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Le Roy tient à ses gages environ deux cens quarante cornettes de cavalerie, distribuées en cinquante-six rẻgimens, outre les estrangers, qui sont au nombre de douze; le baron de Degenfeld estoit colonel de la cavalerie estrangère, mais depuis sa retraite il n'y en a point eu.

Le Roy a deux cens dix régimens d'infanterie, tous sous le commandement du duc d'Espernon, qui en est colonel général; une bonne partie de ces régimens sont composez de trente compagnies, et chaque compagnie payée à quatre-vingt-dix hommes, excepté celuy des gardes, dont les compagnies sont de deux cens hommes; ce régiment a pour maistre-de-camp monsieur le mareschal de Grammont.

Outre cela le Roy a quelques régimens estrangers à son service, qui sont : Allemands, Escossois, Irlandois, Italiens, Liégois et autres, particulièrement des Suisses, dont il y a six à sept mille en France. Leur colonel général estoit cy-devant monsieur de Bassompierre qui est mort, et maintenant c'est monsieur le mareschal de Schomberg. Il y a aussi un colonel général des Corses, qui est le fils du deffunct mareschal d'Ornano, quoyqu'il n'y ait point de Corses au service du Roy.

L'armée navale a esté commandée par le duc de Richelieu, fils du baron de Pontcourlay, général des galères depuis la mort du duc de Fronsac, admiral de France. Elle est composée d'environ trente vaisseaux ronds et de vingt-cinq galères.

Pour payer cette soldatesque il y a plusieurs sortes de fonds : l'un pour celle qui est tousjours entretenue et est payée par les trésoriers de l'ordinaire des guerres, et l'autre pour celle qui est payée par les trésoriers de l'extraordinaire des guerres. Les gens-d'armes suisses et

régiment des gardes ont chacun leurs trésoriers et payes particulières, qui en ont encore d'autres sous eux, qui payent le roolle que les commissaires et controolleurs des guerres leur fournissent, signent et vérifient de leurs mains, et selon la reveue qu'ils en ont faicte. L'armée navale et l'équippement des vaisseaux, tant de ladicte armée navale que des frégates garde-costes, sont payez par les trésoriers de la marine.

Le troisiesme membre de l'Estat, dont il reste à traicter, comprend tout ce qui n'est pas noble ny d'Eglise, sçavoir la justice et la police.

La justice est une des plus particulières marques des Roys de France, qui affectent d'estre représentez partout, en leurs sceaux et ailleurs, dans leur lict de justice, le sceptre à la main, au lieu que les autres Roys et princes se font représenter à cheval et armez, ou en quelqu'autre posture.

Autrefois la justice estoit administrée par les Roys mesmes, qui la rendoient en personnes à leurs peuples; mais ne s'adonnans qu'aux affaires d'Estat, ils establirent pour cet effect certains conseils qu'on appelloit parlemens; et enfin le Roy Philippe-le-Bel establit le palais de Paris, où il ordonna un certain nombre de conseillers, qui connoistroient des affaires civiles et criminelles entre les particuliers, en deux temps qu'ils tiendroient tous les ans en sa présence, sçavoir : à Noël et à la Chandeleur, où se trouvoient tous les pairs de France, tant séculiers qu'ecclésiastiques. Quand le parlement de Paris fut faict sédentaire (car auparavant il suivoit le Roy en tous ses voyages), il fut distingué en deux chambres, dont l'une s'appelloit la grand'chambre, et l'autre la chambre des enquestes, qui n'estoit pas de si grande importance que l'autre.

Aujourd'huy le parlement de Paris est composé de la grand'chambre, composée de vingt-cinq conseillers, qui prend connoissance des plus grandes affaires, et de cinq chambres des enquestes, ayant aussi chacune environ pareil nombre de conseillers, et en outre de deux chambres, dont l'une est appellée la Tournelle, qui connoist seulement des affaires criminelles, et est ainsi appellée parce qu'elle est composée de deux conseillers de la grand'chambre et de deux de chaque chambre des enquestes, qui y vont tour à tour chacun de trois mois en trois mois, et de la chambre de l'Edict, qui prend connoissance des affaires de ceux de la religion, et est aussi composée de deux conseillers de chacune des six autres chambres, nommez de deux en deux ans par monsieur le chancelier et par le député général de ceux de la religion, en vertu de l'édict de Nantes.

En toutes ces chambres il y a des présidens, sçavoir : à la grand'chambre, à celle de la Tournelle et à celle de l'Edict.

Les présidens, qu'on appelle présidens au mortier, représentent les anciens ducs et pairs. Ils ont une fourrure d'hermine autour du col et un bonnet de velours doublé de la mesme fourrure en teste, et c'est ce bonnet qu'on appelle mortier.

Ces présidens sont au nombre de sept, sçavoir: Monsieur de Mollé, premier président, cy-devant procureur général ;

Monsieur de Mesmes, frère aisné de monsieur d'Avaux;

Monsieur le Bailleul, qui a esté cy-devant surintendant des finances

Monsieur de Coigneux, cy-devant chancelier de monsieur le duc d'Orléans;

Monsieur de Maisons, cy-devant président à la cour des aydes;

Monsieur de Bellièvre, cy-devant ambassadeur en Angleterre et petit-fils du chancelier du mesme nom;

Monsieur de Novion, qui a succédé à monsieur de Novion son père, qui estoit frère de l'évesque de Bauvais.

On avoit créé une huictiesme charge de président au mortier en faveur de deffunct monsieur de Buillon, surintendant des finances, mais elle a esté supprimée après sa mort, en donnant à son fils quelque récompense, quoyque beaucoup esloignée du prix de ces charges qui se vendent à présent un million.

Ces présidens sont conseillers d'Estat dès le jour de leur réception; de sorte que, quand ils veulent quitter leurs charges pour entrer dans le conseil d'Estat, ils y prennent place selon le temps qu'il y a qu'ils ont esté receus en leurs charges de présidens.

Il y en a quatre qui président à la grand'chambre, un à la chambre de l'Edict et deux à la Tournelle.

A chaque chambre des enquestes il y a aussi deux présidens, mais ce ne sont que conseillers qui ont accepté cette commission, et n'ont aucun rang dans le parlement, quand ils sont assemblez en corps, que celuy qui leur est deu parmy les conseillers, selon le jour de leur réception.

Outre les présidens et conseillers il y a encore au parlement un procureur général du Roy et deux advocats généraux, qui interviennent en toutes les causes où le Roy et le public ont intérest.

Le nombre des advocats du parlement est incertain; mais celuy des procureurs a esté depuis cinq ans réduit à six cens, qui ont payé quinze cens livres chacun de finances au Roy.

II SÉRIE, T. VI.

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Il y a outre cela un greffier en chef, qui est monsieur du Tillet, dont les prédécesseurs possèdent depuis trois cens ans cette charge, qui est une des plus profitables de toute la France. Les commis au greffe, tant civil que criminel, sont en très grand nombre et acheptent aussi leurs offices, comme aussi les huissiers de la cour.

Tous les officiers du parlement sont habillez d'une mesme façon, sçavoir d'une soutane et grande robbe, et d'un bonnet quarré. Les présidens au mortier, quand ils donnent audience, et les conseillers, quand ils marchent en cérémonie ou s'assemblent pour les affaires publiques, en la présence du Roy, comme aussi aux prononciations qui se font d'arrests solennels, sont vestus de robbes d'escarlatte, avec des paremens de velours noir.

Ces prononciations d'arrests solennels se font quatre fois l'année, sçavoir : la surveille de Noël, le mardy devant Pasques, la surveille de la Pentecoste, et le septiesme de septembre.

Le Roy envoye tous les ans nouvelle commission au parlement, en vertu de laquelle l'ouverture s'en fait le lendemain de Sainct-Martin et continue jusques au septiesme de septembre.

Ce que nous avons dit du parlement de Paris doit aussi estre entendu de tous les autres, qui sont : Toulouse, Rouen, Bourdeaux, Dijon, Grenoble, Aix, Rennes, Pau, Mets,

Excepté que le parlement de Mets est semestre, c'està-dire que la moitié des présidens et conseillers ne servent que six mois, et l'autre moitié les autres six mois.

Le parlement de Rouen a aussi esté fait semestre depuis peu, et à présent ne l'est plus.