SILVARETTE. Détrompez-vous, Thémire; une innocente ruse, A Daphnis, en passant, je jetai mon bouquet. L'abbé MANGENOT. TIRCIS ET CLIMÈNE. TIRCIS. CLIMÈNE, arrêtons-nous; laissons dans la prairie CLIMÈNE. Je le veux bien, Tircis; mais ne fais point l'amant. Tu me jures toujours la flamme la plus tendre; Si tu veux m'en parler, je ne veux plus t'entendre. TIRCIS. Eh bien, Climène! eh bien, je contraindrai mes feux: Je ne te dirai point tout ce que ton absence CLIMÈNE. Ah, berger! je te laisse. Tu n'en veux point parler, tu m'en parles sans cesse. Demeure, c'en est fait. TIRCIS. CLIMÈNE. Au moins, songes-y bien; Au moindre mot, je fuis. TIRCIS. Je ne te dis plus rien. Vois-tu sur ce coteau Silvandre et Célimène? L'amour les a liés de la plus douce chaîne. Regarde ce berger, dont le tendre hautbois De son aimable amante accompagne la voix: Les oiseaux atientifs suspendent leurs ramages; Ils inspirent l'amour aux cœurs les plus sauvages ; Ils sont toujours aimés et toujours amoureux; Le bonheur véritable est d'être unis comme eux. CLIMÈNE. Depuis quand cet amour? car avant mon absence Je n'ai point remarqué la même intelligence; Avec soin Célimène évitait le berger. TIRCIS. Apprends par quelle adresse il a su l'engager. Il conduisait toujours son troupeau près des siens. Et, caressant l'oiseau, lui tenait ce langage: Combien de fois depuis elle entendit ces mots! « Quoi! serait-il donc vrai que Silvandre m'adore? » Disait-elle : je crains toujours de m'en flatter; » Mais je me suis réduite à n'en pouvoir douter. » Hélas! il ne pouvait choisir un cœur plus tendre. » Je m'en défends en vain: je n'aime que Silvandre». Je n'aime que Silvandre était son seul discours. Elle voulait se taire, et le disait toujours. Un jour qu'on célébrait la fête de Cythère, Silvandre en veut lui-même avertir sa bergère. Il lui porte un bouquet. Il se croit trop heureux Si la belle veut bien s'en parer dans les jeux. Mais quel bonheur plus grand vient alors le surprendre! Et dont, sans le savoir, on l'avait trop instruit. « Quoi! dit-il, votre cœur voudrait-il s'en dédire ? »> CLIMÈNE. L'aventure est plaisante, et l'adresse est nouvelle ; Elle méritait bien de vaincre une cruelle. TIRCIS. Je dois bientôt t'offrir un oiseau que j'instrui (1). CLIMÈNE. Je me garderai bien de parler devant lui. *** (1) Il faut convenir que cette licence de rime passe les bornes de la permission; elle aurait suffi pour nous faire repousser cette églogue, si nous n'eussions reconnu dans son ensemble la grâce et la simplieité qui doivent distinguer ce genre de poésie. |