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n'était-il pas très légitime? M. Pinélès le croit, et il le démontre par l'exemple de législations étrangères qui, sans fixer autrement que la loi romaine la fonction des témoins, proclament pourtant l'incompatibilité entre les fonctions d'écrivain et de témoin du testament. Ces législations sont principalement le code civil russe et le code civil du canton de Zug de 1875.

Le code civil russe donne à la quaestio domitiana une réponse qui est le contrepied du responsum celsinum : est interdit, le cumul dans la même personne des fonctions d'écrivain et de témoin du testament (). Mais pour que ce rapprochement du droit russe tourne vraiment à la confusion de ce grossier personnage de Celsus, il faudrait qu'il fut établi que les témoins russes ne reçoivent de la loi, pas plus que les témoins romains, mission de contrôler la sincérité de l'écrit. Or, cette dernière vérification, M. Pinélês nous en reste redevable, et il est permis de s'en étonner, car il suffit d'ouvrir un traité élémentaire de droit russe pour constater que, pas plus en Russie qu'à Rome, il n'est indispensable que les témoins d'un testament privé reçoivent connaissance du contenu de ce testament (2). Les dispositions du code civil du canton de Zug, du 1er février 1875, sont semblables à celles du code civil russe : la loi proclame, d'une part, que l'écrivain du testament ne peut jamais servir de témoin, et elle déclare tout aussi catégoriquement d'autre part, que les témoins ne doivent nullement avoir connaissance du contenu du testament (3).

N'est-il point permis de formuler la conclusion suivante : Dans ces deux codes civils, comme en droit romain, la connaissance du contenu du testament par les témoins n'est pas une condition légale de la validité du testament; mais, comme il peut arriver que les témoins aient connaissance du contenu du testament et qu'ils soient ainsi mis à même en fait de vérifier la fidélité de l'écrit, cette possibilité suffit à rejeter légalement le scribe du nombre des témoins. Les scrupules de Domitius Labeo n'étaient donc pas si déraisonnables, et la grossièreté de Celsus ne se justifiait guère!

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(2) Voir, par exemple: ERNEST LEHR, Éléments de droit civil russe, II. no 611, p. 31-32, reproduit dans le Répertoire de FUZIER-HERMAN, vo Testament", n° 2647.

(3) VICTOR MAYER, loc. cit., p. 14.

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J'ajouterais volontiers que, si l'on utilise tous les matériaux fournis par M. Pinélès et son disciple M. Victor Mayer, on se trouve porté à aller beaucoup plus loin et à considérer même l'incompatibilité entre les fonctions d'écrivain et de témoin d'un testament, comme une garantie singulièrement illusoire de la fidélité de l'écrit. Car, si l'on se défie réellement de l'écrivain, ce qui importe, ce n'est pas tant de l'exclure du nombre des témoins, mais c'est surtout de ne pas se contenter de la lecture du testament qu'il ferait lui-même au testateur et éventuellement aux témoins pour contrôler efficacement la fidélité de l'œuvre du scribe, c'est la mission de donner lecture du testament, qui devrait être confiée à un tiers impartial, dont le rôle serait forcément incompatible avec celui de scribe. Or, M. Victor Mayer nous signale que cette dernière mesure de contrôle, particulièrement efficace lorsque le testateur ne sait ni lire ni écrire, - était prise par l'ancienne législation civile de Bâleville et de Mulhouse et même par le code wurtembergeois de 1610 (1). Que si, après avoir pris cette précaution salutaire, le législateur autorise cependant le cumul des fonctions de scribe avec celles de témoin, y a-t-il vraiment là un danger sérieux?

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GEORGES CORNIL.

(1) VICTOR MAYER, loc. cit., p. 20.

NOTICES BIBLIOGRAPHIQUES.

34. La mer territoriale. Études historiques et juridiques, par ARNOLD RAESTAD. Un volume de 212 pages. Paris, Pedone, 1913.

L'auteur avait déjà publié, en 1912, en norvégien, un ouvrage sur la mer territoriale, mais, ayant eu l'occasion d'approfondir certains aspects de la question, il a cru utile d'en faire paraître une nouvelle édition, refondue, en français. On ne peut que le féliciter de cette résolution, car le travail qu'il nous offre sera certainement apprécié par ceux qui s'intéressent à la délicate matière qu'il a traitée.

L'auteur suit la notion de la mer territoriale dans tout son développement. Il l'examine en droit romain, en expose l'état au moyen åge et en fait connaître la portée à l'époque moderne. Dans un dernier chapitre, il s'occupe des problèmes actuels relatifs à la mer teriitoriale, ce qui l'amène à étudier la question de l'étendue des eaux neutres en temps de guerre, des actes hostiles des belligérants dans les limites des eaux territoriales, de la pêche côtière, de la juridiction maritime et de la surveil lance douanière et sanitaire.

En ce qui concerne les actes hostiles dans les eaux territoriales, l'auteur dit qu'il y a lieu de distinguer entre les prises maritimes et les entreprises de guerre proprement dites. La neutralité des eaux territoriales doit être considérée comme absolue en matière de prises maritimes. Toute atteinte à cette neutralité constitue une infraction au droit international, même si l'État côtier a négligé toute précaution pour en assurer le respect. Il en est autrement des entreprises de guerre dans les eaux neutres. On re pourra considérer comme une infraction au droit international le fait qu'un État belligérant livre bataille dans les eaux neutres, sous la pression de la nécessité. Les termes de la convention de 1907 s'appliquent à ce cas. Les eaux territoriales d'un 'État neutre ne seront sauvegardées que si celui-ci fait tout ce qui est en son pouvoir pour empêcher les belligérants d'en faire usage. Si l'État neutre ne remplit pas cette condition, l'obligation pour les belligérants de respecter sa mer territoriale disparaît, sauf en ce qui concerne les baies et eaux intérieures qui font partie intégrante du territoire de l'État.

D. C.

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35. Le droit aérien et L'air et l'avenir, par le baron L. DE STAEL-HOLSTEIN. Deux brochures de 43 et 27 pages. Bruxelles, Van Buggenhout, 1912.

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Dans ces deux brochures, l'auteur fait l'historique du développement de la navigation aérienne, et insiste sur l'utilité d'une codification internationale en vue de réglementer le trafic aérien. Il passe en revue les mesures proposées ou déjà appliquées dans différents pays, et en signale les lacunes ou les défauts. Il insiste sur la nécessité de distinguer entre aéronefs publics et privés, de déterminer la nationalité des aéronefs, et de solutionner le problème douanier qu'ils soulèvent. Il attire aussi l'attention sur la proposition ayant pour objet de concéder les lignes de transport aériennes, et émet le vœu que la convention internationale, qui doit résoudre ces diverses questions, ne se fasse pas trop attendre, car, plus on tardera, plus il y aura de législations qui différeront entre elles. D. C.

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36. Versicherungswesen, par ALFRED MANES. Deuxième édition. Un volume de 486 pages. Leipzig, Teubner, 1913.

Ce volume forme la deuxième édition de l'étude que M.Manes a consacrée à la question des assurances, et qui a rencontré, auprès du public, un légitime succès. L'auteur y présente cette délicate matière d'une façon claire et facilement accessible à tous les lecteurs. Cela ne veut pas dire que les spécialistes n'y trouveront pas leur profit, car la connaissance particulière que l'auteur a acquise, au cours de ses voyages, de la question des assurances, lui a permis d'attirer leur attention sur des détails et des considérations, qui ne manqueront pas de les intéresser. L'ouvrage comprend deux parties, dont la première s'occupe de l'assurance en général (notion, développement et portée de l'assurance, son organisation, sa technique, etc.), tandis que la deuxième est consacrée aux différentes branches de l'assurance (vie, maladie et invalidité, transports, incendie, bétail, etc.). Un dernier. chapitre traite de la réassuD. C.

rance.

37. International law situations with solutions and notes. Un volume de 206 pages, publié par le Naval War College.-Washington, 1912.

Ce volume contient le résultat des discussions qui ont occupé, en 1902, Je Naval War College des Etats-Unis. Les questions qui ont fait l'objet des débats, au cours de cette année, ont été relatives aux navires marchands et aux insurgés, aux aéronefs en temps de guerre, à la neutralité de Cuba, aux aires stratégiques, au ravitaillement en charbon dans les ports neutres et à la conversion des navires de commerce en bâtiments de guerre.

Les discussions qui ont lieu au Naval War College réunissent des spécialistes en droit international et des officiers de la marine de guerre. Ceux-ci apportent aux débats le fruit de leur expérience et y introduisent des considérations pratiques. La lecture d'un volume tel que celui que nous avons sous les yeux présente donc un intérêt tout particulier.

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D. C.

38. Les lois de la guerre continentale, par le lieutenant ROBERT JACOMET, docteur en droit. Un volume de 160 pages. Paris, Pedone, 1913.

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Ce manuel, qui a été publié sous la direction de la section historique de l'état-major de l'armée, présente, sous la forme d'un code dont les articles sont suivis d'un commentaire approprié, les règles à suivre par l'armée au cours d'une guerre continentale. Le recueil du lieutenant Jacomet, qui n'est pas un inconnu pour nos lecteurs et qui a déjà publie un travail sur La guerre et les traités (1), est précédé d'une préface fort élogieuse de M. Louis Renault. L'éminent professeur y voit un vademecum précieux, qui servira de base aux explications que les officiers seront chargés de donner aux troupes.

Les matières sont disposées avec ordre et réparties en sections, consacrées respectivement aux belligérants, aux hostilités, à l'autorité militaire sur le territoire ennemi, aux relations entre les belligérants et à la neutralité. En annexe, on trouve d'utiles renseignements sur les prisonniers de guerre, l'administration des territoires occupés, les divers incidents que font naître les relations entre les belligérants, etc., et, enfin, le texte des conventions internationales sur lesquelles s'appuient les articles du code rédigé par l'auteur.

D. C.

39.Handbuch der Friedensbewegung. Zweiter Teil Geschichte, Umfang und Organisation der Friedensbewegung, von ALFRED H FRIED. Un volume de 491 pages. Deuxième édition, entiérement revue et augmentée. Leipzig, Reichenbach'sche Buchhandlung, 1913.

Nous avons signalé précédemment la publication du premier volume du manuel du mouvement pacifique, dû à M. Alfred H. Fried (2). Cette partie de l'ouvrage était consacrée à l'exposé des principes et du but des tendances pacifistes. Le deuxième volume, qui vient de paraître, s'occupe de l'histoire, de l'extension et de l'organisation du mouvement. Il a nécessité, de la part de l'auteur, des recherches étendues, mais nous donne, au point de vue des personnes qui se consacrent à la diffusion des idées pacifistes et des organes et revues qui défendent le programme du mouvement

(1) Voir Revue 1911, p. 195. (2) Voir Revue, 1912, p. 203.

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