Images de page
PDF
ePub
[ocr errors]

étaient guère alors que des stathouders. Plusieurs d'entre eux avaient inutilement tenté d'envahir le pouvoir; la con~ stitution avait résisté à leurs efforts jusqu'en 1805. Napo léon fit alors du Wurtemberg un royaume agrandi des dé pouilles de plusieurs États médiatisés, où le nouveau monarque, se trouvant tout à la fois doté de provinces nouvelles, et débarrassé de la constitution si gênante pour ses prédécesseurs, exerça la puissance royale dans toute sa plés nitude.

Mais au moment de la chute du protectorat et de la confédération du Rhin, les peuples du Wurtemberg firent entendre des réclamations. Le roi, qui ne pouvait ni garder l'autorité absolue qui datait d'une époque odieuse, ni reprendre l'ancienne constitution, crut devoir en proposer une nouvelle, dont ne voulaient ni la noblesse médiatisée, parce qu'elle ne lui restituait pas ses droits primitifs, ni les peuples du Wurtemberg, parce que leur vieille constitution n'avait point été légalement abolie.

Le roi défendait en vain son projet par la nécessité de réunir sous la même loi l'ancien Wurtemberg avec les provinces récemment acquises; la noblesse et le peuple paraissaient s'accorder pour rejeter la constitution, lorsque la mort du roi, arrivée le 30 octobre 1816, suspendit la querelle.....

L'avénement du prince son fils, qui s'était distingué dans les campagnes de 1814 et 1815, faisait espérer une conciliation. Il avait des opinions plus populaires: il proposa un autre projet; mais, après bien des débats et des concessions inutiles, le nouveau roi se résolut à dissoudre l'assemblée des États, le 4 juin 1817, en témoignant, par un rescrit daté du lendemain, le regret qu'il éprouvait de n'avoir pu donner à son peuple une constitution qui devait assurer la liberté publique et individuelle. Il déclara en même temps qu'il maintiendrait les impôts tels qu'ils étaient (à 2,400,000 florins), pour 1817 et 1818.

Toutefois, en prononçant la dissolution des États, il ajoutait à son rescrit du 26 mai, « afin que ses fidèles sujets souffrissent le moins possible de la mauvaise conduite de

ses représentans, que, si la majorité des citoyens témoignait dans l'assemblée des bailliages, ou par l'organe de leurs magistrats, qu'ils acceptaient le projet de constitution avec les restrictions contenues dans ledit rescrit, il le considérerait comme adopté, et le mettrait de suite en vigueur. »

1

SAXE. Le duc de Saxe-Weimar avait été plus heureux. La constitution qu'il avait donnée à ses sujets dès le mois de mars 1816, basée sur l'égalité des droits, et des charges pour tous avec de justes indemnités pour les nobles dépossédés de leurs priviléges, acceptée par toutes les classes, garantie par la diète germanique en 1816, faisait le bonheur d'une population peu nombreuse, mais où le goût des arts et la liberté de la presse constituaient une espèce de métropole littéraire dont l'influence sera plus d'une fois remarquée dans le cours de cette histoire.

La diete des États de Saxe-Gotha, assemblée au mois de novembre 1817, offrait une composition moins populaire'; elle était composée de deux chambres, où les villes n'envoient que trois représentans, et où la noblesse, ayant toute l'influence, ne paraissait pas disposée à faire des sacrifices aux opinions du temps, ni aux vœux du peuple.

Le même esprit paraissait animer les États assemblés à Dresde sous les yeux d'un monarque dont le royaume réduit de moitié offre encore le spectacle de quelques divisions intestines. Les États avaient demandé la réduction de plusieurs dépenses, particulièrement de celle de l'armée, mais surtout le maintien des droits du pays, c'est-à-dire, de vieilles institutions; ils avaient accordé les impôts demandés par le prince, mais sous la condition de rester assemblés jusqu'à ce que les délibérations commencées fussent terminées, et qu'il ne fût fait sans leur consentement aucun changement à la constitution, conditions auxquelles le roi n'avait pu refuser son adhésion, mais qui rendent plus difficile la réforme d'un système représentatif encore tout féodal. MBCKLEMBOURG. Des questions de droit public agitées dans les deux duchés de Mecklembourg ont été réglées par des ordonnances, en attendant une constitution que le vœu des

[ocr errors]

habitans réclame là comme dans le reste de l'Allemagne.

HESSE. Des deux branches souveraines de l'illustre maison de Hesse, celle de Darmstadt s'était préparée par des concessions, par la suppression des immunités en matière d'impôts, à l'établissement d'un système plus populaire. Mais le prince qui règne à Cassel, plus maltraité qu'aucun autre dans les guerres de la révolution, n'avait recouvré des ruines du royaume de Westphalie qu'une portion de ses États. Seul des membres de l'ancien corps germanique, il a gardé le titre d'électeur, qui ne s'applique plus à rien ; il s'est attaché à rétablir tout ce qui avait disparu avec lui; sa cour et son administration sont les seules qui reproduisent complétement l'idée de celles des princes souverains du Saint-Empire. L'Europe s'est occupée des querelles de son gouvernement avec les acquéreurs des domaines westphaliens: elles ont été portées depuis à la diète germanique. Les opinions déjà émises semblent favorables à la cause des acquéreurs ; mais l'électeur insiste sur son droit, et la diète ne paraissait pas certaine, à la fin de 1817, qu'elle eût celui de donner une décision à cet égard.

VILLES LIBRES. Nul prince n'est rentré dans son ancien domaine avec plus d'ardeur que les villes libres du corps germanique n'ont repris leurs vieilles institutions. Dans plusieurs cités, les Juifs ont été récemment l'objet de quelques persécutions ou d'injures plus odieuses que des persécutions. Latolérance religieuse y a reculé, et il a paru que l'oligarchie bourgeoise ou commerciale n'était pas plus favorable aux prétentions populaires que l'aristocratie féodale.

HANOVKE. Cet électorat, érigé en royaume, serait à peine remarqué, s'il n'avait reçu de la maison qui règne sur la Grande-Bretagne le titre dont il brille et l'influence dont il jouit dans le corps germanique. Les échanges qu'il a faits avec la Prusse et les Pays-Bas n'ont que peu altéré la configuration de son territoire. Des politiques en ont regardé la possession comme un inconvénient pour l'Angleterre : d'autres ont vu l'intervention de la première des puissances maritimes, dans les affaires d'Allemagne, comme dange~

reuse à toute l'Europe. Quoi qu'il en soit, le gouvernement de l'Hanovre a été remis au duc de Cambridge, avec le titre de lieutenant général. Les états convoqués en 1816 avaient inutilement délibéré sur l'essai d'un nouveau système de contributions. On a travaillé depuis à l'exécution d'une sorte de cadastre pour la répartition de l'impôt foncier. Les finances avaient été si dérangées, que l'administration s'est encore, en 1817, vue obligée de payer l'arriéré en obligations qui ont augmenté la masse du papier; mais on attendait des états convoqués le 26 décembre 1817 des améliorations dans le système financier et dans l'organisation judiciaire.

PAYS-BAS. L'érection des Pays-Bas en royaume est l'un des résultats les plus importans du système politique moderne; c'est l'effet de la terreur qu'inspira durant vingtcinq ans la domination française. Il a été rattaché au corps germanique par le petit duché de Luxembourg : toute l'Europe a pris soin de le fortifier contre les entreprises de la France; on lui a fait élever sur sa frontière méridionale trois lignes de forteresses, et cependant on n'a pu lui rendre ce qui faisait sa puissance maritime, ni établir sur des bases solides sa puissance continentale. Une constitution soumise par le monarque à l'assemblée du peuple, fondée sur des principes d'une sage politique et d'une philosophie éclairée, a fixé les rapports, les droits et les devoirs du gouvernement à l'égard des sujets, et des sujets à l'égard du gouvernement. Les états-généraux, divisés en deux chambres électives, votent librement les impôts et les lois. On y a consacré la liberté de la presse, l'égalité devant la loi, la tolérance religieuse et l'indépendance des tribunaux. Mais cette constitution 'n'a pas admis l'institution du jury; elle n'a pu entièrement amalganier deux peuples, dont l'un, enrichi par sa marine et son commerce, veut tout sacrifier aux spéculations maritimes, et dont l'autre, ne pouvant plus prospérer que par son travail, voudrait tout soumettre aux intérêts de ses fabriques et de son agriculture.

Un autre obstacle à l'union sincère des deux peuples

dont on venait de faire une seule puissance, était la différence des religions. La tolérance était depuis long-temps établie en Hollande; l'esprit superstitieux des Belges qui avait causẻ tant d'embarras à Joseph II, avait été fort affaibli par les progrès des lumières, et par l'influence de l'administration française; mais le clergé catholique conservait les mêmes intérêts et la même bigoterie : il n'avait admis qu'avec ûne extrême répugnance l'article de la constitution qui accordait une protection égale à toutes les religions. Des évêques se plaignaient hautement de ce qu'ils étaient exclus, même des assemblées provinciales: leurs réclamations, portées devant une commission prise dans le conseil d'État, furent rejetées, et l'esprit consacré par la constitution triompha des autres prétentions. L'arrêt rendu le 8 novembre 1817, contre M. Maurice de Broglie, évêque de Gand, par la cour d'assises de Bruxelles, en est un monument remarquable (1).

Cependant, malgré les obstacles que l'administration rencontrait à chaque pas, malgré quelques dissentimens qui se manifestèrent, même dans le gouvernement, par la démission que donna, sur la fin de 1817, le prince héréditaire, de la direction suprême des affaires militaires, et de tous ses emplois, démission acceptée par le roi, et reprise ensuite à la satisfaction du peuple et de l'armée, malgré ce défaut appa rent d'harmonie dans le corps politique, le royaume des Pays-Bas prenait chaque jour un aspect plus heureux. L'alliance du prince héréditaire avec une princesse russe avait agrandi ses destinées. Cette union venait d'être bénie de la naissance d'un fils dont tout le royaume reçut la nouvelle

(1) Ce prélat était prévenu d'avoir provoqué la désobéissance à la loi fondamentale du royaume, d'avoir entretenu une correspondance secrète avec la cour de Rome, et d'en avoir fait publier un bref relatif aux prières à faire pour la délivrance de la princesse d'Orange, et deux bulles de jubilé, sans les avoir soumises à l'approbation, et avoir obtenu le placet de souverain. Il fut condamné par contumace (car il s'était dérobé par la fuitę aux premières poursuites dirigées contre lui), à la peine de la déportation et anx frais du procès, conforméquent aux articles 204 et 205 du code pénal français, encore en vigueur dans Ja Belgique.

[ocr errors]
« PrécédentContinuer »