THOMAS DIAFOIRUS. Dico que le pouls de monsieur est le pouls d'un homme qui ne se porte point bien. M. DIAFOIRUS. Bon. THOMAS DIAFOIRUS. Qu'il est duriuscule, pour ne pas dire dur. Ce qui marque une intempérie dans le parenchyme splénique, c'est-à-dire, la rate. M. DIAFOIRUS. Fort bien. ARGAN. Non: monsieur Purgon dit que c'est mon foie qui est malade. M. DIAFOIRUS. Eh! oui: qui dit parenchyme, dit l'un et l'autre, à cause de l'étroite sympathie qu'ils ont ensemble par le moyen du vas brève du pylore, et souvent des meats cholidoques. Il vous ordonne sans doute de manger force rôti ?: ARGAN. Non; rien qué du bouilli. M. DIAFOIRUS. Eh oui: rôti, bouilli, même chose. Il vous ordonne fort prudemment, et vous ne pouvez être en de meilleures mains. ARGAN. Monsieur, combien est-ce qu'il faut mettre de grains de sel dans un œuf? M. DIAFOIRUS. Six, huit, dix, par les nombres pairs, comme dans les médicamens par les nombres impairs. ARGAN. Jusqu'au revoir, monsieur. SCENE X. BELINE, ARGAN. Beline. Je viens, mon fils, avant que de sortir, vous donner avis d'une chose à laquelle il faut que vous preniez garde. En passant pardevant la chambre d'Angélique, j'ai vu un jeune homme avec elle, qui s'est sauvé d'abord qu'il m'a vue. ARGAN. Un jeune homme avec ma fille ? BELINE. Oui. Votre petite fille Louison étoit avec eux, qui pourra vous en dire des nouvelles. ARGAN. Envoyez-la ici, m'amour; envoyez-la ici. Ah! l'effrontée! (seul.) Je ne m'étonne plus de sa résistance. Qu'est-ce que vous me voulez, mon papa? Ma bellemaman m'a dit que vous me demandez. ARGAN. Oui, venez-çà; avancez-là. Tournez-vous. Levez les yeux. Regardez-moi. Hé? Je vous dirai, si vous voulez, pour vous désennuyer, le conte de peau-d'âne, ou bien la fable du corbeau et du renard, qu'on m'a apprise depuis peu. Ah, rusée! vous savez bien ce que je veux dire! Ne vous ai-je pas recommandé de me venir dire d'abord tout ce que vous voyez ? LOUISON. Oui, mon papa. ARGAN. L'avez-vous fait ? LOUISON. Oui, mon papa. Je vous suis venu dire tout ce que j'ai vu. ARGAN. Et n'avez-vous rien vu aujourd'hui ? LOUISON. Non, mon papa. Oh ça! je m'en vais vous faire voir quelque chose, moi. LOUISON voyant une poignée de verges qu'Argan a été prendre. Ah! mon papa! ARGAN. Ah! ah! petite masque, vous ne me dites pas que vous avez vu un homme dans la chambre de votre sœur! ARGAN prenant Louison par le bras. Voici qui vous apprendra à mentir. LOUISON se jetant à genoux. Ah! mon papa, je vous demande pardon! C'est que ma sœur m'avoit dit de ne pas vous le dire; mais je m'en vais vous dire tout. ARGAN. Il faut premièrement que vous ayez le fouet pour avoir menti. Puis après nous verrons au reste. Pardon, mon papa! LOUISON. |