Images de page
PDF
ePub

Et consent qu'aux yeux de tous
Pour ses attraits il soupire,
Il pourroit bientôt se rire
De tous les soins du jaloux1.
(A don Pedre.)

Chiribirida ouch alla,

Star bon Turca,
Non aver danara :
Ti voler comprara?
Mi servir à ti,
Se pagar per mi;
Far bona cucina,
Mi levar matina,
Far boller caldara;
Parlara, parlara,
Ti voler comprara?

DEUXIÈME ENTRÉE DE BALLET.

Les esclaves recommencent leur danse

DON PEDRE chante.

Savez-vous, mes drôles,

Que cette chanson

Sent pour vos épaules
Les coups de bâton?
Chiribirida ouch alla,
Mi ti non comprara,
Ma ti bastonara,
Si ti non andara;
Andara, andara,
O ti bastonara 2.

Oh! oh! quels égrillards! (A Isidore.) Allons, rentrons ici : j'ai changé de pensée; et puis, le temps se couvre un peu. (A Hali, qui paroît encore.) Ah! fourbe, que je vous y trouve!

'Le livre du Ballet des Muses indique ici le même jeu de théâtre que nous avons déjà indique à la fin du premier couplet.

2

« Je ne t'achèterai pas; mais je te bâtonnerai, si tu ne t'en vas pas. Va-t'en, > va-t'en, ou je te bâtonnerai. >> (Auger.)

HALI.

Hé bien! oui, mon maître l'adore. Il n'a point de plus grand desir que de lui montrer son amour; et, si elle y consent, il la prendra pour femme.

[blocks in formation]

Nous l'aurons, dis-je, en dépit de vos dents.

Si je prends...

DON PEDRE.

HALI.

Vous avez beau faire la garde, j'en ai juré, elle sera à

nous.

DON PEDRE.

Laisse-moi faire, je t'attraperai sans courir.

HALI.

C'est nous qui vous attraperons. Elle sera notre femme, la chose est résolue. (Seul.) Il faut que j'y périsse, ou que j'en vienne à bout.

SCÈNE X.

ADRASTE, HALI, DEUX LAQUAIS.

ADRASTE.

Hé bien Hali, nos affaires s'avancent-clles?

HALI.

Monsieur, j'ai déja fait quelque petite tentative; mais je.....

ADRASTE.

Ne te mets point en peine; j'ai trouvé, par hasard, tout ce que je voulois; et je vais jouir du bonheur de voir chez elle cette belle. Je me suis rencontré chez le peintre Damon, qui m'a dit qu'aujourd'hui il venoit faire le portrait de cette adorable personne; et, comme il est depuis longtemps de mes plus intimes amis, il a voulu servir mes feux, et m'envoie à sa place, avec un petit mot de lettre pour me faire accepter. Tu sais que, de tout temps, je me suis plu à la peinture, et que parfois je manie le pinceau, contre la coutume de France, qui ne veut pas qu'un gentilhomme sache rien faire :

ainsi j'aurai la liberté de voir cette belle à mon aise. Mais je ne doute pas que mon jaloux fâcheux ne soit toujours présent, et n'empêche tous les propos que nous pourrions avoir ensemble; et, pour te dire vrai, j'ai, par le moyen d'une jeune esclave, un stratagème prêt pour tirer cette belle Grecque des mains de son jaloux, si je puis obtenir d'elle qu'elle y consente.

HALI.

Laissez-moi faire, je veux vous faire un peu de jour à la pouvoir entretenir. (Il parle bas à l'oreille d'Adraste.) Il ne sera pas dit que je ne serve de rien dans cette affaire-là. Quand allezvous?

ADRASTE.

Tout de ce pas, et j'ai déja préparé toutes choses.

HALI.

Je vais, de mon côté, me préparer aussi.

ADRASTE.

Je ne veux point perdre de temps. Hola! il me tarde que je ne goûte le plaisir de la voir.

SCÈNE XI. DON PEDRE, ADRASTE, DEUX LAQUAIS.

DON PEDRE.

Que cherchez-vous, cavalier, dans cette maison?

ADRASTE.

J'y cherche le seigneur don Pèdre.

DON PEDRE.

Vous l'avez devant vous.

ADRASTE.

Il prendra, s'il lui plaît, la peine de lire cette lettre.

DON PEDRE.

Je vous envoie, au lieu de moi, pour le portrait que vous savez, ce gentilhomme françois, qui, comme curieux d'obliger les honnêtes gens, a bien voulu prendre ce soin, sur la proposition que je lui en ai faite. Il est, sans contredit, le premier homme du monde pour ces sortes d'ouvrages, et j'ai cru que je ne vous pouvois rendre un service plus agréable que de vous l'envoyer, dans le dessein que vous avez d'avoir un portrait achevé de la personne que vous aimez. Gardezrous bien surtout de lui parler d'aucune récompense; car

c'est un homme qui s'en offenseroit, et qui ne fait les choses que pour la gloire et la réputation.

Seigneur François, c'est une grande grace que vous me voulez faire, et je vous suis fort obligé.

ADRASTE.

Toute mon ambition est de rendre service aux gens de nom et de mérite.

DON PEDRE.

Je vais faire venir la personne dont il s'agit.

SCÈNE XII. ISIDORE, DON PÈDRE, ADRASTE, DEUX

LAQUAIS.

DON PEDRE, à Isidore.

Voici un gentilhomme que Damon nous envoie, qui se veut bien donner la peine de vous peindre. (A Adraste, qui embrasse Isidore en la saluant.) Holà! seigneur François, cette façon de saluer n'est point d'usage en ce pays.

ADRASTE.

C'est la manière de France.

DON PEDRE.

La manière de France est bonne pour vos femmes; mais, pour les nôtres, elle est un peu trop familière.

ISIDORE.

Je reçois cet honneur avec beaucoup de joie. L'aventure me surprend fort; et, pour dire le vrai, je ne m'attendois pas d'avoir un peintre si illustre.

ADRASTE.

Il n'y a personne, sans doute, qui ne tînt à beaucoup de gloire de toucher à un tel ouvrage. Je n'ai pas grande habileté; mais le sujet, ici, ne fournit que trop de lui-même, et il y a moyen de faire quelque chose de beau sur un original fait comme celui-là.

ISIDORE.

L'original est peu de chose; mais l'adresse du peintre en saura couvrir les défauts.

ADRASTE.

Le peintre n'y en voit aucun; et tout ce qu'il souhaite est d'en pouvoir représenter les graces aux yeux de tout le monde aussi grandes qu'il les peut voir.

ISIDORE.

Si votre pinceau flatte autant que votre langue, vous allez me faire un portrait qui ne me ressemblera pas.

ADRASTE.

Le ciel, qui fit l'original, nous ôte le moyen d'en faire un portrait qui puisse flatter.

ISIDORE.

Le ciel, quoi que vous en disiez, ne...

DON PEDRE.

Finissons cela, de grace. Laissons les compliments, et songeons au portrait.

ADRASTE, aux laquais.

Allons, apportez tout.

(On apporte tout ce qu'il faut pour peindre Isidore.)

ISIDORE, à Adraste.

Où voulez-vous que je me place?

ADRASTE.

Ici. Voici le lieu le plus avantageux, et qui reçoit le mieux les vues favorables de la lumière que nous cherchons.

ISIDORE, après s'être assise.

Suis-je bien ainsi?

ADRASTE.

Oui. Levez-vous un peu, s'il vous plaît. Un peu plus de ce côté-là. Le corps tourné ainsi. La tête un peu levée, afin que la beauté du cou paroisse. Ceci un peu plus découvert. (Il découvre un peu plus sa gorge.) Bon. Là, un peu davantage; encore tant soit peu.

DON PEDRE, à Isidore.

Il y a bien de la peine à vous mettre; ne sauriez-vous vous tenir comme il faut?

ISIDORE.

Ce sont ici des choses toutes neuves pour moi; et c'est à monsieur à me mettre de la façon qu'il veut.

ADRASTE, assis.

Voilà qui va le mieux du monde, et vous vous tenez à merveille. (La faisant tourner un peu vers lui.) Comme cela, s'il vous plaît. Le tout dépend des attitudes qu'on donne aux personnes qu'on peint.

Fort bien.

DON PÈDRE.

« PrécédentContinuer »