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vement les chrétiens purifiés par le baptême, et les

païens muets et stupides! rapprochement qui ne laisse pas d'étonner. Les grandes baleines, ce sont les apôtres Paul, Pierre, etc. 13.

Comme preuves nouvelles de la fécondité du Saint-Esprit, nous trouvons que les trois premiers jours de la création, antérieurs, comme on sait, à la naissance du soleil, de la lune et des étoiles, représentent les trois époques qui ont précédé l'apparition du Christianisme, l'époque adamique, l'époque noachique et l'époque mosaïque. Le quatrième jour symbolise les quatre Évangiles; les quatre espèces de terrains dans la parabole du Semeur figurent les quatre extrémités de la croix, etc.

L'érudition d'Anastase, relativement aux animaux et en particulier à l'influence qu'exercent sur eux les phases de la lune, surpasse toute imagination. L'ibis, par exemple, à l'époque de la nouvelle lune, ferme les yeux et jeûne. La prunelle des yeux du singe s'agrandit dans la période de l'accroissement de la lune, et se resserre dans la période contraire. Dans la première de ces périodes, la pierre dite lychnis qu'on trouve dans l'Hystaspe fait entendre un « son modulé », et le poisson nommé clopias, vivant dans un fleuve de la Gaule, blanchit, tandis que dans la seconde période il devient noir.

Anastase est plus instruit encore que Basile des mystères de la reproduction des animaux. Celui-ci ne parlait que de l'union de la murène et de la vipère. Anastase assure que la tortue féconde l'anguille! Et il trouve dans ce fait monstrueux une image repoussante des relations entre les hérétiques et le diable! 14

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Rien n'est moins nettement tranché que les périodes de l'histoire. Si elles distinguent des groupes de faits qui présentent certains caractères différentiels, elles ne sauraient marquer exacte

ment le moment où l'une finit et où l'autre commence. Les périodes historiques sont comparables aux saisons. Le calendrier indique une limite précise entre l'hiver et le printemps. Mais la nature offre en hiver déjà des phénomènes printaniers, comme elle montre encore au printemps des retours hivernaux. Il en est de même des faits qui signalent la marche de l'esprit humain. Pris dans leur ensemble, ils se présentent avec des caractères distinctifs dans leurs périodes successives, mais ces caractères et précèdent et dépassent toujours les limites de ces périodes. Ainsi la période de la prédominance du système cosmographique de la Bible nous offre quelques adhérents au système de Ptolémée, avant que ce système ait été admis dans les Églises d'Orient et d'Occident. Nous avons vu (p. 241) Jean Philopon s'y rattacher dès le sixième siècle. Vers la même époque, parut, en grec, sous le pseudonyme de Denys l'Aréopagite, un recueil de traités mystiques, où le Néoplatonisme s'allie au Christianisme, et où l'on trouve une théorie du ciel chrétien 1. Au siècle suivant, Maxime le Confesseur commente ces traités qui, depuis lors, jouirent d'un immense crédit, surtout en Occident, où, sur l'ordre de Charles le Chauve (840-877), ils furent traduits en latin, et annotés par Jean Scot Erigène.

Denys l'Areopagite et son commentateur Maxime admettent tous deux la cosmologie et les sphères de Ptolémée. Enfin Jean de Damas assigne à ces dernières, bien qu'en hésitant, une place dans le système orthodoxe de l'Église grecque.

Si l'Occident, pour les questions de dogme, s'est montré, durant cette période, le simple écho de l'Orient, on y trouve la théorie d'Aristote plus promptement et plus franchement accueillie. C'est qu'on y était mieux préparé à la comprendre. Plus de deux siècles avant Ptolémée, Cicéron, dans la fiction brillante intititulée le « Songe de Scipion» et dans ses « Questions académiques », avait non seulement proclamé la réalité des sphères célestes d'Aristote 2, mais encore affirmé l'existence des antipodes 3. Dans le courant du cinquième siècle, peu après que cette dernière « hypothèse » eût été combattue par Augustin, le philo

sophe Macrobe 4 écrivit un commentaire sur le Songe de Scipion 5, où il se montre partisan décidé du système de Ptolémée. Un demisiècle plus tard, l'Africain Marcien Capella publiait un abrégé d'encyclopédie intitulé le Satiricon, composé de neuf livres, dont les sept derniers traitent des sept « arts libéraux », la grammaire, la dialectique, la rhétorique, la géométrie, l'arithmétique, l'astronomie et la musique. Cet ouvrage, accueilli avec empressement par le savant Cassiodore qui d'homme d'État s'était fait moine, vers

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550, et avait construit un couvent dans ses propriétés de la Calabre

répandit, en même temps que la classification des arts libéraux, les idées de Ptolémée. L'évêque Isidore, qui occupa pendant trentecinq ans le siége de Séville (601-636) et qui fut le polygraphe le plus érudit de son siècle, exposa son savoir astronomique dans deux ouvrages qui sont de véritables encyclopédies : le livre «< Sur la nature des choses » et celui des Origines ou « Étymologies ». Le premier, qui traite surtout de la cosmographie, trahit l'influence de Macrobe et de Capella. Outre la division des jours, des mois et des années, les révolutions et les éclipses du soleil et de la lune, etc., il fait connaître les sept sphères planétaires, que nous reproduisons ci-dessus, d'après une des planches de son livre 7.

C'est sur les travaux d'Isidore que s'appuie le pieux et savant moine du couvent de Jarrow, Bède-le-Vénérable, le Père le plus distingué de l'Église anglo-saxonne (672-735). Il suit les traces du prélat espagnol, et publie à son tour un traité « Sur la nature des choses ». Mais il dépasse son modèle dans son Commentaire sur les vingt premiers chapitres de la Genèse.

Cet ouvrage, où la théorie de l'Almageste est adoptée sans hésitation, signale en Occident la reconnaissance officielle du système de Ptolémée.

L'Église catholique ne repousse plus une théorie qu'elle avait combattue, tant qu'elle la croyait erronée. Elle ne se laisse pas arrêter par la considération puérile que cette théorie est un legs du paganisme. La science l'a proclamée vraie, la raison l'a adoptée. L'Église s'incline devant leur jugement. Et le monde ne s'est pas effondré, et le genre humain n'a point péri!

L'Église pouvait se couvrir de son infaillibilité, et rester sourde à la voix de la raison et de la science. Elle pouvait, continuant à s'appuyer sur l'Écriture, s'obstiner à combattre un système qui lui était si manifestement contraire. En acceptant franchement la conception grecque du Cosmos, elle croit rendre hommage à la vérité. C'est un acte de bonne foi et de sincérité, trop rare pour ne pas inspirer le respect. En l'accomplissant, l'Église s'est montrée vraiment grande, vraiment digne d'être l'institutrice de l'humanité.

Ce précédent si honorable pour elle, pourquoi l'Église l'a-t-elle oublié? Quelle autre figure elle ferait aujourd'hui dans le monde, si elle en avait gardé le souvenir, et qu'au seizième siècle, elle eût ouvert au système de Copernic, les portes qu'au huitième elle avait ouvertes à celui de Ptolémée !

Depuis cette dernière date, les idées cosmographiques des Hébreux restent à l'arrière-plan, et ne sont plus professées que par des hommes, même érudits, chez qui les préjugés l'emportent sur la réflexions, ou par les innombrables membres de l'Église, dépourvus de l'instruction ou de l'intelligence nécessaire pour s'élever à des conceptions plus justes 9.

Aux yeux de ces derniers, le monde continue à se composer de

trois parties principales :

le ciel, résidence de Dieu, du Christ, de la Vierge, etc.;

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la terre, habitation des hommes;

et l'enfer, lieu de punition des méchants.

La figure ci-dessus représente cette conception populaire, à la fois cosmographique et religieuse du monde. Nous en devons le dessin à un membre de l'Église romaine 10.

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