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promesse de Sa Hautesse le Sultan, réintègre ledit Pacha dans le gouvernement de l'Égypte, et lui en accorde l'hérédité, firman qui contient aussi les conditions que Sa Hautesse a jugé à propos d'établir à ce sujet.

Nous espérons fort et considérons comme très probable que Méhémet Ali Pacha s'empressera d'accepter et d'exécuter en entier lesdites conditions. Cependant si, contre toute attente, il refusait de le faire, ces conditions équitables ne seraient pas susceptibles d'être changées ou modifiées, vu qu'une pareille modification porterait atteinte aux droits de souveraineté, à l'honneur de la Sublime Porte, ainsi qu'à la dignité des Puissances Alliées. En outre, la Sublime Porte, ainsi qu'il est connu à Votre Excellence, a agi, depuis le commencement de la question égyptienne suivant l'avis et les conseils des quatre Augustes Cours, ses Amies et Alliées. Par conséquent le Gouvernement de Sa Hautesse le Sultan prie formellement lesdites Cours de vouloir bien, dans l'hypothèse susmentionnée, lui accorder de nouveau l'assistance dont il aura besoin.

En attendant, puisque la question d'Egypte doit être considérée comme entièrement terminée, et qu'il n'existe plus de ce côté-là ni blocus, ni aucune d'espèce d'embarras, il sera convenable que les consuls des quatre cours Alliées qui ont été rappelés d'Alexandrie soient renvoyés à leur poste.

C'est pour communiquer tout ceci à Votre Excellence que nous lui remettons la présente Note officielle, pareille à celles qui ont été adressées à MM. les Représentants de la Grande Bretagne, de Prusse et de Russie.

Nous renouvelons à Votre Excellence l'assurance de notre haute et affectueuse considération.

Correspondance politique. Égypte XIII, fos 9 et s.

101.

Circulaire adressée par la Sublime Porte, le 13 février 1841, à Monsieur l'Ambassadeur de France et aux autres Agents diplomatiques.

SOMMAIRE: Information que le pacha d'Égypte ayant effectué sa soumission, la question d'Égypte se trouve par là terminée, et il n'existe plus, à l'égard de la dite province, ni blocus, ni aucune espèce d'embarras ou d'entraves commerciales.

Son Excellence Méhémet-Ali Pacha ayant effectué la soumission qu'il avait annoncée, la question d'Egypte se trouve par là terminée, et il n'existe plus, à l'égard de ladite Province, ni blocus, ni aucune espèce d'embarras ou d'entraves commerciales.

C'est pour porter officiellement ce fait à la connaissance de toutes les cours étrangères, amies de la Sublime Porte, que nous avons adressé une Note officielle à chacun de MM. les autres Représentants, de même que nous remettons la présente à Son Excellence M. l'Ambassadeur de France, en lui renouvelant, à cette occasion, l'assurance de notre haute et affectueuse considération.

Correspondance politique. Égypte, XIII, fos 9 et s.

102. Le Lieutenant Colonel Gallice à Monsieur le Ma

réchal Duc de Dalmatie, Ministre de la Guerre, Président du Conseil.

SOMMAIRE: Difficultés rencontrées par l'armée égyptienne dans sa retraite, notamment par Soliman pour sauver son artillerie. Le retour d'Ibrahim amènera sans doute un changement dans les affaires égyptiennes. Un nouveau personnel mis à la disposition du commandant Gallice; mais les nouveau-venus ont des principes et des prétentions qui ne s'accordent pas bien avec ses idées et avec les travaux qu'il a dirigés jusqu'à présent: des absurdités qui triompheraient même des principes de Vauban. Le Turc pur sang n'est pas susceptible de civilisation; il en est tout autrement du fellah, de l'arabe, du bédouin ou même du nègre. L'effectif de l'armée est encore de 100.000 hommes; en supprimant les éléments nuisibles, on aurait 70.000 hommes de bonnes troupes; mais il faudrait tenir leur solde au courant et établir une discipline convenable, leur expliquer les véritables prétentions des Anglais qui sont de faire en Égypte comme dans l'Inde, au risque de ruiner le pays. Mais la plupart des officiers turcs, dont le meilleur ne vaut pas le plus médiocre de nos sous-officiers, sont trop égoïstes et trop orgueilleux pour qu'on puisse en tirer quoi que ce soit. — Conviction du commandant Gallice que l'œuvre de Mohamed Aly ne sera durable que tout autant que la France l'aidera d'une manière efficace à expulser les Turcs de l'Égypte et à réorganiser de fond en comble toutes les parties de son administration.

Alexandrie, le 16 février 1841.

MONSIEUR LE MARÉCHAL,

Ce que j'ai eu l'honneur d'exprimer dans ma lettre du 24 décembre relativement à la haine que certains personnages, qui entourent le pacha, portent à Ibrahim et à l'armée, se trouve malheureusement confirmé par tout ce qui s'est passé depuis cette époque.

Les routes que l'armée de Syrie a dû suivre pour rentrer en Égypte étaient parsemées d'obstacles; les vivres manquaient partout et principalement à Gaza qu'il était si facile d'approvisionner à l'avance: ce n'est que quand Ibrahim, arrivé sur ce point, a pu faire connaître directement la vérité à son père, qu'on s'est enfin décidé à y porter à la hâte quelques chargemens de riz et de farine; mais lorsque ces secours sont arrivés, on comptait déjà quelques milliers d'hommes morts de faim.

Soliman pacha, craignant de mourir de la même manière, malgré les demandes en vivres réïtérées qu'il avait faites, s'est vu dans la nécessité de laisser son matériel (225 bouches à feu) à Calaat, sous la garde de mille hommes, et à travers le désert, de gagner à marche forcée Akaba d'où, à son arrivée, il a envoyé des vivres à Calaat.

Enfin il ne m'est plus resté aucun doute sur les intentions de certains alentours du pacha, lorsque j'ai entendu l'une de leurs créatures dire, en parlant des individus qui composent l'armée de Syrie: « Je voudrais bien apprendre qu'ils sont tous crevés » et sur le mauvais effet que produisait un vœu aussi féroce ajouter: «Sauf Ibrahim pacha, Soliman pacha et Menecli<< pacha, qui seuls méritent l'argent qu'on dépense pour eux ».

Ibrahim n'ignore pas qu'il a des ennemis, et maintenant qu'il est à même de suivre leurs trames, bien qu'on l'ait relégué au Caire, il est probable qu'il saura les déjouer et donner plus d'aplomb au gouvernement de son père, gouvernement qui, par suite des menées anglaises, est fortement ébraulé.

Il est donc à présumer qu'avant peu, il y aura un changement quelconque dans la conduite des affaires égyptiennes. Dieu veuille que ce qu'on dit de la santé d'Ibrahim ne se réalise pas, car il n'aurait plus pour deux mois d'existence, d'après des médecins qui l'ont vu depuis peu.

Je commence à croire qu'il est infiniment plus facile de faire le mal que le bien, surtout dans un pays encore plongé dans la barbarie: en voici la preuve:

En attendant une organisation plus convenable pour le service de l'artillerie et celui du génie, on a mis à ma disposition Massard effendi, Ekekin bey, le jeune Hassan qui sort de l'Ecole de Metz et l'architecte de la ville (Sélim pacha est chargé de faire exécuter les travaux conformément aux dessins revêtus de mon approbation); avec ce personnel il y aurait possibilité de faire quelque chose, si tous les individus que je viens de désigner, avaient le sens commun, ou plutôt y mettaient de la bonne foi; mais, comme sous le régime actuel,

les fripons et les ignorans font très bien leurs affaires, et que si l'ordre et la probité venaient à se montrer quelque part, il pourrait arriver qu'on voulût les établir partout, ce qui les contrarierait infiniment, il s'ensuit qu'ils ont introduit dans le personnel en question, comme Ingénieur militaire, le St Ekekin bey qui, en fait de fortifications, a étudié en Angleterre les machines à filer le coton. Le susdit, fortement épaulé par son beau-frère Artin-Bey, 1er interprète de Son Altesse, et sans doute aussi par le parti anglais, ne veut pas entendre parler des parapets en terre de six mètres d'épaisseur; il trouve cette épaisseur trop faible et veut l'augmenter de 2 à 3 mètres; il préfère d'ailleurs les parapets en maçonnerie et voudrait en voir partout, afin très probablement que les Anglais trouvent plus tard moins de résistance pour s'emparer d'Alexandrie. Ces principes sont, au reste, en tout conformes à ceux que Napier professe dans ses tournées sur les fortifications, tournées dont j'ai déjà eu l'honneur d'entretenir Monsieur le Maréchal.

En France, comme partout ailleurs en Europe, on se moquerait de celui qui émettrait de pareils principes, et tout serait dit; il n'en est pas de même ici; il peut même arriver que ces absurdités triomphent des principes de Vauban et de ceux si bien démontrés par l'expérience, de même que les drogues des charlatans sont préférées par le peuple aux remèdes qu'indiquerait un bon médecin. Si cela arrive, je prie Monsieur le Maréchal d'être bien sûr qu'à l'instant même je renoncerai à mes fonctions; je ne serai jamais complice d'un acte qu'on pourrait à juste titre qualifier de trahison.

J'acquiers, tous les jours, de plus en plus, la conviction que le Turc pur sang n'est pas, sauf de bien rares exceptions, susceptible de civilisation. Comment, en effet, tirer quelque chose de bon d'un être entièrement soumis à la plus stupide superstition, à l'appétit des sens et à la paresse? Aussi que trouve-t-on chez lui? l'orgueil, l'apathie, l'ignorance la plus crasse, le fanatisme, la dissimulation la plus profonde, le tout masqué par un vernis de simplicité et de bonhommie. Voyez-le

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