Images de page
PDF
ePub

son approvisionnement. Le pays jusqu'au fleuve a plutôt le caractère d'une vaste steppe; pendant l'été, la plupart des rivières et cours d'eau sont à sec; la température des nuits était plutôt fraîche; en juillet elle accusait 15o. La végétation change d'aspect sur les bords du fleuve en lieu et place des mimosas et gommiers, c'est le palmier et le figuier qu'on voit partout. Le fleuve est profond, son cours est rapide, mais il n'a guère que 40 mètres de largeur. Des crocodiles, d'énormes silures et des tortues gigantesques peuplent les eaux. Sur les rives on voit d'innombrables hérons, des échassiers et même l'ibis sacré. L'expédition n'aperçut ni un éléphant, ni un rhinocéros. Le type des indigènes change brusquement dès qu'ont atteint le Webbi, c'est celui du nègre. Des esclaves travaillent et cultivent le sol qui est fertile et produit en abondance le maïs et la doura, dont on emplit d'innombrables huttes coniques. La culture du coton est très étendue et les indigènes confectionnent un tissu grossier, mais solide. L'expédition comptait atteindre les vallées du Djuba vers le milieu d'octobre.

Le dernier numéro du Deutsches Kolonialblatt publie les nouvelles suivantes du D' Peters. Le 24 septembre, le commissaire impérial allemand s'est rencontré à Taveta avec le capitaine Bateman, représentant britannique, pour préparer la délimitation entre les territoires allemands et anglais dans cette partie de l'Afrique. Le Dr Peters avait avec lui Jean, conducteur de compagnie, et le baron von Pechmann, plus 50 Soudanais et 14 askaris souahéli. Le lieutenant Bronsart von Schellendorf était encore en expédition à Masindi pour escorter des matériaux et des charges. De concert avec le capitaine Bateman, un combat fut livré à Kororo, sultan des Wa-Rombo; puis, le lieutenant von Schellendorf arrivé le lendemain ayant pris la défense de la station, l'expédition du Dr Peters marcha vers Useri Kimangâlia. Ce district, comme au reste tout le versant nord du Kilimandjaro, est un haut plateau pauvre en eau. La population se montra pacifique. Le Dr Peters descendit ensuite dans la vaste steppe des Masaï, marcha vers le ravissant lac Dchala, sur les rives duquel il arbora le drapeau allemand; le 3 octobre il atteignit la station du Kilimandjaro.

Le Mouvement géographique a reçu de Berlin l'annonce de la découverte, par Émin-pacha et le D' Stuhlmann, de la branche la plus méridionale du Nil, le fleuve Kifou, entre les lacs Victoria, Albert-Édouard et Tanganyika. D'après une hypothèse émise par M. A.-J. Wauters, ce cours d'eau aurait ses sources dans l'Uhha, district dépendant de l'Ou-Nyamouési, par environ 4o lat. sud; il coulerait du sud au nord sur un parcours de 350 à 400 kilom. et déboucherait à la rive méridionale du lac AlbertÉdouard. Les explorateurs auraient, d'autre part, constaté que la rivière

Kagera, affluent occidental du lac Victoria, serait loin d'avoir le développement que lui a supposé Stanley et qu'indiqueraient, d'après lui, toutes les cartes d'Afrique, ses sources ne dépassant pas le 2o lat. sud. Si ces deux nouvelles se confirment, la carte de la région comprise entre les trois lacs devra subir de grandes modifications pour donner place au bassin du Kifou qui constituerait la branche supérieure la plus méridionale du Nil.

A l'appui de son hypothèse, M. Wauters a accompagné l'annonce de cette découverte d'un croquis provisoire montrant sommairement les résultats géographiques de l'exploration d'Emin et les changements que devrait subir l'hydrographie de cette partie du continent. Le lac Alexandra, dont l'existence avait été signalée par Stanley, d'après des renseignements d'indigènes, devrait disparaître des cartes, ainsi que la section de rivière qui le relie au Kagera. Toute la région située au S.-S.-E. du lac Albert-Édouard, jusqu'à l'Uhha, par 3° 30′ ou 4° lat. sud, appartiendrait à la branche occidentale du Nil, laquelle porterait successivement les noms de Kifou et de Semliki, et alimenterait le lac Albert-Édouard d'abord, le lac Albert ensuite, pour se joindre, à l'issue septentrionale de ce dernier, à la branche orientale du Nil sortie du lac Victoria. Le mont Mfoumbiro dont les sommets s'élèvent à environ 3000 mètres, par 1° 20′ lat. S. et 30° 4′ long. E., appartiendrait à la chaîne de montagnes formant la ligne de partage des eaux entre les bassins de la Kagera à l'est et du Kifou à l'ouest. Le bassin du Malagarasi, affluent du Tanganyika, serait vraisemblablement diminué également; les rivières Loukoki et Mérou, traversées par Stanley en 1876, devraient lui être enlevées pour être attribuées au bassin du Kifou. Le cours du Roufidji, qui se jette à l'extrémité nord du Tanganyika, devrait diminuer d'importance ou s'infléchir vers l'ouest. A travers le blanc ainsi élargi des cartes, coulerait, dans une direction générale S.-S.-E.-N.-N.-O., le Kifou, qui prendrait sa source au N.-E. d'Oudjidji, dans les plaines situées entre la rive orientale du Tanganyika et le cours supérieur du Malagarasi. Cette prolongation du Kifou-Semliki jusque vers le 4o lat. S. ferait de cette branche occidentale du Nil la source la plus méridionale du grand fleuve. En effet, les rivières Wami et Isanga qui se versent dans le Victoria-Nyanza à la côte sud, avaient été considérées jusqu'à présent comme cette source la plus éloignée de l'embouchure du Nil. Or, comme leur cours n'atteint pas le 3o lat. S., elles auraient à céder le pas au Kifou.

Le numéro du 1er décembre du Deutsches Kolonialblatt a publié des nouvelles d'Émin-pacha, rapportées par le lieutenant Sigl, qui occupe la station de Tabora. Il écrivait le 31 août : « Le Wali de Karagoué a, sur ma recommandation, envoyé des messagers de confiance avec des lettres

pour Émin. Ils ont suivi les traces du pacha jusqu'au lac Albert-Édouard, où ils ont trouvé un bateau du sultan Kalaquansa, du district de Mwamba, et ont appris des bateliers que le pacha et le D' Stuhlmann avaient campé avec tout leur monde et leurs marchandises chez le susdit sultan. Le pays de Mwamba est situé au N.-O. du lac, entre 0o et 1o lat. N., et 29o et 30o long. E. Après une navigation de sept jours, mes envoyés atteignirent le camp du pacha. Le sultan se conduisit très amicalement à leur égard et leur donna des renseignements sur la direction de la marche d'Émin. Celui-ci s'est dirigé, avec le Dr Stuhlmann, au commencement de juillet, vers Kibiro, sur le lac Albert-Nyanza, après s'être frayé, avec l'aide de Kalaquansa, un chemin à travers les grandes forêts, et s'être assuré par des présents l'amitié des indigènes. Il avait pris avec lui toutes les charges restantes et avait dit à Kalaquansa qu'il ne reviendrait pas par le même chemin. » D'après une communication publiée dans le Reichsanzeiger du 19 novembre, le lieutenant Langheld, stationné à Boukoba, avait annoncé qu'Emin s'étant avancé jusqu'à Ousongoro, au nord du lac AlbertÉdouard, s'était réuni avec ses gens de l'ancienne province de l'Équateur. Enfin, le Berliner Tagblatt du 2 décembre, parlant de 1500 fusils se chargeant par la culasse et de 7000 à 8000 se chargeant par la bouche, possédés par les anciennes troupes du pacha, ajoutait que lorsque cette nouvelle parvint dans l'Ou-Ganda, le capitaine Lugard, commandant du corps d'occupation britannique, pour le compte de la British East African Company, se mit en route avec 300 hommes de troupes régulières et 700 auxiliaires, afin d'empêcher Émin de se diriger vers le nord. Il rencontra de grandes difficultés dans la nature du terrain; en outre sa troupe étant moins nombreuse que celle d'Émin, et ses Soudanais ayant déclaré que jamais ils ne tireraient sur leurs compatriotes au service du pacha, il dut renoncer à lui barrer le chemin. Le Tagblatt donne en même temps communication d'une lettre d'Émin dont voici quelques lignes:

« Stanley ne peut cependant pas nier que sa venue ait provoqué la rébellion, ni que, de 1882 à 1888, j'aie conservé et gouverné mes provinces sans son secours. Il ne niera pas non plus que, tout en me donnant communication des offres du roi Léopold, il me conseillait instamment de les refuser; qu'au contrat par lequel je cédais mes provinces à l'Imperial British East African Company, il ne manquait plus que ma signature. Il sait enfin également que la solution de cette question est encore dans mes mains 1. >>

1 Nous saisissons cette occasion pour décliner absolument la responsabilité des erreurs et des naïvetés que nous a gratuitement prêtées M. Arthur de Claparède,

L'œuvre médicale de notre compatriote M. le Dr Liengme à Antioka, près de la baie de Delagoa, se développe. Le Bulletin de la mission romande publie de lui les nouvelles suivantes : « Le nombre de mes malades est allé en augmentant. J'ai eu l'occasion d'amputer l'extrémité de deux doigts à un jeune homme dont la main avait été mutilée par l'explosion d'une provision de poudre. Ce jeune noir est le fils d'un des principaux chefs du pays. En reconnaissance des soins donnés à son fils, le père m'a envoyé un shilling. Puis, quelques jours plus tard, il est venu luimême, accompagné d'une de ses femmes, me demander de soigner deux de ses enfants. Ils voulurent s'établir dans les champs près de la station, afin de recevoir chaque jour mes soins. Ils avaient leurs provisions avec eux. Après cela, le vieux chef, voyant que les plaies de ses enfants guérissaient rapidement. partit et revint avec six autres malades..... Pour que l'œuvre médicale prospère et qu'il soit possible d'exercer sur les malades une forte influence chrétienne et en même temps de les soigner convenablement, il faudrait pouvoir les recevoir sur la station. C'est d'autant plus nécessaire que plusieurs viennent de très loin..... Il est rare qu'un malade vienne seul; le plus souvent il est accompagné d'un ou de plusieurs de ses parents. Mon plan serait de faire construire plusieurs huttes, petit à petit, par les patients eux-mêmes; ils devraient se procurer leur nourriture et de plus travailler quand ils le pourraient. En outre, j'exigerais des malades ne séjournant

directeur du Globe, organe de la Société de Géographie de Genève, dans un soidisant extrait de procès-verbal de la séance dans laquelle, à la demande du président, M. G. Rochette, nous avions rendu compte du retour d'Émin-pacha avec Stanley (Voy. Globe, t. XXIX, p. 48). L'honorable secrétaire des séances, M. H. Welter, en est également innocent. La paternité en appartient tout entière à M. A. de Claparède qui, pour se faire autoriser par ses amis de l'administration à substituer une page de sa plume au procès-verbal, très court d'ailleurs, d'un très bon français et exempt d'erreurs, adopté par la Société, a surpris leur bonne foi en leur faisant croire que la rédaction de M. Welter renfermait des traits d'hostilité à l'égard de Stanley. A toutes nos demandes de rectification, il n'a été répondu que par le silence. Nos abonnés apprécieront à leur juste valeur ces procédés de falsification. Trompés par M. le directeur du Globe, ses amis n'ont pas osé reconnaître auprès des lecteurs du journal de la Société que leur bonne foi avait été surprise, et ils se sont vus impuissants à faire avouer à M. de Claparède la paternité de cette page où l'ignorance le dispute au ridicule; son obstination à en faire peser la responsabilité sur nous, semblerait indiquer chez lui l'intention de nuire à l'Afrique; nos lecteurs sauront rendre à chacun ce qui lui est dû; si ceux du Globe sont trompés, ils ne le doivent qu'à M. le directeur du journal de la Société de géographie de Genève et à ses amis de l'administration.

pas sur la station qu'ils apportassent des provisions comme paiement; c'est la seule chose qu'on puisse leur demander. Je compte aussi faire des tournées médicales d'évangélisation. J'irais dans un groupe de villages; je soignerais les malades, et je profiterais de l'occasion pour les évangéliser d'une manière ou d'une autre. En ayant quatre ou cinq endroits bien choisis, que je visiterais régulièrement, je réunirais vraisemblablement chaque fois bon nombre de personnes. »

Une dépêche de Capetown, en date du 3 décembre, a annoncé que le roi des Ma-Tébélé, Lo-Bengula, a conclu avec le représentant de la South African Company un arrangement qui donnerait à la Compagnie le droit de s'établir dans le Ma-Tebeleland et de l'administrer exclusivement. Nos lecteurs se rappellent que, malgré les sommes payées à Lo-Bengula, et les présents de fusils Martini-Henri avec leurs munitions, ce souverain n'avait jusqu'ici accordé à la Compagnie de M. Cecil Rhodes que le droit de fouiller le sous-sol de son pays et d'en extraire, sous certaines conditions, l'or qui y est contenu; mais jamais il n'avait voulu abandonner aucun de ses droits politiques de souverain, ni même céder aux sujets britanniques la propriété d'aucune des portions cultivables de son royaume. Et comme les Ma-Tébélé sont une race belliqueuse et que leur armée est fortement constituée, il n'y avait pas à chercher à user de contrainte envers eux. Les termes du traité n'ont pas encore été publiés; mais, d'après la dépêche susmentionnée, Lo-Bengula aurait accepté un vrai protectorat de la part de l'Angleterre. Ce serait une compensation à la déception qu'à eue M. Cecil Rhodes dans un voyage qu'il a fait au Ma-Tebeleland et au Ma-Shonaland, où il a constaté que les territoires déjà occupés par la South African Company sont infiniment moins riches en ressources minières qu'on ne le croyait, ayant été exploités et épuisés par les occupants antérieurs. Lord Randolph Churchill, qui a consacré à l'étude du pays les loisirs que lui ont laissés ses puériles aventures de chasse aux lions, a fait, dans ses lettres au Daily Graphic, un rapport tout aussi peu conforme aux espérances caressées par les fondateurs de la South African Company.

Nous extrayons ce qui suit d'un rapport du D' Schröder, médecin d'étatmajor au Cameroun : « Le 8 octobre, je vaccinai, avec de la lymphe que le docteur de l'expédition Gravenreuth avait apportée de l'Institut vaccinal royal de Berlin, et qui n'avait que 5 ou 6 semaines, 51 hommes (21 jeunes Krou et 30 Dahoméens) et 18 femmes; 13 Krou, 24 Dahoméens, soit 74% eurent des boutons bien développés. Presque toutes les femmes affirmèrent avoir eu la petite vérole; la vaccine ne prit que chez six d'entre elles. » Le résultat obtenu a engagé le Dr Schröder à faire venir de Berlin

« PrécédentContinuer »