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A Strasbourg, Moreau ose, avec les plus faibles moyens, avec 26 bateaux, tenter en plein jour le passage du fleuve. On lutte corps à corps: c'est de vive force qu'on atteint le rivage et qu'on y gagne du terrain pied à pied. Les braves généraux qui conduisent les colonnes, Duhesme et Dessaigne, sont blessés. Desaix, qui défendit si glorieusement Kehl, y rentre par les mêmes barrières qu'il fut forcé d'abandonner à l'ennemi.

La nouvelle des préliminaires de paix signés à Léoben vient arrêter les progrès des deux armées. L'humanité eut à gémir de ce que cette nouvelle ne vint pas plutôt arracher aux Français l'occasion de remporter des victoires qui n'étaient plus nécessaires.

Des événemens moins prospères

qui s'étaient passés en Italie pendant que se traitait, et même après que fut conclue la convention de Léoben, appelaient le génie réparateur de Bonaparte. Ils eurent une grande influence sur un traité de paix qui fut postérieur de cinq mois à la signature des préliminaires. Expliquons comment Venise en devint le gage, et comment cette république ex pia une neutralité qu'elle avait fini par rendre perfide.

En laissant occuper son territoire par trois armées autrichiennes, le sénat de Vénise s'était exposé à toutes les représailles des vainqueurs. Il avait dédaigné ses propres troupes, qui, en effet,étaient assez méprisables,suivant le témoignage de l'histoire des trois derniers siécles, mais qui enfin auraient pu être portées au nombre de

cinquante mille hommes. Il avait armé que quinze mille Esclavous. Depuis que Bonaparte s'était emparé de toute la Terre-Ferme, cette milice était rassemblée autour des Lagunes, et paraissait n'avoir d'autre objet que de défendre la capitale. A'mesure que les Français s'éloiguaient,parleurs conquêtes en Allemagne, du territoire de Venise, le sénat, qui ne calculait que la témérité de leur entreprise, s'habitua à croire à leur défaite, et conçut la pensée de leur fermer le retour en Italie. Un soulèvement général des provinces vénitiennes contre les Français avait été commandé, non avec les formes directes de l'autorité, mais avec les précautions d'un complot. Bientôt le tocsin retentit dans toutes les campagnes. Quarantè mille. paysans prirent des armes que le fa

natisme avait bénies. Ils s'élancent, tout est prêt pour des vêpres siciliennes. Mais dans Vicence, dans Padoue, dans Bergame, des hordes d'assassius reculent devant des poignées de soldats; leurs fureurs ne peuvent s'assouvir que sur ceux qui marchent dans la campagne. Ils trouvent à Vérone un champ plus libre pour le massacre. Les Français y sont surpris, frappés avant de s'être ralliés sous leurs chefs. Les meurtriers entrent dans les hôpitaux; et le guerrier blessé, celui qui vient de recevoir les douloureux secours de l'art, celui qui n'attend plus qu'une mort paisible, meurt sous cent coups de poignards, de haches et de piques.

De quelle horreur fut saisi Bonaparte en apprenant la mort et les tourmens de ses braves! Il se confie,

pour la vengeance, au général Augereau, qu'il a laissé dans la république Lombarde, et qui, à la nouvelle de ces assassinats, arrive comme la foudre devant Vérone, toute teinte du sang français. Les assassins, soutenus de troupes esclavonnes, lui refusent les portes, garnissent d'artillerie les fortifications de la ville, osent en sortir sous la protection du canon, fondent sur la troupe peu nombreuse, mais aguerrie, que commande Augereau. 11 les disperse et les taille en pièces, et la fortune de Bonaparte veut que ce nouvel exploit de son lieutenant soit remporté dans le moment même où le général Laudon, après avoir réparé ses longues défaites dans le Tirol, après avoir repris Botzen, Trente, Roveredo, Rivoli, maître du cours de l'Adige, allait se pré

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