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clair, brief et simple, sans aucune affectation de raisonnement.

J'en rapporterai seulement quelques-uns des principaux, passant par dessus les autres, dont il y en a plusieurs qui ont été ou changez expressément par une délibération de tout le corps, ou abrogez tacitement par l'usage, comme il est arrivé de tout temps et comme il arrivera sans cesse en toutes les sociétez humaines.

Par ces statuts, l'Académie doit avoir un sceau pour sceller en cire bleue tous les actes expédiez par son ordre. En ce sceau doit être gravée l'image de son instituteur, avec ces mots : « ARMAND, CARDINAL DUC DE Richelieu, protecteur de l'Académie Françoise, établie en l'an 1635. »

Elle doit avoir aussi son contre-sceau, où doit être représentée une couronne de laurier avec ces mots : A l'immortalité.

Elle doit avoir trois officiers, un directeur, un chancelier, un secrétaire, et, outre cela, un libraire.

La fonction du directeur est de présider aux assemblées, d'y faire garder le bon ordre, le plus exactement et le plus civilement qu'il peut, et comme il se doit entre personnes égales; ce qui est ainsi exprimé dans les statuts. Il doit recueillir les avis suivant le rang où les académiciens se trouvent fortuitement assis, commençant par celui qui est à sa main droite, et opinant luimême le dernier, après les deux autres officiers, comme ceux-là après tout le reste de l'assemblée.

La fonction du chancelier est de garder les sceaux et de sceller tous les actes expédiez par l'ordre de l'Académie.

La fonction du secrétaire est d'écrire les résolutions et d'en tenir regître, signer tous les actes, garder tous

les titres et tous les papiers de l'Académie, et expédier des certificats à ceux du corps qui ont besoin de justifier qu'ils en sont. Il doit aussi écrire les lettres de l'Académie; et, sur ce sujet, il faut remarquer en passant que l'Académie en fait de deux sortes: tantôt toute la compagnie parle dans la lettre, et alors on signe ainsi : « Vos très humbles serviteurs: CONRART, secrétaire de l'Académie Françoise; » tantôt il n'y a que le secrétaire qui parle de la part du corps, en cette forme ou quelque autre semblable : « L'Académie m'a ordonné de vous écrire; » et alors il signe de même que si c'étoit pour ses affaires particulières, excepté que, comme il écrit pour un corps, il est plus réservé aux termes de la souscription des lettres.

En l'absence du directeur le chancelier préside aux assemblées, et en l'absence de tous les deux, le secrétaire.

Le secrétaire est perpétuel et à vie, mais le directeur et le chancelier se doivent changer de deux mois en deux mois (1). On a prolongé pourtant quelquefois ce terme d'un commun consentement en diverses occasions; messieurs de Serizay et des Marests, qui furent les premiers dans ces deux charges, au commencement de l'Académie, les exercèrent jusqu'à son entier établissement, c'est-à-dire près de quatre ans, depuis le 13 mars 1634 jusques à l'onze janvier 1638, quoiqu'ils eussent, durant tout ce temps-là, prié fort souvent la compagnie de leur donner des successeurs. On ne trouve plus dans les regitres de prolongations si grandes, mais il y en a plusieurs autres moindres, comme de quatre mois, de six mois et d'un an entier.

(1) Peu de temps après la rédaction des statuts on ne changeait déjà plus, comme à présent, que tous les trois mois.

Le libraire de l'Académie est aussi perpétuel, quoiqu'il soit reçu avec cette condition : « Tant qu'il plaira à la compagnie, » qui signifie seulement qu'elle seroit en liberté d'en prendre un autre si bon lui sembloit. Sa charge est de se trouver aux assemblées de l'Académie le plus souvent qu'il peut, pour recevoir ses ordres, et d'imprimer ses ouvrages et ceux des particuliers académiciens qui auront été examinez par elle et à qui elle aura donné un certificat de son approbation. Le statut (dont on commence pourtant à se dispenser depuis peu) porte que c'est à ces ouvrages seulement qu'il est permis de mettre : « Par un tel, de l'Académie Françoise, » et qu'ils ne peuvent être imprimez par autre libraire que celui-là, qui est obligé de n'y rien changer après l'approbation de l'Académie, à laquelle, pour cet effet, il prête serment lorsqu'il est reçu en cette charge.

Le directeur et le chancelier doivent être élus par sort en cette forme. On prend autant de ballottes blanches qu'il y a d'académiciens à Paris, entre lesquelles il y en a deux, dont l'une est marquée de deux points noirs et l'autre d'un seul; toutes ces ballottes ensemble sont mises dans une boëte; chacun des académiciens présens en prend une; on en prend aussi pour tous les autres qui sont à Paris, encore qu'ils ne soient pas alors dans l'assemblée. Celui qui trouve la ballotte marquée du point noir est directeur; celui qui trouve la ballotte marquée de deux points noirs est chancelier.

Que si le sort tombe sur le secrétaire pour l'une de ces charges, il peut la remplir, comme je le trouve dans les regîtres, et elle n'est pas incompatible avec la sienne.

On a remarqué, comme un caprice de la fortune, que, depuis le commencement de l'Académie jusques à

maintenant, monsieur Chapelain, qui est sans doute des plus considérables de la compagnie, ne s'est jamais trouvé directeur ni chancelier.

Quant à la charge de secrétaire, on n'y peut parvenir que par les suffrages des académiciens assemblez au nombre de vingt pour le moins.

Le même nombre de vingt est nécessaire pour élire ou pour destituer un académicien (1). Ces élections et destitutions se font par ballottes blanches et noires. Pour élire, il faut que le nombre des blanches passe de quatre celui des noires; pour destituer, il faut que celui des noires passe de quatre celui des blanches.

Il y a un article par lequel personne ne peut être élu qu'il ne soit agréable au protecteur; voilà pourquoi, quand il y a une place vacante dans l'Académie, on y procède en cette sorte. Le directeur d'ordinaire, ou quelque autre des académiciens, propose celui qui se présente pour la remplir, ou, s'il y en a plusieurs, on les propose tous ensemble (2); ensuite, on charge quelqu'un de la compagnie de savoir si le protecteur agrée qu'on délibère sur la réception de cette personne ou de

(1) Dans certaines conjonctures, comme dans des temps de vacations, lorsqu'il n'est presque pas possible qu'on se trouve vingt académiciens, l'usage est qu'une élection se puisse faire à dixhuit, pourvu, néanmoins, que des dix-huit présens il n'y en ait pas un seul qui réclame pour la loi, c'est-à-dire qui demande que l'élection soit renvoyée à un autre jour où il y ait espérance d'être vingt.

Que si l'on ne se trouve pas vingt à la seconde convocation, cependant on ne laisse pas d'élire, quelque nombre que l'on soit. (Note de l'abbé d'Olivet.) (2) L'usage d'opiner de vive voix sur les élections cessa dès 1634, à la réception de monsieur Laugier.

(Note de l'abbé d'Olivet.)

ces personnes, et après qu'il a donné son consentement on fait l'élection par les ballottes, à la première assemblée. Je trouve dans le regître que les académiciens qui sont dans Paris, et qui sont malades, peuvent envoyer leur suffrage par écrit à la compagnie (1).

Quand un académicien est reçu, on doit lui faire lecture des statuts, qu'il est exhorté de garder, et lui faire signer sur le regître (2) l'acte de sa réception.

Hors de ces élections et en toutes les autres choses, les avis se doivent dire tout haut, et il est porté que ce

(1) Aujourd'hui, et depuis un temps immémorial, cet usage est abrogé. Il faut, pour pouvoir donner son suffrage, être présent à l'assemblée dans le temps que l'on procède à l'élection.

On y procède ainsi : chaque académicien apporte un billet où il a écrit le nom de celui qu'il juge à propos d'élire. Tous les billets sont mis entre les mains du directeur et des officiers, lesquels, avec l'un de la compagnie qui aura été tiré au sort, ouvrent ces billets hors du lieu de l'assemblée, examinent pour qui est la pluralité des suffrages, le déclarent ensuite à la compagnie, et tiennent secrets les noms des concurrens qui ont eu moins de voix pour eux.

Que si l'un des trois officiers n'étoit pas présent à l'assemblée, on tire au sort, non pas un seul académicien, mais deux, pour assister à l'ouverture des billets, en sorte qu'il y ait toujours quatre témoins qui autorisent le rapport fait à la compagnie.

(Note de l'abbé d'Olivet.)

(2) Aujourd'hui, en conséquence d'une délibération du 2 janvier 1721, tout académicien nouvellement reçu doit signer sur le regître « qu'il promet sur son honneur de n'avoir aucun égard pour les sollicitations, de quelque nature qu'elles puissent être; qu'il n'engagera jamais sa parole et conservera son suffrage libre, pour ne le donner, le jour d'une élection, qu'à celui qui lui en paroîtra le plus digne. » Et il est dit qu'en ce cas la signature d'un académicien lui tiendra lieu de serment.

(Note de l'abbé d'Olivet.)

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