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122.

Projet de Convention proposé le 5 mars 1841.

SOMMAIRE: Nomination de plénipotentiaires sur la négociation de la convention re lative aux Détroits. — Il y est question d'un représentant de Sa Majesté le Roi desFrançais. — Affirmation de l'ancienne règle. - Firmans de passage aux bâtiments légers sous pavillon de guerre employés au service des légations des puissances amies.

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Leurs Majestés l'Empereur d'Autriche, Roi de Hongrie et de Bohême; le Roi des Français; la Reine du Royaume-Uni de la Grande-Bretagne et d'Irlande; le Roi de Prusse et l'Empereur de toutes les Russies, persuadées que leur union et leur accord offrent à l'Europe le gage le plus certain de la conservation de la paix générale, objet constant de leur sollicitude, et leurs dites Majestés désirant attester cet accord en donnant à Sa Hautesse le Sultan une preuve manifeste du respect qu'Elles portent à l'inviolabilité de ses droits souverains, Leurs dites Majestés ont résolu de se rendre à l'invitation de Sa Hautesse le Sultan, afin de constater en commun, par un acte formel, leur détermination unanime de se conformer à l'ancienne règle de l'Empire ottoman, d'après laquelle les passages des détroits des Dardanelles et du Bosphore doivent toujours être fermés aux bâtiments de guerre étrangers tant que la Porte se trouve en paix.

Leurs dites Majestés, d'une part, et Sa Hautesse le Sultan, de l'autre, ayant résolu de conclure entre Elles une convention à ce sujet, ont nommé, à cet effet, pour leurs Plénipotentiaires, savoir:

Sa Majesté l'Empereur d'Autriche, Roi de Hongrie et de Bohême, etc. etc.;

Sa Majesté le Roi des Français, etc. etc.;

Sa Majesté la Reine du Royaume-Uni de la Grande-Bretagne et d'Irlande, etc. etc.;

Sa Majesté le Roi de Prusse, etc. etc.;

Sa Majesté l'Empereur de toutes les Russies, etc. etc.;

LE PROJET DE CONVENTION SUR LES DETROITS.

375

Et Sa Majesté le très-majestueux, très-Puissant et trèsmagnifique Sultan Abdul-Medjid, Empereur des Ottomans,

etc. etc.;

Lesquels s'étant réciproquement communiqué leurs Pleins Pouvoirs, trouvés en bonne et due forme, ont arrêté et signé les articles suivants:

ARTICLE I.

Sa Hautesse le Sultan, d'une part, déclare qu'il a la ferme résolution de maintenir, à l'avenir, le principe invariablement établi comme ancienne règle de son Empire, et en vertu de laquelle il a été de tout temps défendu aux bâtiments de guerre des Puissances étrangères d'entrer dans les détroits des Dardanelles et du Bosphore, et que, tant que la Porte se trouve en paix, Sa Hautesse n'admettra aucun bâtiment de guerre étranger dans les dits détroits;

Et Leurs Majestés l'Empereur d'Autriche, Roi de Hongrie et de Bohême; le Roi des Français, la Reine du Royaume Uni de la Grande-Bretagne et d'Irlande, le Roi de Prusse et l'Empereur de toutes les Russies, de l'autre part, s'engagent à respecter cette détermination du Sultan, et à se conformer au principe ci-dessus énoncé.

ARTICLE II.

Il est entendu qu'en constatant l'inviolabilité de l'ancienne règle de l'Empire ottoman, mentionnée dans l'article précédent, le Sultan se réserve, comme par le passé, de délivrer des firmans de passage aux bâtiments légers sous pavillon de guerre, lesquels seront employés, comme il est d'usage, au service des légations des Puissances amies.

ARTICLE III.

Sa Hautesse le Sultan se réserve de porter la présente Convention à la connaissance de toutes les Puissances avec lesquelles la Sublime-Porte se trouve en relation d'amitié, en les invitant à y accéder.

ARTICLE IV.

La présente Convention sera ratifiée, et les ratifications en seront échangées à Londres, à l'expiration de

ou plus tôt, si faire se peut.

mois,

En foi de quoi les Plénipotentiaires respectifs l'ont signée, et y ont apposé les sceaux de leurs armes.

Fait à Londres, le

mil huit cent quarante.

Correspondance politique. Égypte, XIII, for 9 et 6.

123. M. Cochelet à Son Excellence Monsieur Guizot Ministre des Affaires Etrangères.

SOMMAIRE: Transmission du texte de la réponse de Mohamed Aly au Grand-vizir: ses réserves. Les termes de cette réponse qui sont de nature à ne pas plaire à la Porte; il est à désirer pourtant qu'elle laisse une voie ouverte aux négociations (1).

Elle donnera sans doute lieu d'abord à une réplique sévère. Les mauvaises nouvelles de la santé d'Ibrahim pacha n'étaient pas exactes. On attend le résultat de ses entretiens avec son père. — Développement des actes de brigandage sur tous les points de l'Empire ottoman d'où l'autorité de Mohamed Aly a été chassée: autour d'Alep grande fermentation dans le Liban. Le commodore Napier s'offre à emmener les émirs Druses et Maronites dans leur pays. Ils répondent qu'ils ne connaissent que la France pour leur protectrice et leur amie; il y a pour son service dans les montagnes de Syrie 40000 combattants. Les services des paquebots.

MONSIEUR LE MINISTRE,

Alexandrie, le 6 mars 1841.

J'ai l'honneur de vous transmettre la traduction de la lettre de Méhémet-Ali au Grand-vizir en réponse à celle qui accompagnait le Hatti-chérif dont j'ai fait connaître les conditions à Votre Excellence le 23 février dernier, et qui lui aura été transmis par M. l'Ambassadeur du Roi à Constantinople.

(1) Note au Crayon. Arrivée à Paris le 27 mars.

Vous verrez, Monsieur le Ministre, par cette réponse, d'ailleurs très soumise et très obséquieuse, que les observations de Méhémet-Ali portent principalement sur la manière dont la Porte entend conférer l'hérédité, sur l'exécution des lois administratives et des règlemens militaires de l'Empire appliqués à l'Égypte, et sur la demande exorbitante du tribut. Quant à la réduction de l'armée au taux de 18.000 hommes, à la défense de construire de nouveaux bâtimens de guerre, à l'assimilation des monnaies de l'Égypte avec celles de Constantinople et au changement de costume, Méhémet-Ali se soumet, dès à présent, à ce qu'on exige de lui. Vous remarquerez, Monsieur le Ministre, qu'il n'est rien dit dans la réponse du droit fort important que se réserve la Porte de nommer les officiers supérieurs et généraux de l'armée égyptienne et sur le mode de recrutement.

Les dépêches que j'ai eu l'honneur de vous transmettre, le 23 février dernier, par le paquebot anglais, et qui vous sont sans doute déjà parvenues aujourd'hui, ont dû vous préparer à la réponse de Méhémet-Ali. On doit se féliciter qu'elle ait été faite dans des termes aussi concilians. Peut-être, cependant, se formalisera-t-on à Constantinople de ce que Méhémet-Ali désire que son successeur, parmi ses enfans mâles, soit désigné au choix du Sultan par les membres de sa famille et les principaux fonctionnaires de l'Egypte. On sera sans doute aussi peu satisfait de l'assurance qu'il donne que les principes du Hatti-chérif de Gulhané sont en vigueur en Égypte depuis plus de 20 ans, car c'est, en quelque sorte, rehausser son administration en critiquant celle de l'Empire. Il en est de même de ce qu'il dit relativement aux règlemens militaires français qui régissent l'armée égyptienne depuis 20 ans. Les Puissances Alliées ont toujours vu avec jalousie qu'ils avaient été introduits, et s'opposeront à ce qu'ils soient conservés. Quant au tribut dont Méhémet-Ali espérait, dit-il, être exempté pendant deux ou trois ans, il n'est pas probable que la Porte, obérée comme elle l'est, et privée de toutes res

sources, voudra le réduire. Méhémet-Ali, afin de donner à l'Europe une haute idée de sa puissance, a peut-être exagéré l'état de ses finances. Son dernier état officiel, comme je vous l'écrivais le 3 février dernier, porte à 88 millions de francs le revenu d'une année de l'Égypte. La Porte, qui n'a jamais su administrer ses finances, ne voudra pas manquer l'occasion de les refaire à l'aide de l'Egypte. Il est donc probable que la réponse de Méhémet Ali ne sera pas accueillie favorablement à Constantinople, et qu'elle donnera lieu à une réplique sévère. Il est à désirer seulement qu'elle soit de nature à laisser encore une voie ouverte aux négociations.

Ma dépêche, du 1er de ce mois, vous fait connaître le but du voyage de Méhémet Ali au Caire. Ce n'est qu'à son retour, et lorsque la réponse de la Porte aura été faite, que nous pourrons apprécier les suites du Hatti-Chérif du 13 février.

Les nouvelles alarmantes qu'on avait données sur la santé d'Ibrahim Pacha et dont je vous avais fait part dans mon n. 248, étaient fort exagérées. M. de Bourville, qui a vu ce Prince au Caire et qui en a été parfaitement reçu, m'a écrit que son état était assez satisfaisant.

M. Loewe Veimar, qui s'est embarqué le 24 février à Suez pour Bombay, d'où il se rendra à Bagdad, m'a fait connaître que les Arabes avaient pillé la poste du gouvernement. Ils se sont même emparés des tapis sacrés envoyés de la Mecque au Caire. Ils avaient aussi menacé d'assassiner désormais les courriers. Ces scènes de brigandage se renouvelleront sur tous les points de l'Empire ottoman où le prestige de la puissance de Méhémet Ali n'existera plus et où l'autorité ne sera plus assez forte pour les réprimer. Des lettres d'Aden apportées par le dernier bateau à vapeur anglais disent que le nouveau Chérif de l'Yemen vexait et avanisait les négocians des principales villes, telles que Moka et Hodeda qui, pour la plupart, avaient pris la fuite. M. Guys écrit d'Alep que les Arabes, qui avoisinent cette ville, ont commencé à mettre des contribu

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