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AVANT-PROPOS.

Je rassemble dans une dernière et définitive édition mes différents travaux sur l'instruction publique.

Ces travaux sont ici, indépendamment de mes deux ouvrages sur l'instruction publique en Allemagne et en Hollande 2, qui demeurent à part, quelques écrits nés des fonctions que j'ai remplies, et les discours que j'ai prononcés à la chambre des pairs dans les discussions où l'instruction publique était engagée, pendant la durée du gouvernement sorti de la révolution de juillet.

1

De l'instruction publique dans quelques pays de l'Allemagne et particulièrement en Prusse, 2 vol. in-8o, 3e édition, 1840. * De l'instruction publique en Hollande, 1 vol. in-8°, 1837.

Ce recueil contiendra donc, et c'est là le premier intérêt qu'il peut offrir, une sorte d'histoire abrégée de l'instruction publique en France, de 1830 à 1848. On y poùrra suivre les fortunes diverses de cette partie si importante de l'administration publique, ses progrès toujours croissants pendant de longues années, jusqu'à cette dernière et triste période où le gouvernement de juillet, en dépit des avertissements de ses vrais amis, abandonna dans l'enseignement, comme, hélas ! en bien d'autres choses, les principes qui faisaient son titre et sa force.

Un autre avantage plus général de ce recueil, sera de fournir aux amateurs des matières d'éducation, quelle que soit leur opinion, de nombreux documents sur toutes les questions relatives à ces matières, et d'éclairer toutes les parties du vaste domaine de l'instruction publique: ici, l'instruction primaire à ses deux degrés; là, l'instruction secondaire, avec le réglement des études qui constituent un collége accompli, l'examen du baccalauréat qui les résume et les apprécie, l'organisation du noviciat où se préparent les jeunes maîtres, etc.; enfin l'instruction supérieure et ses quatre divisions consacrées: les facultés de droit, de médecine, des sciences et des lettres. Il n'y a pas un de ces points sur lequel on ne trouve ici, exposée et développée, tantôt combattue et tantôt défendue, la pratique plus ou moins constante de la France, comme mes écrits sur la Hollande et l'Allemagne font connaître sur ces mêmes points celle des deux pays les plus avancés de l'Europe en fait d'instruction publique.

Mais il est un ordre de problèmes bien supérieurs encore à ceux-là, qui les dominent et en sont en quelque sorte indépendants; je veux parler de ceux qui se rapportent à l'organisation générale de l'instruction publique dans un grand pays tel que la France. Suffit-il à l'instruction publique d'avoir à sa tête une administration semblable à celle du commerce et de l'agriculture, des travaux publics et des finances, ou doit-elle former un corps, ainsi que l'armée, la magistrature et surtout l'Église? Le gouvernement de l'instruction publique doit-il être séculier ou ecclésiastique? ou quelle part convient-il d'y faire au clergé ? Les ecclésiastiques doivent-ils entrer dans l'instruction publique, y participer à l'enseignement et au gouvernement, sans aucune condition, à titre privilégié, et par cela seul qu'ils sont des ecclésiastiques, ou seulement en satisfaisant aux conditions imposées à tous, et en raison de leur capacité personnelle que relèverait d'ailleurs leur caractère général? Faut-il, par exemple, que les petits séminaires puissent enseigner, non-seulement à de futurs clercs, mais à toute la jeunesse française, les sciences et les lettres profanes, comme les établissements publics et particuliers, en demeurant exempts de toutes les charges que supportent ces établissements; ou, s'ils veulent jouir du bénéfice du droit commun, ne convient-il point qu'ils l'acceptent tout entier, par conséquent qu'ils justifient des grades ordinaires et se soumettent à l'inspection.commune? En général, à quelle condition doit-il être permis d'enseigner, de faire des cours publics, surtout

d'établir un pensionnat? Les institutions particulières doivent elles relever seulement des autorités prépo

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sées à l'ordre public, ou avoir leurs autorités spéciales? et, dans ce cas, quelles seront ces autorités ? quelle doit être l'étendue du pouvoir de chacune d'elles, et quel lien les doit unir pour former un système de gouvernement qui se puisse appliquer à toutes les écoles répandues sur la surface du territoire? Dans l'état présent des choses, quelles sont les vraies et nécessaires attributions, et quelle est la meilleure composition de nos deux grandes magistratures d'instruction publique, les conseils académiques, provinciaux ou départementaux, et le conseil suprême placé au sommet de la hiérarchie et à côté du ministre? Voilà des problèmes d'un immense intérêt moral et politique, et qui sont ici traités avec un soin et une étendue égale à leur importance. On sait quelles solutions j'en ai données ou plutôt acceptées : ce sont celles de la révolution de 1789 et de l'Empire; et j'y persiste, sans obstination comme sans faiblesse.

Je suis toujours pour une administration de l'instruction publique organisée sous la forme d'un corps : j'entends un corps purement civil, fondé sur la double base de la liberté de conscience et de l'égalité devant la loi, ouvrant indistinctement ses écoles aux enfants de tous les cultes, recrutant ses membres, ses professeurs et ses magistrats de tout ordre, parmi les laïques et les ecclésiastiques, selon leur mérite personnel, embrassant tous les établissements privés et publics sous une juridiction com

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