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avec succès, d'abord en 1717, par Belin, et de nos jours, sous le titre de Roxelane, par M. de Maison-Neuve. La pièce de Belin n'avait pu se soutenir, à cause de l'extrême faiblesse de la diction, et surtout à cause de l'infériorité des deux derniers actes, beaucoup moins bien conçus que les premiers. Celle du jeune auteur qui vint après Belin et Chamfort a été long-temps applaudie et suivie dans la nouveauté. J'ignore pourquoi l'auteur n'a pas jugé à propos de l'imprimer; et si elle n'a pas été reprise, c'est apparemment par les mêmes raisons qui, depuis la révolution, écartent de la scène tant d'autres ouvrages, grâces à l'inquisition si dignement républicaine, qui est encore un des caractères de notre liberté. Quoi qu'il en soit, cette heureuse tentative de l'auteur de Roxelane, jouée peu d'années après la pièce de Chamfort, démontrait assez combien celle-ci était déjà oubliée; et la destinée de Mustapha avait fait voir que la plus éclatante faveur ne peut défendre long-temps un mauvais ouvrage contre l'opinion publique. Aussi puissamment protégé par la cour que l'avait été le Catilina, il ne put même, comme celui-ci, faire un moment d'illusion sur la scène. Il avait reçu à Versailles des applaudissemens concertés; à Paris, il fut trèsfroidement accueilli le premier jour, et abandonné le second. Ce drame, de la plus mortelle froideur, sans action, sans intérêt, sans conduite

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sans caractères, sans situations, se traîna quelque temps dans la solitude, et tomba enfin du poids de l'ennui jamais il n'a reparu. L'auteur avait annoncé tout haut qu'il consentait à être jugé sur ce drame, et avec d'autant plus de raison qu'il y avait travaillé quinze ans. On y reconnut unanimement l'absence totale du génie tragique. Mais apparemment les amis de l'auteur s'imaginèrent que personne en France ne se connaissait plus en vers, car ils imprimèrent que le style de Mustapha était celui de Racine. La vérité est que la versification est en général pure et correcte, mais sans aucune espèce de force poétique et dramatique ce n'est pas plus le style de la tragédie que ce n'en est l'esprit. Tout est glacé dans cette composition, qui est aujourd'hui dans un aussi profond oubli que les pièces jouées avant Corneille.

Chamfort, dégoûté du théâtre, ou plutôt du public, travailla quelques petits contes qu'on a recueillis après sa mort. Hors deux ou trois, qui même sont plutôt des épigrammes que

des contes,

on ne trouve dans les autres qu'une gaieté pénible, une diction entortillée, une recherche fatigante de ce qu'on appelle du trait, des idées décousues, du jargon, de l'obscurité, du mauvais goût: en un mot, tout ce qu'il y a de plus opposé à ce genre de poésie, c'est-à-dire, tous les efforts possibles de l'esprit dans ce qui n'en doit être que le jeu et la saillie.

Nous verrons ailleurs, dans les écrits posthumes de Chamfort, comment il peut être classé dans la philosophie moderne. Ses Éloges de Molière et de La Fontaine sont d'un écrivain très-ingénieux, mais qui a plus de critique et de goût que d'éloquence. En total, rien de ce qu'il a fait n'appartient ni à l'éloquence ni à la poésie : ce fut un homme de beaucoup d'esprit, bien plus qu'un homme de talent; il n'en avait montré que le germe dans sa Jeune Indienne, et ce germe avorta. Ce n'est pas ici le lieu de relever tout ce qu'il y a d'erreurs, de bévues et de faussetés dans la notice historique qu'on a jointe à l'édition de ses OEuvres. C'est la suite naturelle de cette partialité ouverte qui tient aux événemens d'une révolution dont il devint la victime dès qu'il cessa d'en être l'apôtre; et, sous ce point de vue, ce n'est pas ici que le malheureux Chamfort et son éditeur doivent être appréciés.

FIN DU TOME DOUZIEME.

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CHAP. IV. Des Tragiques d'un ordre inférieur. .
SECTION PREMIÈRE. Théâtre de Crébillon.
SECT. II. La Grange-Chancel, La Motte,
Piron, Le Franc de Pompignan.

Pages.

1

ibid.

145

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SECT. III. La Noue, Guymond de la Touche,
Châteaubrun, Le Mierre..

208

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CHAP. V. De la Comédie dans le dix-huitième
siècle..

289

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SECTION PREMIÈRE. Examen de cette question
Si l'art de la Comédie est plus difficile que
celui de la Tragédie.

SECT. II. Destouches.

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SECT. III. Piron et Gresset.

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ibid.

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348

SECT. IV. Boissi et Le Sage.

SECT. V. Le Grand, Fagan, La Motte, Pont-
de-Veyle, Desmahis, Barthe, Collé, La
Noue, Marivaux, Saint-Foix, Chamfort, etc.

FIN DE LA TABLE.

XII.

26

365

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