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Mais être, au bord de l'Hippocrene,

Assis entre les rois amis de Melpomene,

Et les tendres auteurs des accents les plus doux,
Horace à la fois et Mécene,

Cet accord n'étoit dû qu'aux rives de la Seine,
Et l'éloge commence à vous.

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ADIEUX AUX JESUITES.

A M. L'ABBÉ MARQUET.

LA prophétie est accomplie,

Cher abbé, je reviens à toi ;
La métamorphose est finie,

Et mes jours enfin sont à moi.

Victime, tu le sais, d'un âge où l'on s'ignore,
Porté du berceau sur l'autel,

Je m'entendois à peine encore,

Quand j'y vins bégayer l'engagement cruel...
Nos goûts font nos destins : l'astre de ma naissance
Fut la paisible liberté ;

Pouvois-je en fuir l'attrait ? Né pour l'indépendance,
Devois-je plus long-temps souffrir la violence

D'une lente captivité ?

C'en est fait ; à mon sort ma raison me ramene :
Mais, ami, t'avoûrai-je un tendre sentiment,
Que ton cœur généreux reconnoîtra sans peine ?
Qui, même en la brisant, j'ai regretté ma chaîne,
Et je ne me suis vu libre qu'en soupirant.
Je dois tous mes regrets aux sages que je quitte;
J'en perds avec douleur l'entretien vertueux;

Et, si dans leurs foyers désormais je n'habite,

Mon cœur me survit auprès d'eux :

Car ne les crois pas tels que la main de l'envie
Les peint à des yeux prévenus;

Si tu ne les connois que sur ce qu'en publie
La ténébreuse calomnie,

Ils te sont encore inconnus.

Lis, et vois de leurs mœurs des traits plus ingénus.
Qu'il m'est doux de pouvoir leur rendre un témoignage
Dont l'intérêt, la crainte, et l'espoir, sont exclus!
A leur sort le mien ne tient plus;

L'impartialité va tracer leur image.

Oui, j'ai vu des mortels, j'en dois ici l'aveu,
Trop combattus, connus trop peu ;

J'ai vu des esprits vrais, des cœurs incorruptibles,
Voués à la patrie, à leurs rois, à leur Dieu,
A leurs propres maux insensibles,
Prodigues de leurs jours, tendres, parfaits amis,
Et souvent bienfaiteurs paisibles

De leurs plus fougueux ennemis;
Trop estimés enfin pour être moins haïs.'

Que d'autres s'exhalant, dans leur haine insensée,
En reproches injurieux,

Cherchent en les quittant à les rendre odieux :
Pour moi, fidele au vrai, fidele à ma pensée,

C'est ainsi qu'en partant je leur fais mes adieux.

VERS

SUR LA TRAGÉDIE D'ALZIRE.

QUEL

UELQUES ombres, quelques défauts
Ne déparent point une belle.

Trois fois j'ai vu la Voltaire nouvelle,

Et trois fois j'y trouvai des agréments nouveaux.
Aux regles, me dit-on, la piece est peu fidele:
Si mon esprit contre elle a des objections,
Mon cœur a des larmes pour elle;

Les pleurs décident mieux que les réflexions.
Le goût, par-tout divers, marche sans regle sûre;
Le sentiment ne va point au hasard :
On s'attendrit sans imposture;

Le suffrage de la nature

L'emporte sur celui de l'art.

En dépit du Zoile et du censeur austere,
Je compterai toujours sur un plaisir certain,

Lorsqu'on réunira la muse de Voltaire

Et les graces de la Gaussin.

VERS

SUR LES TABLEAUX

Exposés à l'Académie royale de peinture, Au mois de septembre 1737.

Si l'on croit les plaintes chagrines
De quelques frondeurs décriés,
Et les satires clandestines
De quelques auteurs oubliés,
Tout s'anéantit dans la France,

Le goût, les arts les plus brillants,

Tout meurt sous des dieux indolents;

Et, dévoués à l'opulence,

Nos jours ramenent l'ignorance

Sur la ruine des talents.

Mais quelle lumiere nouvelle

Dissipe le sommeil des arts!
De la divinité d'Apelle

Le temple s'ouvre à mes regards.
Naissez, sortez de vos ténebres,

Eleves de cet art charmant
Qui de la nuit du monument
Sauve les spectacles célebres,

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