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Madame; et, de ce pas, je vais vous contenter.

Fort bien.

(Il fait un pas pour s'en aller.)

MARIAN!.

VALÈRE, revenant.

Souvenez-vous au moins que c'est vous-même

Qui contraignez mon cœur à cet effort extrême.

MARIANE.

Oui.

VALÈRE, revenant encore.

Et que le dessein que mon ame conçoit N'est rien qu'à votre exemple.

MARIANE.

A mon exemple, soit.

VALÈRE, en sortant.

Suffit: vous allez être à point nommé servie.

Tant mieux.

MARIANE.

VALÈRE, revenant encore.

Vous me voyez, c'est pour toute ma vie.

A la bonne heure.

MARIANE.

VALÈRE s'en va, et, lorsqu'il est vers la porte, il se retourne.

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MARIANE.

Adieu, monsieur.

DORINE, à Mariane.

Pour moi, je pense

Que vous perdez l'esprit par cette extravagance :
Et je vous ai laissés tout du long quereller.
Pour voir où tout cela pourroit enfin aller.
Hola! seigneur Valère.

VALÈRE, feignant de résister.

(Elle arrête Valère par le bras.)

Hé? que veux-tu, Dorine?

Venez ici.

DORINE.

VALÈRE.

Non, non, le dépit me domine.

Ne me détourne point de ce qu'elle a voulu.

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Il souffre à me voir, ma présence le chasse; Et je ferai bien mieux de lui quitter la place.

DORINE, quittant Valère, et courant après Mariane. A l'autre! Où courez-vous?

MARIANE.

Laisse.

DORINE.

Il faut revenir.

MARIANE.

Non, non, Dorine; en vain tu veux me retenir.

VALÈRE, à part.

Je vois bien que ma vue est pour elle un supplice;
Et, sans doute, il vaut mieux que je l'en affranchisse.
DORINE, quittant Mariane, et courant après Valère.
Encor! Diantre soit fait de vous! Si, je le veux.
Cessez ce badinage; et venez çà tous deux.

(Elle prend Valère et Mariane par la main, et les ramene.)

VALÈRE, à Dorine.

Mais quel est ton dessein?

MARIANE, à Dorine.

Qu'est-ce que tu veux faire?

DORINE.

Vous bien remettre ensemble, et vous tirer d'affaire.

(A Valère.)

Êtes-vous fou d'avoir un pareil démêlé?

VALÈRE.

N'as-tu pas entendu comme elle m'a parlé?
DORINE, à Mariane.

Êtes-vous folle, vous, de vous être emportée?

MARIANE.

N'as-tu pas vu la chose, et comme il m'a traitée ?

DORINE. (A Valère.)

Sottise des deux parts. Elle n'a d'autre soin
Que de se conserver à vous, j'en suis témoin.

(A Mariane.)

Il n'aime que vous seule, et n'a point d'autre envie
Que d'être votre époux; j'en réponds sur ma vie.

MARIANE, à Valere.

Pourquoi donc me donner un semblable conseil?
VALÈRE, à Mariane.

Pourquoi m'en demander sur un sujet pareil?

DORINE.

Vous êtes fous tous deux. Çà, la main l'un et l'autre.

(A Valère.)

Allons, vous.

VALÈRE, en donnant sa main à Dorine.
A quoi bon ma main?

DORINE, à Mariane.

Ah çà! la vôtre.

MARIANE, en donnant aussi sa main.

De quoi sert tout cela ?

DORINE.

Mon Dieu! vite, avancez.

Vous vous aimez tous deux plus que vous ne pensez1. (Valère et Mariane se tiennent quelque temps par la main sans se regarder.)

'L'auteur de la lettre sur la comédie de l'Imposteur remarque judicieusement <que ce dépit a cela de particulier et a'original, qu'il naît et finit dans une même scene, et cela aussi vraisemblablement que faisoient ceux qu'on avoit vus aupara

VALÈRE, se tournant vers Mariane.

Mais ne faites done point les choses avec peine;
Et regardez un peu les gens sans nulle haine.

(Mariane se tourne du côté de Valère en Ini souriant.)
DORINE.

A vous dire le vrai, les amants sont bien fous!
VALÈRE, à Mariane.

Oh çà! n'ai-je pas lieu de me plaindre de vous?
Et, pour n'en point mentir, n'êtes-vous pas méchante
De vous plaire à me dire une chose affligeante?

MARIANE.

Mais vous, n'êtes-vous pas l'homme le plus ingrat...?

DORINE.

Pour une autre saison laissons tout ce débat,
Et songeons à parer ce fâcheux mariage.

MARIANE.

Dis-nous donc quels ressorts il faut mettre en usage.

DORINE.

Nous en ferons agir de toutes les façons.

(A Mariane.)

(A Valère.)

Votre père se moque; et ce sont des chansons.

(A Mariane.)

Mais, pour vous, il vaut mieux qu'à son extravagance
D'un doux consentement vous prêtiez l'apparence,
Afin qu'en cas d'alarme il vous soit plus aisé
De tirer en longueur cet hymen proposé.
En attrapant du temps, à tout on remédie.
Tantôt vous payerez de quelque maladie
Qui viendra tout à coup, et voudra des délais;
Tantôt vous payerez de présages mauvais;
Vous aurez fait d'un mort la rencontre fâcheuse,
Cassé quelque miroir, ou songé d'eau bourbeuse :
Enfin, le bon de tout, c'est qu'à d'autres qu'à lui
On ne vous peut lier que vous ne disiez oui.
Mais, pour mieux réussir, il est bon, ce me semble,
Qu'on ne vous trouve point tous deux parlant ensemble.
(A Valère.)

Sortez; et, sans tarder, employez vos amis

vant, où ces colères amoureuses naissent de quelques tromperies faites par un tiers, la plupart du temps derrière le théâtre; au lieu qu'ici elles naissent divinement, à la vue des spectateurs, et de la délicatesse et de la force de la passion

mėme. >

Pour vous faire tenir ce qu'on vous a promis.
Nous allons réveiller les efforts de son frère,
Et dans notre parti jeter la belle-mère.
Adieu.

VALÈRE, à Mariane.

Quelques efforts que nous préparions tous,
Ma plus grande espérance, à vrai dire, est en vous.
MARIANE, à Valère.

Je ne vous réponds pas des volontés d'un père;
Mais je ne serai point à d'autre qu'à Valère.

VALÈRE.

Que vous me comblez d'aise! et, quoi que puisse oser...

DORINE.

Ah! jamais les amants ne sont las de jaser.

Sortez, vous dis-je.

VALÈRE; il fait un pas et revient.

Enfin...

DORINE.

Quel caquet est le vôtre !

Tirez de cette part; et vous, tirez de l'autre.

(Dorine les pousse chacun par l'épaule, et les oblige de se séparer)

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Que la foudre, sur l'heure, achève mes destins,
Qu'on me traite partout du plus grand des faquins,
S'il est aucun respect ni pouvoir qui m'arrête,
Et si je ne fais pas quelque coup de ma tête!

DORINE.

De grace, modérez un tel emportement :
Votre père n'a fait qu'en parler simplement.

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