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N° IX.

Copie d'une lettre du ministre de l'intérieur au ministre des affaires étrangères.

Paris, le 26 mai 1815.

Monsieur le dic,

D'après les ordres de Sa Majesté, j'ai l'honneur de vous communiquer les renseignemens qui me sont parvenus par la correspondance des préfets sur les débarquemens d'hommes, de munitions et d'armes opérés jusqu'à ce jour par l'Angle terre sur les côtes de France.

D'après un procès-verbal du 10 mai, rédigé aux Sables par un lieutenant de gendarmerie et un sous-inspecteur des douanes, un pêcheur a été forcé par un bâtiment anglais de prendre à son bord deux individus dont l'un était le sieur Dannoville, ex-sous-lieutenant au 2° de hussards, et, en dernier lieu, aide-de-camp de M. de Suzannet, maréchalde-camp, nommé par le comte de Lille; l'autre passait pour son domestique.

Suivant un rapport du capitaine commandant la gendar merie de Napoleon, un second débarquement a eu lieu quelques jours après à Saint-Gilles, dans le département de la Vendée. Il était composé d'environ six à buit cents hommes, d'une assez grande quantité de munitions et d'armes; il y avait même de l'artillerie : ce débarquement, à ce qu'il paraît, a été protégé par quatre ou cinq mille insurgés.

Je ne manquerai pas, Monsieur le Duc, de vous donner également connaissance des autres événemens de ce genre, dont je pourrais ètre instruit à l'avenir.

Agréez, etc.

Le ministre de l'intérieur,

Signé CARNOT

N° 1X bis.

Message du Prince Regent.

21 mai 1815.

« S. A. R. le prince-régent, agissant au nom et de la part du roi, croit devoir informer ses fidèles communes, qu'en conséquence d'évenemens qui ont eu lieu récemment en France, en contravention aux traités conclus à Paris dans le cours de l'année dernière, S. A. R. a jugé nécessaire, de concert avec 'les alliés de S. M., de former des engagemens contre l'ennemi commun, pour prévenir le retour d'un système dont l'expérience a prouvé l'incompatibilité avec la paix et la sûreté de l'Europe. S. A. R. a ordonné que des copies des traités conclus avec les alliés fussent mis sous les yeux de la Chambre pour son instruction, et elle compte fermement que ses fidèles communes lui prêteront leur appui, et la mettront en état d'en remplir les stipulations, et de prendre, conjointement avec ses alliés, les mesures qui seront jugées indispensables dans cette importante crise. »

N° X.

Proclamation de S. M. le Roi de Prusse.

Lorsque dans le tems de danger j'appelai aux armes mon peuple, afin de combattre pour la liberté et l'indépendance de la patrie, toute la jeunesse se rassembla avec empressement autour des drapeaux, prête à se soumettre aux privations et aux fatigues auxquelles elle n'était pas accoutumée, et bien décidée d'aller même au devant de la mort à cette époque la force du peuple se mit avec intrépidité dans les rangs de mes braves soldats, et mes généraux conduisirent avec moi au combat une armée de héros qui se rendirent dignes du nom de leurs pères, comme héritiers de leur gloire. Ce fut

ainsi que nous et nos alliés conquîmes, accompagnés de la victoire, la capitale de l'ennemi; nos drapeaux flottaient à Paris; Napoléon renonça à l'empire, et la liberté était rendue à la patrie germanique, ainsi que la sûreté aux trônes et l'espérance d'une paix durable au monde.

Ces espérances ont disparu, il faut que la lutte recommence. Une conspiration perfide a ramené en France l'homme qui, pendant dix ans, a répandu sur les peuples des malheurs infinis. Le peuple étonné n'a pas été à même de résister à ses partisans; il fait si peu de cas de son abdication, quoiqu'il l'eût déclarée un sacrifice volontaire, porté au bonheur et à la tranquillité de la France dans un tems où il était encore en possession d'une armée considérable, qu'il n'en fait de tout autre traité; il se trouve à la tête de soldats parjures qui veulent éterniser la guerre; l'Europe est de nouveau menacée: elle ne peut pas souffrir sur le trône de France un chef qui a toujours proclamé la souveraineté universelle.

Aux armes donc encore une fois! la France elle-même a besoin de notre secours. Vous, braves Prussiens, entrerez daus une guerre nécessaire et juste, alliés avec vos anciens compagnons de victoires, renforcés par de nouveaux compagnons d'armes, avec moi, avec les princes de ma maison, avec les généraux qui vous ont conduits à des victoires; la justice de la cause pour laquelle nous combattons nous garantit la vic

toire.

J'ai ordonné un armement général qui sera exécuté dans tous mes états, en vertu de mon ordonnance du 3 septembre 1814. L'armée permanente va être complétée, les divisions des chasseurs volontaires seront formées, et la landwehr sera assemblée.

La jeunesse de la classe civilisée, à compter de l'âge de vingt ans accomplis, a le choix de servir dans le premier ban de la landwehr, ou d'entrer dans le corps de chasseurs de l'armée.

Tout jeune homme depuis l'âge de dix-sept ans accomplis, peut joindre l'armée à son gré, pourvu qu'il en possède les forces physiques nécessaires. Je donnerai à cet égard une

ordonnance particulière. Quant à l'organisation des corps individuels et de la landwehr, les autorités dans les diverses provinces sont chargées de faire les publications qui y ont rapport.

C'est ainsi que nous entrerons encore une fois dans la carrière. Aux armes donc! avec Dieu pour la tranquillité du monde, pour l'ordre et la moralité, pour le roi et la patrie. Vienne, le 7 avril 1815.

Signe FRÉDÉRIC GUILLAUME.

N XI

AFFAIRES ÉTRANGÈRES.

Manifeste qui expose les motifs de justice, d'importance et de nécessité, par lesquels le Roi notre seigneur se trouve obligé de s'opposer à l'agression de l'usurpateur Bonaparte, de faire renaître le repos et la tranquillité en Europe, et de protéger les droits de l'humanité et de la religion, en alliance et conjointement avec les souverains qui ont signé à Vienne la déclaration du 13 mars de l'année courante (Traduit de l'espagnol).

LE ROI.

tomba

Un des meilleurs rois que la France a jamais eu, victime d'une cabale de cruels régicides. Le monde vit avec horreur, la France avec la plus profonde douleur, la série des souverains de la dynastie des Bourbons ainsi interrompue; de ces souverains, que l'histoire nous représente avec les surnoms de pieux, de justes, de chéris, de pères de leurs peuples; de ces souverains, qui, adorant Dieu et le faisant adorer, ont maintenu leurs royaumes en justice, en paix et tranquillité, en quoi consiste la prospérité des états, et à quoi tend toujours le but d'un bon gouvernement; de ces souverains, qui reconnaissent qu'ils sont responsables à leurs peuples de leurs tems, de

leurs soins et de leur amour; de ces souverains, enfin, qui, mettant leur gloire dans le bonheur de leurs états, ont élevé leur royaume du degré d'une puissance du second ordre, au rang distingué de puissance prépondérante en Europe. Le coup d'un glaive meurtrier trancha le fil de la vie de Louis XVI: abandonnant la France, ses vertus royales cherchèrent un asile dans le cœur de Louis XVIII; et, dès ce moment, ce royaume malheureux devint le théâtre sanglant d'anarchie et de factions. Ces factions, déguisées sous différentes formes, ont été toutes d'accord dans le système de sacrifier la prospérité publique à leur propre conservation; et, se succédant l'une à l'autre, elles avortèrent enfin de la tyrannie de Bonaparte, et concentrèrent dans ses mains l'arbitraire qui, jus que-là, avait été exercé par plusieurs personnes à la fois.

A force de séductions, de supercherie et de violences, ce fils des partis parvint à se faire proclamer empereur par les peuples de la France, et, favorisé par les succès de la guerre, il réussit à se faire reconnaitre pour souverain par différens états d'Europe, qui, cependant, n'avaient pas le pouvoir d'altérer les principes éternels de la justice, et encore moins l'obligation de les maintenir jusqu'à l'extrémité, au point de risquer l'indépendance et la conservation de leurs sujets, première considération de tous les gouvernemens. L'Espagne enseigna à tous les peuples l'art de perdre le pertubateur du monde; et, à son exemple, après avoir étouffé les rivalités particulières, les puissances parvinrent à se liguer contre l'ennemi commun, et à faire la plus juste des alliances, pour rendre à la France son souverain légitime et désiré, et pour précipiter du haut de son trône le détenteur sacrilege. Celuici, toujours fertile en ressources, jamais délicat sur le choix de ses moyens, et accoutumé à donner le nom de traités à des conventions faites par la fraude et la violence, crut pouvoir conjurer l'orage en traitant avec moi à Valençay; le fruit de ses fourberies a été pour lui l'humiliation de les voir échouer. Cet insensé croyait qu'il pouvait tromper deux fois, on bien que mon coeur pouvait souffrir l'idée d'acheter la liberté, en sacrifiant le bonheur de mes peuples et en troublant la tranquillité de l'Europe. Le ciel ne pouvait que favoriser l'entreprise des souverains légitimes, si réclamée par la morale, par la religion et par l'humanité. Tout le monde commença

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