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qui l'a chargé d'une mission auprès du Roi. Il doit être maintenant à Paris. Je lui ai demandé des renseignemens sur le Roi d'Éthiopie, Sahla Danghaël, sur lequel votre département m'a écrit le 17 août 1839 et pour qui M. d'Abbadie était porteur d'une lettre du Roi. M. Rochet, auquel je l'ai fait redire plusieurs fois et qui pourra aussi vous l'affirmer, m'a assuré qu'il n'y avait pas un Roi d'Éthiopie du nom de Sahla Danghaël. Peut-être jugerez-vous nécessaire. Monsieur le Ministre, dans l'intérêt de la vérité et de l'histoire, de faire expliquer catègoriquement M. Rochet, qui paraît bien informé de ce qui se passe en Abyssinie et qui était, dit-il, dans les meilleures relations avec le Roi de Choa.

Je suis avec respect. Monsieur le Ministre, etc.

Correspondance politique, Égypte, XI, fos 272-273.

COCHELET.

54.

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M. Cochelet à Son Excellence Monsieur Guizot ministre secrétaire d'Etat des Affaires Etrangères.

SOMMAIRE: Cochelet a vu Mohamed-Alv qui voudrait avoir des nouvelles de Paris, notamment une réponse à sa lettre au Roi. Nouvelles de l'impression produite à Constantinople par la convention Napier. · Irritation de Reschid Pacha et de lord Ponsonby. On prendra des mesures pour arrêter la retraite d'IbrahimPacha en lui coupant toutes les communications. On espère cependant que les arrangements conclus par l'amiral Stopford sur communication officielle des quatre cours mettront fin au mauvais vouloir de la Porte. Cochelet conseille au Vice-roi de donner quelque satisfaction aux populations pour éviter que leur mécontentement n'ait des conséquences pour la tranquillité du pays. Par exemple il serait urgent de licencier la garde nationale. Mais il est difficile d'agir sur ce vieillard tenace et opiniâtre,

-

Alexandrie, le 17 décembre 1840.

MONSIEUR LE MINISTRE,

Le paquebot-poste est entré hier seulement dans le port d'Alexandrie, et repart aujourd'hui. Il ne m'a apporté aucune dépêche de Votre Excellence, et je n'ai rien d'important

à lui dire. Afin d'apprendre quelque chose de nouveau, je me suis rendu, hier soir, au Sérail, où je n'avais pas été depuis neuf jours. Méhémet Ali me reçut parfaitement bien. Il me demanda, avec un peu d'embarras, si vous m'aviez écrit. Il avait probablement calculé que je devais recevoir une réponse à sa lettre au Roi qui était jointe à ma dépêche du 11 novembre dernier. Je lui dis que je n'avais rien reçu, et que cela ne devait pas lui paraître extraordinaire, parce que les arrangemens précipités, dont vous aviez eu presqu'en même tems connaissance par le paquebot anglais l'Oriental, avaient rendu inutile toute espèce de communication de votre part. Il me demanda ensuite quelques nouvelles de Constantinople. Je lui dis que je n'avais rien reçu d'officiel de M. l'Ambassadeur du Roi, mais que je savais cependant que la convention faite par le commodore Napier avait plutôt irrité que disposé les esprits à lui être favorables. Il paraît effectivement que Reschid Pacha, excité par lord Ponsonby et peut-être aussi poussé par la Russie s'était exprimé sur cette convention dans des termes qui laissaient peu d'espoir d'en finir par ce moyen. On disait hautement que le commodore Napier s'était arrogé un droit qui n'appartanit qu'au Sultan; qu'en allant au-devant des désirs de Méhémet Ali, il lui avait donné les moyens de faire revenir ses troupes de la Syrie et de sauver son fils, en enlevant aux Turcs l'occasion de réduire Méhémet-Ali à se rendre à discrétion en demandant seulement la vie sauve. Reschid Pacha avait dit que tout n'était pas perdu et que Sélim Pacha ou le général Jockmuss ne laisseraient certainement pas Ibrahim Pacha opérer tranquillement sa retraite. Il est probable que ces généraux ont reçu des instructions dans ce sens car jusqu'à présent on n'a eu aucune nouvelle d'Ibrahim Pacha, ce qui peut faire supposer qu'on a cherché à soulever les habitans et à lui couper toutes les communications. Il est possible, cependant, que les derniers arrangemens dont j'ai eu l'honneur de vous rendre compte le 11 de ce mois et qui doivent être connus aujourd'hui à Constantinople, mettent fin à

l'irritation de la Porte et au mauvais vouloir des Puissances Alliées, car tout a été conclu d'après le désir de celles-ci et on doit supposer qu'elles tiendront leurs promesses.

Il serait fort à regretter qu'il n'en fût pas ainsi, car pourrait craindre que Méhémet Ali, arrivé comme je vous l'écrivais dernièrement, au dernier degré de l'humiliation, ne voulût tenter, dans le cas où on le pousserait à bout, quelque moyen de résistance doit il serait infailliblement la victime. Dans ce moment, on travaille à soulever conre lui toutes les populations arabes, et il est malheureusement démontré qu'elles seront disposées à l'abandonner.

Quoique bien décidé à ne plus prendre sur moi la responsabilité d'aucun conseil, je n'ai pas cru pouvoir me dispenser de dire à Mehémet Ali que je l'engageais à prendre de lui-même, avant d'y être forcé par la Porte, quelques mesures qui satisferaient les populations, et je lui ai indiqué le licenciement des gardes nationales qu'on pousse à bout en les fesant travailler, sans distinction d'âge et de rang, dans les magasins du gouvernement, à charger et décharger les grains, comme une de celles, qui feraient, dans ce moment, le meilleur effet, en même temps qu'elle ôterait les armes des mains d'individus qui paraissent prêts à s'en servir contre lui, dans l'occasion. Mais j'ai reconnu, dans cette ciconstance, comme dans tant d'autres, où il s'est refusé à suivre mes avis, qu'il n'y avait rien à obtenir de ce vieillard tenace et opiniâtre, par la persuasion, et que c'était la force seule qui pourrait l'amener à des concessions. Il semble que la fatalité et la force soient les seuls argumens des Turcs. Malheureusement, l'une poursuit Méhémet Ali, et l'autre lui échappe.

Je suis avec respect, Monsieur le Ministre, etc.

COCHELET.

P. S. Je continue à vous envoyer ci-joint, une copie de la correspondance de Constantinople, qui m'est communiqué à l'arrivée de chaque paquebot.

Correspondance politique. Égypte, XI, fos 274-275.

55.

Copie de la correspondance particulière

de Constantinople en date du 18 décembre 1840.

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SOMMAIRE: Protestation officielle de lord Ponsonby à la Porte contre la convention Napier, qui considère Mohamed-Aly comme une Puissance tandis que le traité de Londres du 15 juillet ne voit en lui qu'un vassal rebelle. Il n'avait qu'à faire sa soummission, et c'était à Sa Hautesse de lui accorder le pardon. Il faut, continue lord Ponsonby, donner à l'amiral Stopford l'ordre de s'emparer d'Alexandrie. Mohamed Ali sera enlevé par son entourage et livré à l'escadre anglaise. - Il ne faut pas lui laisser l'Égypte, même viagèrement. Mais, d'autre part, on annonce la soumission du Vice-roi; et les ambassadeurs des quatre Cours sont en train d'en délibérer. On commence à parler des conditions qui lui seront imposées.

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Le 8 du courant, lord Ponsonby a envoyé son premier Drogman chez Réchid Pacha; il était porteur d'une protestation, rédigée par le Ministre anglais, contre le traité de Napier. Cette pièce a été présentée au Ministre turc avec intimation de la faire copier de suite, de la signer et de la communiquer aux quatre ambassadeurs Alliés, ainsi qu'à M. de Pontois. Le Le public en a ressenti une grande peine; il a été indigné de cette démarche hostile de la Porte et surtout du changement de politique de Rechid Pacha à l'instigation de lord Ponsonby. Une circonstance digne de remarque, c'est que la personne qui a apporté à Réchid Pacha la première nouvelle de la conclusion de la paix, a reçu de ce ministre deux mille piastres d'étrennes. Il est impossible de vous exprimer la fureur et l'emportement de lord Ponsonby lorsqu'il eut connaissance de la paix; il était impatient de se rendre à la Porte; il s'y est présenté dans la journée du 9 et il a dit à Rechid Pacha: «< Hier

je vous ai envoyé par mon interprète. M. Pisani, un modèle de protestation contre le traité conclu par le commodore Napier; ce traité, je l'ai considéré comme non avenu, car il n'avait pas l'autorisation de le conclure, d'autant plus qu'il considère Méhémet Ali, comme une puissance, tandis que le traité du 15 juillet le traite comme un vassal rebelle; par conséquent il aurait dû faire sa soummission au Sultan, et c'était à Sa Hautesse à lui accorder le pardon. L'honneur de votre pays exige que la note que vous avez présentée hier ait son entière exécution. Expédiez des ordres à l'amiral Stopford, moi-même je les lui confirmerai, pour qu'il attaque sans retard, et qu'il s'empare d'Alexandrie. Je vous ai communiqué toute la correspondance que j'entretiens avec des personnes qui se trouvent auprès de Méhémet Ali; elles sont disposées à l'enlever et à le remettre à l'escadre anglaise qui fera feu sur Alexandrie; ne lui accordez pas même l'Égypte viagèrement. Notre escadre, ses équipages et nos troupes sont à votre disposition; profitez de cette occasion »>.

Vous voyez par cet entretien qu'on ne peut plus espérer aucun accommodement; les préparatifs militaires continuent; de nouvelles troupes vont être expédiées. Des ordres sont partis pour la Syrie, afin d'embarquer des troupes pour opérer un débarquement à Alexandrie en même temps qu'on l'attaquera avec les vaisseaux.

D'après les avis arrivés hier de Marmarizza par deux bateaux à vapeur de guerre anglais, où se trouvent les escadres alliées, il paraît que le Vice-roi a fait sa soummission au Sultan sans conditions. Les quatre ambassadeurs se sont réunis ce matin, et, dans ce moment, ils sont encore assemblés. Quel u'un bien informé vient de me dire que l'on a rédigé les conditions à imposer au Vice-roi; c'est lord Ponsonby qui les a dictées et on va les remettre à la Porte, pour qu'elle les communique au Pacha; il s'agit de l'évacuation entière de la Syrie, de la restitution de la flotte turque et de la flotte égyptienne; il lui sera défendu de construire des vaisseaux de guerre;

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