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SECTION IX.

De la fin des hostilités.

ART. 116. Paix. Les actes d'hostilité doivent cesser par la signature de la paix.

L'avis de la fin de la guerre doit être notifié dans le plus bref délai par chaque gouvernement au commandant de ses forces navales.

Lorsque des actes hostiles ont été accomplis après la signature de la paix, on doit, autant que possible, remettre les choses en l'état.

Lorsqu'ils ont été accomplis après connaissance de l'avis officiel du traité de paix, ils donneront lieu à une indemnité et à la punition des coupables.

Article additionnel.

Conformément à l'article 3 de la Convention de la Haye du 18 octobre 1907 concernant les lois et coutumes de la guerre sur terre, la partie bélligérante qui violerait les dispositions du présent règlement, sera tenue à une indemnité, s'il y a lieu; elle sera responsable de tous actes commis par les personnes faisant partie de sa force armée navale.

NOTICES DIVERSES.

I. JOHN WESTLAKE ET LA SCIENCE DU DROIT DES GENS.

Dans la série, longue déjà et toujours grandissante, des hommes de talent qui ont servi la cause du droit international, John Westlake figure parmi les plus éminents. Il a dominé par le sens juridique affiné autant que par la force de l'argumentation. La pratique des affaires avait assoupli en lui la raideur et l'espèce d'obstination qui résultent trop souvent de l'étude des principes. Ses connaissances historiques étaient fort étendues et lui permettaient de donner aux problèmes du droit des gens des solutions conformes à la justice et propres à garantir les intérêts de la civilisation moderne. Il avait des vues originales, qu'il exposait avec clarté et avec concision et, en certains points, il fut un novateur. Ma tâche se borne à faire ressortir son mérite en ce qui concerne le droit international; je puis me contenter ainsi de constater que son œuvre fut considérable dans le domaine du conflit des lois et qu'ici aussi il exerça une bienfaisante action.

Après avoir fait à l'Université de Cambridge de brillantes études, John Westlake, qui se destinait au barreau, entra à Lincoln's Inn, l'une des glorieuses corporations d'avocats de Londres, le 17 novembre 1854. Il a raconté lui-même comment, pendant son stage, un de ses patrons l'engagea vivement à traiter dans un livre la matière du conflit des lois; il suivit le conseil et il publia, en 1858, le Treatise on private international law, dont la cinquième édition parut, en 1912, sous le titre : A treatise on private international law, with principal references to its practice in England. Dans la première édition, l'auteur faisait connaître la notion qu'il se formait de la discipline juridique à laquelle il consacrait son ouvrage. « Le droit international privé, écrivait-il, est la partie du droit national qui doit son origine au fait de l'existence dans le monde de juridictions territoriales différentes avec des lois différentes. » Sa place, ajoutait-il, se trouve dans le

domaine du droit national. Il est appliqué par des tribunaux nationaux; il a généralement des particuliers comme sujets, bien que ses règles s'appliquent, tout comme celles de tout autre département du droit national, aux États eux-mêmes lorsque ceux-ci se soumettent à la juridiction des tribunaux nationaux.

D'importants problèmes se posaient à cette époque dans la politique générale. L'Italie accomplissait l'unité que ses enfants les plus illustres avaient rêvée et souhaitée pendant des siècles; l'Allemagne se préparait au rôle qu'elle prétendait remplir; dans la plupart des pays de l'Europe des aspirations vers la liberté se manifestaient avec une intensité toujours plus grande. Aux États-Unis, se livrait une lutte d'une violence inouïe, dont l'enjeu était, en définitive, l'abolition de l'esclavage noir. Une phase nouvelle semblait commencer dans l'histoire de l'humanité. De fait, de grandes modifications s'introduisirent et, en ce qui concerne notamment le droit des gens, une transformation presque complète s'opéra. Dès lors, apparaissaient déjà les traits principaux d'une société des États s'étendant peu à peu sur le globe tout entier; dès lors aussi, se montrait la caractéristique principale de tous les desseins, de toutes les entreprises, de tous les achèvements, caractéristique qui se résume en ce mot: l'internationalisme.

Westlake avait l'esprit trop ouvert pour ne point saisir que la direction nouvelle était en conformité avec les intérêts mêmes du monde moderne. Il se jeta dans le mouvement et donna à l'œuvre l'assistance de sa vigoureuse intelligence et de son indomptable énergie. Deux hommes l'assistèrent, dont les noms resteront inséparables de son nom, Gustave Rolin-Jaequemyns et ThomasMichel-Charles Asser. Comme résultat final, ce concours et cette combinaison d'efforts assurèrent, on peut le dire, plus d'un progrès dans la science du droit des gens.

L'action personnelle de John Westlake se manifesta d'abord par des écrits et par des discours relatifs à certains problèmes du droit de la guerre. C'est ainsi que, le 7 novembre 1862, il soumettait à une société scientifique de Londres l'intéressant travail : On commercial blockades. La Juridical Society avait tenu sa première séance, le 12 mars 1855; elle fut assez active jusqu'en 1870, puis elle sembla se relâcher et elle tint une dernière séance au mois de mai 1874. Trois volumes et cinq livraisons renferment les études

présentées par les membres. John Westlake figura parmi les fondateurs de l'Association. Il ne fut pas seul à s'occuper du droit des gens. Un avocat, H. H. Shephard, traita de la capture de la propriété privée sur mer, et, à l'occasion de la guerre franco-allemande, un autre avocat, H. R. Droop, exposa les rapports de l'armée envahissante avec les habitants du territoire occupé et les conditions nécessaires pour que les troupes irrégulières aient droit au même traitement que les soldats réguliers.

Comme Westlake en fait l'observation dans sa savante étude, l'obligation de respecter les blocus et l'interdiction de transporter des objets de contrebande constituent les deux empiètements des belligérants sur la liberté d'action des neutres.

Au sujet du blocus, Westlake soutenait que cette mesure devait être limitée aux places fortes et aux ports militaires, et qu'elle ne pouvait pas s'appliquer aux ports de commerce. La thèse n'était point nouvelle; des traités l'avaient adoptée dans la seconde moitié du XVIIe siècle; en 1800, John Marshall, secrétaire d'État des États-Unis, l'avait soutenue incidemment; le 21 novembre 1806, dans le fameux décret de Berlin, Napoléon avait reproché au gouvernement anglais d'« étendre aux villes et aux ports de commerce non fortifiés, aux havres et aux embouchures des rivières le droit de blocus qui, d'après la raison et l'usage de tous les peuples civilisés, n'est applicable qu'aux places fortes ». En 1859, Lewis Cass, secrétaire d'État des États-Unis, venait de soutenir que le blocus d'une côte ou de positions commerciales sans rapport avec une opération militaire, dans le seul dessein de faire la guerre au commerce et, de par la nature des choses, au commerce des neutres, est difficilement conciliable avec les droits de ces derniers.

Dans l'étude qu'il présenta à la Juridical Society, le jurisconsulte anglais défendait avec force la théorie progressive dont nous avons retracé l'historique, et dont Richard Cobden venait de s'affirmer l'éloquent protagoniste. Il s'attachait surtout à réfuter l'argument suprême invoqué par les publicistes favorables aux prétentions des belligérants, à savoir la nécessité qui, selon eux, autorisait la destruction même du commerce des neutres. La question du transport des objets de contrebande n'était pas sans préoccuper Westlake; quelques années plus tard, il la traita de façon approfondie et se prononça avec netteté contre l'erreur qui consistait à

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vouloir imposer aux gouvernements neutres l'obligation de prohiber l'exportation des objets pouvant servir directement ou indirectement à la guerre. « La coutume des nations, disait-il au mois de novembre 1870 devant les membres de la National Association for the promotion of Social Science, laisse chaque belligérant libre de tirer avantage du trafic des munitions de guerre ou de la violation des blocus dont les neutres courent les risques, en tant que ces entreprises servent ses desseins; elle le laisse libre de les réprimer dans la mesure de ses forces, en tant qu'elles profitent à son adversaire. Elle l'arme à cet effet, aux dépens des neutres de deux droits importants: le droit de visite et de recherche en pleine mer et le droit de saisie et de condamnation. Les circonstances de telle guerre donnée peuvent rendre ces aventures ou très difficiles, ou très aisées, exceptionnellement avantageuses pour l'un des belligérants ou particulièrement préjudiciables pour l'autre; mais aucune de ces raisons ne fait naître pour le souverain neutre l'obligation de les arrêter, ni ne le rend coupable de malveillance ou de négligence pour n'avoir pas essayé de le faire. »

Ce fut en 1862 que commencèrent les relations de John Westlake avec quelques esprits distingués du continent européen, qui cherchaient à réaliser le même rêve : le triomphe du droit dans la société internationale. J'ai nommé deux de ces hommes: RolinJaequemyns et Asser; je dois ajouter Rivier et Bluntschli et j'aurai bientôt l'occasion de mentionner quelques autres personnalités de grand mérite.

En Angleterre, avait été fondée, en 1857, une société qui rendit des services durables: The National Association for the promotion of Social Science. C'est sur le modèle de cette société qu'un des membres, Michel Corr, Irlandais de naissance, Belge par la naturalisation, créa avec quelques amis l'Association internationale pour le progrès des sciences sociales. En des sessions qui se tinrent, de 1862 à 1865, à Gand, à Bruxelles, à Amsterdam et à Berne, l'Association internationale fit preuve d'une activité remarquable: bien des problèmes de droit, d'économie politique, d'organisation sociale furent examinés et discutés dans un esprit exempt de tout parti pris. Là, se rencontrèrent et se connurent pour la première fois Westlake et ceux qui devaient devenir ses collaborateurs.

La création de la Revue de droit international et de législation

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