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présentes en nostre cour de parlement de Paris en première instance et dernier ressort, l'avons interdite et interdissons à tous autres juges quelconques, à peine de nullité des procédures, despens, dommages et interests, et de deux mil livres d'amende aux parties qui procéderont ailleurs. Voulons que, nonobstant tous procez et différends qui pourroient estre intentez contre lesdits Bouterque et Guyon, empeschemens, oppositions ou appellations quelconques, ils travaillent sans discontinuation à la perfection dudit canal. Nous leur avons permis et permettons, autant que besoin est ou seroit, d'associer avec eux des personnes de toutes qualitez et conditions, ecclésiastiques, gentilshommes et officiers de nos cours de parlement, chambre des comptes et autres, pour contribuer à la construction dudit canal et perfection de tous lesdits ouvrages, et jouir aussi de tout ce que dessus, eux, leurs hoirs, successeurs et ayans-cause, à perpétuité, ainsi que lesdits Bouteroue et Guyon, sans qu'il leur puisse estre imputé de déroger à leurs qualitez et naissances. Et mettant en considération le service que lesdits Bouteroue et Guyon rendront au public, faisans réussir un dessein si utile à nostre bonne ville de Paris et plusieurs provinces de ce royaume, nous les avons annoblis et annoblissons; voulons qu'eux et leurs enfans nais et à naistre jouyssent de tous priviléges de noblesse; et déclarons en outre que, pour leur donner moyen de vacquer d'autant plus facilement à la conduite de l'ouvrage dudit canal, sans estre divertis par les contraintes qui pourroient estre exercées contre eux pour le payement des taxes qui seroient faites sur leurs offices de receveur des aydes et tailles, et payeurs des rentes des eslections de Beaugency et Montargis, que nostre intention est qu'ils

soient et demeurent deschargez, comme par ces présentes nous les deschargeons, de toutes taxes que l'on pourroit faire cy-après sur leursdits offices ou personnes, soit pour recherches, prests, emprunts, subsistances, attribution de gages, taxations et droicts, suplément d'iceux, ou autrement; et en cas de suppression ou réduction de droicts attribuez ausdits offices, en tout ou partie, qu'ils en seront aussi exempts; continueront leur exercice et jouyront à l'advenir de pareille somme par chacun an que celle à laquelle se montent leurs gages et droits en la présente année. Leur accordons aussi la survivance desdits offices, lesquels ils pourront résigner sans payer aucun quart ou huictiesme denier; comme aussi nous voulons que leurs résignataires, pour une fois seulement, jouyssent d'iceux offices avec semblables exemptions de taxes, prests, emprunts et autres priviléges; le tout après qu'ils auront rendu quatre lieues de longueur dudit canal en si bon estat qu'il puisse porter de grands batteaux chargez de marchandises, et non plus tost. Et si dans lesdites quatre années ils ne rendent ledit canal navigable de Loire en Seine, ils seront décheus de tous lesdits priviléges, exemptions, et contraints de financer les sommes ausquelles leursdits offices auront esté taxez, lesquels demeureront spécialement affectez et hypothéquez au payement d'icelles. Si donnons en mandement à nos amez et féaux conseillers les gens tenant nostre cour de parlement, chambre des comptes, cour des aydes à Paris, trésoriers généraux de France au bureau de nos finances de Paris et Orléans, que ces présentes ils ayent à vérifier et registrer purement et simplement, sans aucune restrinction ny modification, et de tout le contenu en icelles faire, souffrir et laisser jouir lesdits BouII SÉRIE, T. VI. 18

teroue et Guyon, leurs hoirs, successeurs et ayans cause à perpétuité, faisant cesser tous troubles et empeschemens au contraire; car tel est nostre plaisir, nonobstant tous édicts, arrests, coustumes et autres choses à ce contraires, ausquelles nous avons dérogé et dérogeons par ces présentes, et aux dérogatoires y contenues, sauf en autre chose nostre droict, et l'autruy en toutes. Et afin que ce soit chose ferme et stable à tousjours, nous avons fait mettre nostre scel à cesdites présentes. Donné à Saint-Germain-en-Laye, au mois de septembre, l'an de grace 1638, et de nostre règne le vingt-neufiesme. Signé, Louis; et plus bas : Par le Roy, de LoMENIE; et à costé, visa; et scellé du grand sceau en cire verte, sur lacs de soye.

ESTABLISSEMENT

DES

GRANDS-JOURS A POICTIERS.

1634.

AVERTISSEMENT.

De l'antique usage des rois de la première et de la seconde race d'envoyer dans les provinces éloignées des délégués (missi dominici) chargés d'informer de la conduite des ducs et des comtes, et des abus qui pouvaient se glisser dans l'administration de la justice, etc., est sortie, selon toute apparence, l'institution des Grands-Jours ou hauts-jours; c'était, comme on sait, une espèce d'assise extraordinaire ou plutôt une commission pour juger en dernier ressort les affaires des provinces qui échappaient par l'éloignement à la surveillance immédiate du Roi. Les GrandsJours les plus anciens qui aient porté ce nom sont ceux que les comtes de Champagne tenaient à Troyes, et ce fut à l'instar de ceux-ci que les assemblées pareilles qui se tenaient au nom du Roi furent aussi nommées Grands-Jours. La séance même du parlement, lorsqu'il était encore ambulatoire, était nommée GrandsJours. Les parlements de Toulouse, de Bordeaux, de Bretagne et quelques autres tenaient leurs Grands-Jours; mais depuis que les parlements ont été rendus sédentaires, les Grands-Jours n'ont plus été qu'une commission d'un certain nombre de juges du parlement, pour juger en dernier ressort toutes les affaires civiles et criminelles en première instance.

Les derniers Grands-Jours sont ceux qui furent tenus en 1666, à Clermont en Auvergne et au Puy-en-Velai pour le Languedoc. Le document que nous donnons ici sur les Grands-Jours tenus à Poitiers en 1634, autant par la nature des arrêts qu'il relate que parce qu'il est éminemment propre à faire connaître la valeur, l'esprit, le but d'une institution disparue de nos mœurs depuis près de deux siècles, nous a paru mériter l'intérêt du lecteur.

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