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démie Françoise, jusques audit nombre de quarante, à présent et à l'avenir, et leur avons accordé et accordons le droit de committimus de toutes leurs causes personnelles, possessoires et hypotéquaires, tant en dernandant qu'en défendant, pardevant nos amez et féaux conseillers les maîtres des requêtes ordinaires de notre hôtel ou les gens tenans les requêtes de notre palais à Paris, à leur choix et option, tout ainsi qu'en jouissent les officiers domestiques et commensaux de notre maison. Si donnons en mandement à nos amez et féaux conseillers les gens tenans notre cour de parlement à Paris, maîtres des requêtes ordinaires de notre hôtel, et à tous autres nos justiciers et officiers qu'il appartiendra, qu'ils fassent lire et registrer ces présentes, et jouir de toutes les choses qui y sont contenues, et de ce qui sera fait et ordonné par notredit cousin le cardinal duc de Richelieu, en conséquence et en vertu d'icelles, tous ceux qui ont déjà été nommez par lui ou qui le seront ci-après, jusqu'au nombre de quarante, et ceux aussi qui leur succéderont à l'avenir, pour tenir ladite Académie Françoise, faisant cesser tous troubles et empêchemens qui leur pourroient être donnez. Et pour ce que l'on pourra avoir affaire des présentes en divers lieux, nous voulons qu'à la copie collationnée par un de nos amez et féaux conseillers et secrétaires foi soit ajoutée comme à l'original. Mandons au premier notre huissier ou sergent sur ce requis de faire pour l'exécution d'icelles tous exploits nécessaires, sans demander autre permission; car tel est notre plaisir, nonobstant oppositions ou appellations quelconques, pour lesquelles nous ne voulons qu'il soit différé, dérogeant pour cet effet à tous édits, déclarations, arrêts, règlemens et autres lettres contraires aux présentes. Et afin

que ce soit chose ferme et stable à toujours, nous y avons fait mettre notre scel, sauf en autres choses notre droit et d'autrui en toutes. Donné à Paris au mois de janvier, l'an de grace 1635, et de notre règne le vingtcinquième. Signé Louis. Et sur le repli: Par le Roi, DE LOMÉNIE. Et scellées du grand sceau de cire verte, sur lacs de soie rouge et verte. »

On eût ajouté aux autres priviléges, et en apparence facilement obtenu l'exemption des tailles; mais parce que tous les académiciens d'alors en étoient exempts, ou par leur noblesse ou autrement, personne ne fut d'avis de la demander, de peur qu'il ne semblât en avoir besoin pour lui-même, et ils préférèrent un honneur assez imaginaire au solide et véritable intérêt de leurs

successeurs.

Il ne fut pas difficile de faire sceller ces lettres; monsieur le garde-des-sceaux avoit lui-même trop d'inclination à cette sorte d'exercice pour y apporter de la résistance; c'est pourquoi, dès que les députez lui en parlèrent, il leur donna toutes les bonnes paroles qu'ils pouvoient souhaiter. Un peu après même il fit dire à la compagnie, par monsieur de Cérisy, qu'il désiroit d'être compris dans le tableau des académiciens qu'on avait fait depuis peu. Vous verrez ailleurs comment cette proposition fut reçue; maintenant il vous suffit de savoir qu'il scella les lettres incontinent après, et qu'elles furent rapportées à l'Académie par monsieur de Cérisy le 29 janvier 1635.

Il ne restoit plus que deux choses pour l'entier établissement de ce corps: l'une, de faire autoriser ses statuts par le Cardinal, suivant le pouvoir que les lettres lui en donnoient; l'autre, de faire vérifier ces lettres au

parlement. La première fut fort aisée; la seconde, au contraire, accompagnée de beaucoup de difficultez et de longueurs. Pour faire autoriser les statuts au Cardinal, qui étoit alors à Ruel, on lui députa les trois officiers avec monsieur de Boisrobert. J'ai oui dire à monsieur Conrart, qui étoit de cette députation comme officier, et que vous reconnoîtrez, à mon avis, pour juste juge de choses semblables, qu'il n'avoit jamais oui mieux parler que fit le Cardinal en cette rencontre ; qu'il répondit à la harangue de monsieur de Serizay, le directeur, comme s'il l'eût vue longtemps auparavant et qu'il eût eu le loisir de se préparer sur tous les chefs et presque sur tous les mots qu'elle contenoit ; qu'il parla premièrement pour l'Académie en général, puis s'adressa aux quatre députez, et enfin à chacun d'eux à part, mais si à propos, avec tant de grace, de civilité, de majesté et de douceur, qu'il ravit en admiration tous ceux qui s'y rencontrèrent. Il se fit, au reste, laisser les statuts pour les voir, et les renvoya quelque temps après signez de sa main et contresignez par Charpentier, son secrétaire, et scellez de ses armes en placard. Mais il ne faut pas oublier que ce fut après y avoir fait changer une seule chose qui eût semblé être trop à son avantage et marquer en lui quelque vanité. L'article cinquième des statuts portoit « que chacun des académiciens promettoit de révérer la vertu et la mémoire de monseigneur leur protecteur. » Il désira que cet article fût ôté, et la compagnie ordonna qu'il·le seroit, pour obéir à Son Eminence, mais qu'il en seroit fait mention dans les regitres.

Je serois maintenant ennuyeux, sans doute, si j'entreprenois de vous raconter par le menu combien il fallut au contraire de temps et de peine pour faire vérifier

les lettres patentes au parlement. Après qu'elles eurent été signées en commandement par monsieur de Loménie, secrétaire d'Etat, qu'on appeloit alors monsieur de la Villeauclair et qui est aujourd'hui monsieur le comte de Brienne, à quoi on ne trouva point de difficultė, elles furent mises entre les mains de monsieur Hennequin de Bernay, conseiller en la grand'chambre, pour en faire le rapport. On ordonna diverses députations, tant à lui qu'à messieurs les gens du Roi et à monsieur le premier président le Jay; mais elles furent toutes inutiles. Et bien que pour donner plus de force aux sollicitations, après les deux premières, on eût résolu de ne les plus faire au nom de la compagnie, mais de la part de monsieur le Cardinal, qui le trouvoit bon ainsi, et qu'en son nom messieurs des Marests, de Bautru et de Boisrobert eussent été voir le premier président, il leur avoit donné peu d'espérance d'obtenir ce qu'ils désiroient. Cela fut cause que le Cardinal, sur la plainte qui lui en fut faite par monsieur de Boisrobert, de la part de la compagnie, écrivit au premier président la lettre suivante :

<< Monsieur,

» Je ne prends pas la plume pour vous représenter le mérite des personnes dont l'Académie Françoise, nouvellement établie à Paris, est composée, parce que, la pluspart ayant l'honneur d'être connues de vous, vous ne l'ignorez pas, à mon avis, mais bien pour vous conjurer de vouloir en cette considération, et de l'affection que je leur porte en général et en particulier, contribuer le pouvoir que vous avez dans votre parlement pour la vérification des priviléges qu'il a plu à Sa Majesté leur accorder à ma supplication, étant utiles et

nécessaires au public, et ayant un dessein tout autre que celui qu'on vous a pu faire croire jusqu'ici. Je ne doute point que vous n'apportiez en cette occasion, pour leur contentement, toute la facilité qu'il vous sera possible et qu'ils ont lieu de se promettre de ma recommandation envers vous, vous assurant qu'outre l'obligation que ces messieurs vous auront de la faveur que vous leur départirez en ce rencontre, je prendrai part à leur ressentiment pour vous témoigner le mien partout où j'aurai moyen de vous servir et de vous faire connoître par effet que je suis,

Monsieur,

Votre très affectionné serviteur, » Le CARD. De Richelieu.»>

Le 6 décembre 1635.

Une copie de cette lettre fut lue dans l'Académie, et parce que le procureur général avoit témoigné le désirer ainsi, on obtint encore trois lettres de cachet du Roi : l'une pour lui et pour les avocats généraux, l'autre pour le parlement, et la troisième pour le premier président le Jay. Le procureur général d'alors étoit ce grand homme à qui j'ai de très grandes obligations, monsieur Molé, maintenant garde-des-sceaux de France. Ces lettres étoient toutes écrites au même sens, et il suffit de vous en rapporter une pour faire connoître les

autres.

DE PAR LE ROI.

<< Nos amez et féaux, nous avons ci-devant, par lettres patentes en forme d'édit du mois de janvier dernier, voulu et ordonné être fait établissement d'une Acadé

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