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« donc prendre sur moi d'exécuter avec mes troupes la « démonstration que le prince avait désirée. » Ainsi,

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l'effet d'un mauvais vouloir où ne se révélait que trop la politique du cabinet de Vienne, on avait manqué l'occupation de Landau, dont l'effet moral eût été im

mense.

Le prince de Condé dut alors s'astreindre à l'exécution pure et simple du plan de campagne convenu par les cabinets. Il lui fallut se résigner à l'inaction où resta, pendant trois semaines, le corps d'armée commandé par le prince Esterhazy dont celui des princes français faisait partie. Dans cet intervalle on reçut la nouvelle de la journée du 10 août. Les divers rapports qui arrivèrent sur cette journée de sang portèrent l'exaspération des esprits au plus haut point. Avoir les armes à la main, se voir à quelques journées de marche de Paris, et ne pas voler au secours du roi et de la famille royale: cette situation était d'autant plus horrible pour les militaires qui faisaient partie de cette armée, qu'ils apprirent qu'un grand nombre de leurs parents, de leurs amis avaient été victimes de cette catastrophe.

Cependant, vers le 25 septembre, tout se préparait pour le passage du Rhin. Déjà le jour en était indiqué; les troupes commençaient à exécuter leur mouvement; le succès des opérations paraissait d'autant plus certain que l'effectif des armées républicaines de ce côté était à peu près nul: quand tout à coup arrive un contre-ordre. La fatale retraite de Champagne dut entraîner celle des autres corps alliés. Du moment que l'armée principale, commandée par le prince de Brunswick, arrivée à qua

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Ce fut une journée de fête pour eux; ils allaient toucher le sol de la patrie et délivrer leur roi de l'oppression des jacobins. Telles étaient les idées, les sentiments qui animaient ces Français fidèles à leur antique oriflamme.

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Le 5 août, ce corps d'armée vint occuper Neustadt, à une marche de la frontière, non loin de Landau. Le prince de Condé s'était déjà ménagé des intelligences dans cette place. Le maire de la ville, le commandant du génie et quelques autres chefs de corps s'étaient engagés à arborer le drapeau blanc dès que le prince se présenterait aux portes de la ville, sous condition toutefois expresse de n'avoir pas dans ses rangs de troupes étrangères. II n'y avait pas un seul instant à perdre d'un moment à l'autre Custines, qui occupait Strasbourg avec son corps d'armée, pouvait arriver et se jeter dans Landau avec de nouvelles troupes. Le prince de Condé dépêcha en toute hâte deux officiers du génie vers le prince Hohenlohe-Kirchberg, campé à portée de Landau avec dix-huit mille hommes, pour lui faire part de l'espèce de convention qu'il avait conclue avec les autorités de cette dernière ville. Il lui demanda seulement de se porter, avec son corps, en vue de cette place, de faire seulement une démonstration hostile sans autre coopération. Après plusieurs réponses dilatoires, pressé par les messages réitérés du prince qui lui faisait voir l'urgence du cas, le général autrichien finit par s'expliquer nettement. « J'en suis désespéré, » dit-il dans sa dépêche au prince de Condé; « mais l'occupation de Landau, ni d'aucune <«< autre place de l'Alsace n'entre, pour le moment, « dans le plan de campagne des puissances: je ne puis

« donc prendre sur moi d'exécuter avec mes troupes la « démonstration que le prince avait désirée. » — Ainsi, par l'effet d'un mauvais vouloir où ne se révélait que trop la politique du cabinet de Vienne, on avait manqué l'occupation de Landau, dont l'effet moral eût été im

mense.

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Le prince de Condé dut alors s'astreindre à l'exécution pure et simple du plan de campagne convenu par les cabinets. Il lui fallut se résigner à l'inaction où resta, pendant trois semaines, le corps d'armée commandé par le prince Esterhazy dont celui des princes français faisait partie. Dans cet intervalle on reçut la nouvelle de la journée du 10 août. Les divers rapports qui arrivèrent sur cette journée de sang portèrent l'exaspération des esprits au plus haut point. Avoir les armes à la main, se voir à quelques journées de marche de Paris, et ne pas voler au secours du roi et de la famille royale: cette situation était d'autant plus horrible pour les militaires qui faisaient partie de cette armée, qu'ils apprirent qu'un grand nombre de leurs parents, de leurs amis avaient été victimes de cette catastrophe.

Cependant, vers le 25 septembre, tout se préparait pour le passage du Rhin. Déjà le jour en était indiqué; les troupes commençaient à exécuter leur mouvement; le succès des opérations paraissait d'autant plus certain que l'effectif des armées républicaines de ce côté était à peu près nul: quand tout à coup arrive un contre-ordre. La fatale retraite de Champagne dut entraîner celle des autres corps alliés. - Du moment que l'armée principale, commandée par le prince de Brunswick, arrivée à qua

rante lieues de Paris, évacuait presque sans coup férir le territoire français, on ne pouvait plus songer à y pénétrer sur un autre point. Ce fut le désespoir dans l'âme, en accusant tout haut de trahison le duc de Brunswick, que les royalistes de l'armée des Princes repassèrent la frontière, qu'ils venaient de franchir pleins d'enthousiasme et sous les plus heureux auspices (1).

que

Pendant dans le conseil du roi de Prusse une politique étroite et égoïste dictait les résolutions, pendant que le duc de Brunswick, toujours à la dévotion du cabinet de Saint-James, s'efforçait de neutraliser l'humeur martiale et-chevaleresque de Frédéric-Guillaume par des considérations d'une prudence méticuleuse, la réclusion de Louis XVI devenait chaque jour plus dure. Marie-Antoinette était sans cesse partagée entre l'espoir d'une prochaine délivrance et les anxiétés que lui causait son incertitude sur le sort que lui réservaient les puissances du jour. Les prisonniers du Temple étaient régulièrement informés des délibérations de l'assemblée et de tout ce qui se

(1) Muret, Histoire de l'armée de Condé, t. I, p. 66-76.

L'année suivante, la politique autrichienne dans cette guerre se dévoila entièrement, quand, après l'occupation momentanée de l'Alsace par les armées de cette puissance, l'empereur ordonna que cette province fût incorporée à l'empire, ainsi que nous le verrons dans la suite de ce récit. Il ne s'agissait donc pas, dans cette guerre, des intérêts de la couronne de saint Louis, mais de profiter des troubles de la France et d'en dépecer une partie au profit de la coalition, comme depuis, quand, par le traité de Campo-Formio, en 1797, la France donna les États vénitiens à l'Autriche, qui en retour, lui garantit la possession de la Belgique et de toute la ligne du Rhin. C'est ainsi que, dans ces transactions diplomatiques, il n'y a que le premier pas qui coûte, et qu'on s'est habitué, au fur et à mesure, à faire substituer au droit des nations le droit de

convenance.

passait en dehors du donjon par des journaux qu'une main invisible leur fournissait. Quel dut être le saisissement de la reine lorsqu'elle apprit la retraite des armées prussiennes de la Champagne ! — Tandis qu'au sein de la nouvelle assemblée nationale, asservie totalement à la commune de Paris, des motions horribles, les injures les plus grossières étaient sans cesse vomies contre Marie-Antoinette, tante de l'empereur régnant, on se livrait, à Vienne, aux froids calculs d'une politique aussi étroite que personnelle. On ne pouvait cependant pas ignorer que dans les clubs, des hommes atroces rugissaient déjà la mort de Louis XVI, celle de la reine; que dans cette convention même on proposait d'organiser un corps de << douze cents volontaires qui se dévoueraient à aller atta«< quer corps à corps tous les rois qui étaient en guerre « avec la France et leurs généraux; » que cette motion de Jean de Bry excitait l'enthousiasme de beaucoup de représentants; que deux d'entre eux (Merlin et Chabot) déclarèrent qu'aussitôt leurs fonctions législatives ter« minées, ils allaient faire partie de ce corps de Brutus « du jour (1): » ce n'était donc plus la mort seule de Louis XVI que l'on conjurait, mais celle de tous les souverains de l'Europe; et l'anéantissement total du N'imprincipe monarchique y était in petto résolu. porte, tout cela ne put faire changer de système au cabinet de Vienne; on s'y livrait, comme par le passé, aux froides combinaisons d'une politique toute personnelle sur les mesures à prendre pour distraire quelques pro

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(1) Moniteur, t. XIII, p. 542.

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