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tions ont cédé à la loi de la nécessité, à l'éloignement, à la défiance des capitalistes nationaux. Enfin le résultat de cette opération a été de ramener la confiance, le crédit et la concurrence; et si les prêteurs ont contribué par leur sang-froid, leur prudence, l'emploi de leurs grandes ressources, à faire remonter la rente à 66 fr. après l'avoir trouvée à 54 et malgré une émission de 33 millions, il faut pardonner au moyen en faveur du résultat.

« En dernière analyse, les emprunts de 1817 ont été faits à un peu moins de 9 pour en perpétuel. Il est à croire que celui de 1818 qu'elle propose d'adopter sera moins onéreux. Les temps sont différens l'espoir fondé de la cessation prochaine de nos charges les plus pesantes, permet de croire qu'en cette année l'emprunt sera fait avec plus de précaution et de liberté de la part du gouvernement. Les larges profits dont on a parlé ont eu du moins le mérite d'attirer des concurrens; les capitaux français enhardis, n'auront plus besoin, pour se produire, d'assistance étrangère, et le concours sur le marché, des fonds de tous les pays, doit exercer sur le prix de la rente une heureuse influence.

« Il est pénible de ne pouvoir assigner le terme de tant et de si douloureux sacrifices. Entièrement persuadée qu'il n'y a plus de crédit, ni de finances, ni d'existence pour la France, que par un allégement au fardeau qui l'accable, la commission a désiré de connaître enfin le moment de notre libération financière qui paraît inséparable de notre libération politique. Elle aurait voulu surtout apporter quelque chose de positif sur ces réclamations individuelles que les étrangers exercent envers la France, et dont le vague sème les inquiétudes, entrave nos opérations les plus utiles, arrête l'essor du crédit, et imprime à la paix même un caractère hostile... C'est l'objet d'une négociation. Il y a lieu d'espérer qu'on en connaîtra l'issue avant la fin de la session, et qu'elle mettra un terme à des exagérations qui ont eu sur notre crédit une si fâcheuse influence.

Le Roi, dit M. Beugnot en terminant son rapport, le Roi nous a permis d'espérer «que ces charges pourront entièrement cesser, et que notre patrie reprendra parmi les nations le rang et

« l'éclat dus à la valeur des Français, et à leur attitude dans l'ada versité.

« La nation n'a point oublié les paroles de son Roi; elle s'y confie.

« Espérons aussi des souverains alliés pour la paix du monde,' qu'ils entendront ce vœu de la France, qui s'élance à la fois des palais et des chaumières, dans lequel se confondent les âges, les conditions, les opinions, et qui prouve par son énergique unanimité que si on a pu jeter une grande nation dans les voies du malheur, on n'a pu lui faire perdre le sentiment de sa dignité, ni celui de sa force. >>

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CHAPITRE V.

Discussion et adoption du budget à la chambre des députés.

TANDIS que la commission chargée d'examiner le budget s'occupait des recherches et tenait les conférences nécessaires à la rédaction de son travail, M. le baron de Saint-Cricq, directeur général des douanes, avait présenté le projet de loi relatif aux douanes, sujet qui semble tenir à celle des finances, mais qu'on en avait séparé pour en diminuer la masse, et dont les détails offriraient peu d'intérêt au lecteur.

(14 février.) En présentant le nouveau tarif, M. de Saint-Cricq expose les principes généraux qui l'ont dicté. Il fait observer que dans les circonstances les moins favorables à la consommation des objets de luxe ou d'agrément, elle s'est pourtant accrue au point d'avoir porté les recettes de 1817 à plusieurs millions au-dessus des calculs les plus élevés qu'ait pu fournir l'expérience des temps antérieurs.

Quant aux prohibitions établies dans l'intérêt de l'industrie nationale, quoique l'opinion des plus grands économistes se soit élevée contre elles, quoique la science et le vœu public même semblent quelquefois en appeler l'abolition, cette grande question reste encore indécise, et le système suivi en France trouve sa justification / dans les efforts que font à l'envi tous les gouvernemens de l'Europe pour conserver chez eux, avec le travail, tous les élémens de force et de richesse dont il est la source.

A cet égard, l'orateur expose l'amélioration du système contre la contrebande, ce fléau que les gouvernemens peuvent réprimer, dit-il, mais qu'il ne leur est malheureusement pas donné d'anéantir. La plus forte preuve à fournir de l'amélioration du service des douanes, c'est que la prime d'assurance, mesure incontestable de la résistance et des obstacles que la fraude rencontre, a monté en moins de deux ans, à un taux moyen de 30 pour cent.

Il s'est élevé de tout temps des réclamations contre les douanes,

surtout quant aux lois d'applications qui régissent l'action mutuelle du fisc et du commerce. Plusieurs chambres ont fait entendre des plaintes contre le grand nombre, l'incohérence ou les contradictions apparentes de ces lois, et ont demandé qu'il fût donné aux douanes un nouveau code. Cette demande, mûrement examinée, paraît à M. le directeur plus spécieuse que solide. Il développe l'origine et les variations du code général existant; il est loin de prétendre qu'il ne s'y trouvé, ou qu'il ne s'y soit introduit aucun vice; mais il croirait mériter le reproche d'imprudence, et compromettre l'administration, sans profit pour le commerce, si au lieu de donner une amélioration progressive au code existant, il détruisait, sans ménagement et sans retour, ce monument dont on peut faire disparaître successivement les imperfections.

Après ces considérations générales, M. le directeur expose les motifs des différens articles du projet de loi. Les sept titres dont il se compose offrent quelques changemens aux droits d'entrée et de sortie moins calculés dans l'intérêt du trésor que dans celui du commerce, et surtout de l'industrie; la plupart n'ont souffert qu'une légère opposition. Mais un seul article a plus occupé les esprits et mis les intérêts particuliers en mouvement, que l'ensemble de la loi. Il faut en expliquer la cause.

Le transit introduit dans notre législation, par la loi du 17 décembre 1814, avait fait connaître à la France le prix d'un commerce de commission et d'économie; on avait alors restreint cette faveur pour les expéditions des denrées coloniales, faites des ports du royaume sur les frontières de terre; on proposait maintenant de' l'étendre aux départemens du Rhin (art. 34 du projet de loi) pour les denrées coloniales qui entreraient par Strasbourg et ressortiraient par Saint-Louis, avec droit d'entrepôt réel à Strasbourg pendant 4 mois.

Ce privilége, vivement réclamé par l'Alsace, avait déjà donné lieu à des objections présentées et combattues devant le conseil d'État. Il existe entre la Hollande et la Suisse un commerce de denrées coloniales qui ne pouvant transiter sur le territoire français, s'était frayé une route sur la rive gauche du Rhin, par le territoire

de Bade. Le bénéfice résultant de ce transit est évalué à 5 ou 6 millions. D'un côté, les départemens français de la rive gauche ex-posaient qu'en fermant leurs frontières au transit, on les privait, sans utilité pour le reste du royaume, d'un profit que leur assuraient leur position, leurs grandes routes, et leurs anciennes relations. De l'autre, les chambres de commerce des ports représentaient que, la Suisse étant le principal débouché des denrées coloniales, qu'elle tire à moindre frais du Havre, de Nantes, de Bordeaux et de Marseille qu'elle ne pourrait le faire de la Hollande, ce serait sacrifier à l'intérêt local d'une province, les intérêts généraux de la marine et du commerce, que d'encourager les extractions de la Hollande par la facilité des communications demandées : à cette objection les députés de l'Alsace avaient répondu qu'il ne s'agissait pas d'ouvrir une route nouvelle au commerce étranger, mais de partager avec l'étranger les bénéfices d'une communication qui existait déjà et qu'on ne pouvait lui enlever. Le gouvernement du Roi, considérant d'ailleurs l'avantage de dédommager deux départemens qui avaient tant souffert de l'invasion, s'étant convaincu que le privilége demandé n'altérerait en rien le bienfait accordé aux provinces maritimes, s'était décidé à proposer d'accorder ce transit avec toutes les précautions capables d'en prévenir l'abus.

(18 mars.) Cependant la commission nommée pour examiner le projet, y avait vu de graves inconvéniens, comme de compromettre ou du moins de diminuer les avantages acquis à nos ports de mer et d'ouvrir une voie à la contrebande. En vain les députés favorables à la demande de l'Alsace, renonçant à la faveur de l'entrepôt, avaient accumulé toutes les rigueurs et les précautions capables de prévenir la contrebande; malgré leurs concessions, malgré les argumens cent fois répétés, que le privilége réclamé pour l'Alsace ne ferait aucun tort à celui dont jouissaient les provinces maritimes; malgré la proposition du directeur général, les discours savans de MM. Froc de la Boullaie, Magnier Grandpré et le sentiment hautement prononcé de M. le duc de Richelieu en faveur de l'Alsace,« province française par le cœur, disait-il, et qu'il serait aussi loin de la justice que de la saine politique de ne pas traiter

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