servi à l'établissement de la Compagnie des Indes, pag. 348.)

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(2) Voyage de Guinée, partie 11, page 192 de la traduction. « Quand les femmes, dit-il, rencontrent un homme » elles le saisissent, et le menacent de le dénoncer à leur » mari, s'il les méprise. Elles se glissent dans le lit d'un » homme, elles le réveillent; et, s'il les refuse, elles le >> menacent de se laisser prendre sur le fait. »

qui les compareront à l'innocence et à la pureté des mœurs des femmes de Turquie, de Perse, du Mogol, de la Chine et du Japon, verront bien qu'il est souvent aussi nécessaire de les séparer des hommes, lorsqu'on n'en a qu'une, que quand on en a plusieurs.

C'est le climat qui doit décider de ces choses. Que serviroit d'enfermer les femmes dans nos pays du Nord, où leurs mœurs sont naturellement bonnes; où toutes leurs passions sont calmes, peu actives, peu raffinées, où l'amour a sur le cœur un empire si réglé, que la moindre police suffit pour les conduire ?

Il est heureux de vivre dans ces climats qui permettent qu'on se communique; où le sexe qui a le plus d'agréments semble parer la société ; et où les femmes, se réservant aux plaisirs d'un seul, servent encore à l'amusement de tous.

CHAPITRE XII.

De la pudeur naturelle.

TOUTES les nations se sont également accordées à attacher du mépris à l'incontinence des femmes : c'est que la nature a parlé à toutes les nations. Elle a établi la défense, elle a établi l'attaque; et, ayant mis des deux côtés des désirs, elle a placé dans l'un la témérité, et dans l'autre la honte. Elle a donné aux individus, pour se conserver, de longs espaces de temps; et ne leur a donné, pour se perpétuer, des moments.

que

Il n'est done pas vrai que l'incontinence suive les lois de la nature; elle les viole au contraire: c'est la modestie et la retenue qui suivent ces lois.

D'ailleurs, il est de la nature des êtres intelligents de sentir leurs imperfections : la nature a donc mis en nous la pudeur, c'est-à-dire la honte de nos imperfections.

Quand donc la puissance physique de certains climats viole la loi naturelle des deux sexes et celle des êtres intelligents, c'est au législateur à faire des lois civiles qui forcent la nature du climat et rétablissent les lois primitives.

CHAPITRE XIII

De la jalousie.

Il faut bien distinguer, chez les peuples, la jalousie de passion d'avec la jalousie de coutume, de mœurs, de lois. L'une est une fièvre ardente qui dévore; l'autre, froide, mais quelquefois terrible, pour s'allier avec l'indifférence et le mépris.

L'une, qui est un abus de l'amour, tire sa naissance de l'amour même. L'autre tient uniquement aux mœurs, aux manières de la nation, aux lois du pays, à la morale, et quelquefois même à la religion. (1)

(1) Mahomet recommanda à ses sectateurs de garder leurs femmes; un certain iman dit, en mourant, la même chose; et Confucius n'a pas moins prêché cette doctrine.

Elle est presque toujours l'effet de la force physique du climat, et elle est le remède de cette force physique.

CHAPITRE XIV.

Du gouvernement de la maison en Orient.

ON change si souvent de femmes en Orient, qu'elles ne peuvent avoir le gouvernement domestique. On en charge donc les eunuques; on leur remet toutes les clefs, et ils ont la disposition des affaires de la maison.

« En Perse, dit M. Chardin, on donne aux femmes >> leurs habits, comme on feroit à des enfants. » Ainsi ce soin qui semble leur convenir si bien, ce soin, qui partout ailleurs est le premier de leurs soins, ne les regarde pas.

IL

CHAPITRE XV.

Du divorce et de la répudiation.

Il y a cette différence entre le divorce et la répudiation, que le divorce se fait par un consentement mutuel à l'occasion d'une incompatibilité mutuelle ; au lieu que la répudiation se fait par la volonté et pour l'avantage d'une des deux parties, indépendamment de la volonté et de l'avantage de l'autre.

Il est quelquefois si nécessaire aux femmes de répudier, et il leur est toujours si fâcheux de le faire, que la loi est dure, qui donne ce droit aux hommes sans le donner aux femmes. Un mari est

le maître de la maison; il a mille moyens de tenir ou de remettre ses femmes dans le devoir; et il semble que, dans ses mains, la répudiation ne soit qu'un nouvel abus de sa puissance. Mais une femme qui répudie n'exerce qu'un triste remède. C'est toujours un grand malheur pour elle d'être contrainte d'aller chercher un second mari, lorsqu'elle a perdu la plupart de ses agréments chez un autre. C'est un des avantages des charmes de la jeunesse dans les femmes, que, dans un âge avancé, un mari se porte à la bienveillance par le souvenir de ses plaisirs.

C'est donc une règle générale, que, dans tous les pays où la loi accorde aux hommes la faculté de répudier, elle doit aussi l'accorder aux femmes. Il y a plus dans les climats où les femmes vivent sous un esclavage domestique, il semble que la loi doive permettre aux femmes la répudiation, et aux maris seulement le divorce.

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Lorsque les femmes sont dans un sérail, le mari ne peut répudier pour cause d'incompatibilité de mœurs c'est la faute du mari, si les mœurs sont incompatibles.

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La répudiation pour raison de la stérilité de la femme ne sauroit avoir lieu que dans le cas d'une femme unique (1): lorsqu'on a plusieurs femmes cette raison n'est, pour le mari, d'aucune impor

tance.

(1) Cela ne signifie pas que la répudiation, pour raison de stérilité, soit permise dans le christianisme.

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