Astre des nuits, écoute mes accens! Dans ma douleur, à quels dieux, à quels charmes, Cet enchanteur aussi doux qu'inhumain ! Puis me parla comme parle un amant. On ne trouve point ces grands mouvemens des passions dans les Idylles de Bion et de Moschus; mais elles sont pleines d'esprit, de grâce et de délicatesse. Une des plus jolies pièces de Moschus est cette prière à l'étoile du soir : O Vesper! étoile dorée De la Déesse des Amours! Mais j'aime, et la nature entière Doit favoriser mon destin. moins gracieuse. Un jour, dans le fond d'un bocage, Ah! dit l'enfant, la belle proie! Fondre sur lui comme un vautour. L'Amour rompt le piége, et s'envole. Prit, en souriant, la parole; Jeune imprudent, bénis sa fuite! La simplicité et la naïveté sont inséparables du genre pastoral. Sans doute le style doit être plus élevé que celui des bergers; mais que l'on se figure des bergers de l'âge d'or, et que l'on écrive à-peu-près comme ils auraient parlé. Le style de l'Idylle et de l'Eglogue est celui de la nature; il se nourrit d'images. Les bergers attachent leurs idées et leurs expressions aux circonstances qui leur sont accoutumées. Dans le langage le plus familier les habitans des campagnes expriment le retour du printemps ou l'arrivée de l'automne par la chute et le retour des feuilles. Il en est ainsi de la plupart de leurs locutions. C'est surtout dans la poésie qu'on peut les transporter avec succès. Il ne faut pas non plus, comme dit Boileau, présenter de basses circonstances ; il ne faut prendre de la vie champêtre que son calme, sa douceur, et ceux de ses travaux qui n'ont rien de grossier. Les modernes ont eu dans la poésie pastorale moins de succès que les anciens, soit parce que la nature n'en avait pas mis le modèle si près d'eux, soit parce que les écrivains qui s'y sont exercés avaient moins de talent poétique; cependant Segrais (1), madame Deshoulières (2), Fontenelle (3), Berquin (4), Léonard (5) s'y sont distingués. (1) Segrais (Jean-Regnauld), né à Caen en 1624, y mourut en 1701, de l'Académie Française. (2) Deshoulières (Antoinette du Ligier de la Garde), naquit à Paris en 1638, et y mourut le 17 février 1694. (3) Fontenelle (Bernard Bouvier de), né à Rouen le 11 février 1657, mort à Paris doyen de l'Académie Française, le 9 janvier 1757. (4) Berquin, né à Bordeaux, mort à Paris le 21 décembre 1791 (5) Léonard (Nicolas-Germain), né à la Guadeloupe en 1744, mort à Nantes le 26 janvier 1793. |