L'airain, le marbre et le cuivre Le corps, Mais toi, dont la Renommée Pasteurs, soit sa tombe verte Dites à vos brebiettes : Dites qu'à tout jamais tombe Id. et Égl. 16 Dites aux filles du ciel : Ombragez d'herbes la terre, Pasteurs, si quelqu'un souhaite Le laurier, ou qu'il se plonge Semez après milles roses, D'après la lecture de ces deux églogues, il ne nous serait pas difficile de prouver ce que nous avons avancé, que la poésie pastorale, comme la poésie en général, ne date en France, pour le goût, les principes et la pureté du langage, que de Malherbe et de Racan. Il faut convenir cependant que, dans son poëme de la Franciade, Ronsard a des tirades qui ne sont pas à dédaigner ; je ne citerai que celle-ci sur les Effets de l'Hérésie. Ce tableau doit être pour nous d'une vérité bien frappante: Ce monstre arme le fils contre son propre père; Morte est l'autorité; chacun vit à sa guise: On trouve dans Ronsard beaucoup de morceaux de cette force d'idées ou d'images : il avait le génie poétique; mais Boileau l'a trèsbien jugé quand il a dit, après avoir parlé de Marot : Ronsard, qui le suivit, par une autre méthode Remi Belleau, dont le nom se trouve inscrit dans la Pléïade Française, c'est-à-dire au nombre des sept meilleurs poëtes de son temps, fut un des plus dignes imitateurs de Ronsard, qui le nommait le peintre de la na türe (i). ÍÍ jeta quelquefois de l'obscurité dans son style, soit en créant de nouveaux mots, soit en détournant le sens de ceux qui existaient déjà; mais il a souvent l'expression libre et hardie, de l'élégance et de la grâce. Il a rimé quelquefois négligemment ; mais il s'est t; régulièrement asservi au mélange alternatif des rimes masculines et féminines. L'églogue suivante, adressée au Printemps. sous le nom du mois d'Avril, est un petit chef-d'oeuvre pour le temps où il vivait, tant par la finesse des expressions, que par la coupe et la contexture des vers: AVRIL, l'honneur et des bois Et des mois; Avril, la douce espérance (1) Il naquit à Nogent-le-Rotrou au commencement de 1528, et mourut à Paris le 6 mars 1577. Il parut sur sa mort des vers dans toutes les langues mortes ou vivantes, et ses amis portèrent son corps sur leurs épaules jusqu'à l'église des Grands- Augustius, où il fut inhumé. |