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>> J'ai de l'or, des troupeaux, et de vastes campagnes; » Tu jouiras d'un sort au-dessus de tes vœux, » Et tu feras envie à toutes tes compagnes ». Je répondis: << Lamon, tu peux garder ton or ; » Mirtil m'aimait, et sa tendresse

» Etait pour Lucette un trésor :

» Mirtil ne m'aime plus... j'ai perdu ma richesse ;
» Mais quoique le perfide ait trahi sa promesse,
Je sens bien que je l'aime encor! >>

O Dieu! que j'ai souffert dans cette nuit cruelle!
Je disais en pleurant : Je veux aller revoir
Les lieux où tant de fois j'ai trouvé l'infidèle,
Et j'y mourrai de désespoir.

Je suis venue ici, livrée à mes alarmes;
J'ai senti mon cœur battre, alors que je t'ai vu;
Je cherchais un ruban qui n'était point perdu;
Mais je voulais cacher le sujet de mes larmes.

LÉONARD.

LES OISEAUX.

L'AIR n'est plus obscurci par des brouillards épais ;
Les prés font éclater les couleurs les plus vives;
Et dans leurs humides palais

L'hiver ne retient plus les naïades captives;
Les bergers, accordant leur musette à leur voix,
D'un pied léger foulent l'herbe naissante ;

Les troupeaux ne sont plus sous leurs rustiques toits; Mille et mille oiseaux à la fois,

Ranimant leur voix languissante,

Réveillent les échos endormis dans ces bois :

Où brillaient les glaçons on voit naître les roses.
Quel dieu chasse l'horreur qui régnait dans ces lieux?
Quel dieu les embellit? Le plus petit des dieux

Fait seul tant de métamorphoses:

Il fournit au printemps tout ce qu'il a d'appas.
Si l'Amour ne s'en mêlait pas,
On verrait périr toutes choses;
Il est l'âme de l'univers :

Comme il triomphe des hivers

Qui désolent nos champs par une rude guerre,
D'un cœur indifférent il bannit les froideurs. -
L'indifférence est pour les cœurs

Ce que l'hiver est pour la terre.

Que nous servent, hélas ! de si douces leçons ?
Tous les ans la nature en vain les renouvelle ;
Loin de la croire, à peine nous naissons,
Qu'on nous apprend à combattre contre elle.
Nous aimons mieux, par un bizarre choix,
Ingrats, esclaves que nous sommes !
Suivre ce qu'inventa le caprice des hommes,
Que d'obéir à ses premières lois.

Id. et Eg.

Que votre sort est différent du nôtre,

Petits oiseaux qui me charmez!

Voulez-vous aimer, vous aimez ;

Un lieu vous déplaît-il, vous passez dans un autre.
On ne connaît chez vous ni vertus ni défauts;
Vous paraissez toujours sous le même plumage;
Et jamais dans les bois on n'a vu les corbeaux
Des rossignols emprunter le ramage.
Il n'est de sincère langage,

Il n'est de liberté que chez les animaux !
L'usage, le devoir, l'austère bienséance,

Tout exige de nous des droits dont je me plains,
Et tout enfin du cœur des perfides humains
Ne laisse voir que l'apparence.

Contre nos trahisons la nature en courroux
Ne nous donne plus rien sans peine :
Nous cultivons les vergers et la plaine,
Taudis, petits oiseaux, qu'elle fait tout pour vous.
Les filets qu'on vous tend sont la seule infortune
Que vous avez à redouter.

Cette crainte nous est commune :
Sur notre liberté chacun veut attenter;

Par des dehors trompeurs on tâche à nous surprendre. Hélas! pauvres petits oiseaux,

Des ruses du chasseur songez à vous défendre :

Vivre dans la contrainte est le plus grand des maux!

M.m. DESHOULIÈRES.

MES OISEAUX.

MEs chers petits oiseaux, ne me quittez jamais;
Ah! combien de baisers, quels soins je vous prométs!
Cessez de vous former une image flatteuse
De cette liberté, pour vous si précieuse!
En butte à d'effrayans revers,
Elle vous est souvent bien dangereuse.
D'un vol léger parcourez-vous les airs;
Rien ne saurait vous y défendre

Des serres de l'autour qui cherche à vous surprendre.
Gardez-vous de tenter des efforts indiscrets:
Mes chers petits oiseaux, ne me quittez jamais!

Dans ce temps des métamorphoses,

Où tout renaît, où, le front ceint de roses,
L'amante des zéphirs ramène les beaux jours ;
Quand nos sombres forêts nous offrent des séjours
Qu'aux plus riches lambris la volupté préfère;
Si ce dieu, qui se glisse au sein d'une bergère,
Sait vous blesser aussi des mêmes traits que nous;
Si l'amour, sous d'épais feuillages,

Vous inspire ces chants si variés, si doux,
Dont reteutissent nos bocages,

Jouissez-vous en paix de ce riant destin?

C'est peu de redouter les vents et les orages;

D'un enfant la barbare main

Vous enlève ces nids, industrieux ouvrages,
Où de vos tendres feux vous renfermiez les gages:
Far des accens plaintifs exprimant vos regrets
Et la douleur qui vous déchire,

Vous éprouvez alors que les malheurs sont faits
Pour vous, pour tout ce qui respire....
Mes chers petits oiseaux, ne me quittez jamais!

Quand la neige a couvert la cime des montagnes,
Quand l'aquilon fougueux désole nos campagnes,
Comment passeriez-vous cette rude saison ?
A peine, pour asile, auriez-vous un buisson;
Vous ne trouveriez plus de grain ni de verdure;
Vous péririez bientôt de faim et de froidure;
Mais je me chargerai de veiller sur vos jours.
Dans un réduit bien clos nous resterons ensemble:
Un air calme, un air doux y régnera toujours.
Oh! que vous bénirez la main qui vous rassemble,
Qui prévient, satisfait vos goûts et vos besoins!
De ce plaisir si pur j'aurai peu de témoins ;
Un triste isolement suit de près l'infortune.
On me croit des amis; mais en ai-je de vrais,
Un seul que mon aspect ne glace et n'importune?
Mes chers petits oiseaux, ne me quittez jamais!

Cui, je veux entre vous partager ma tendresse.
Captivez à la fois mon oreille et mes yeux :

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