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Tantôt du lis naissant tu dérobes l'émail;
Tantôt, malgré son épine cruelle,
Vainqueur de la rose nouvelle,
Tu ravis son brillant corail;

Toutes les fleurs reçoivent tes caresses;
Toutes les fleurs te cèdent leurs richesses,
Bien différent des mortels malheureux,
Qui souvent ferment la paupière

Sans avoir pu goûter dans leur longue carrière
Le moindre des plaisirs, objet de tous leurs vœux.
Il est vrai qu'abusé par la flamme infidèle,
Tu vas lui confier ton aile,

Et te livrer toi-même à son éclat trompeur:
Mais si la mort interrompt ton bonheur,
Ton dernier vol au moins t'emporte au-devant d'elle;
Tu meurs l'heureux jouet d'une agréable erreur ;
Et l'être infortuné que la raison éclaire,
Qui de cet avantage ose tant se flatter,
Ne tire d'autre fruit de sa triste lumière
Que de prévoir sa fin, qu'il ne peut éviter.

D'ARNAUD.

LA VIOLETTE.

AIMABLE fille du Printemps,
Timide amante des bocages,
Ton doux parfum flatte mes sens,
Et tu sembles fuir nos hommages.

Semblable au bienfaiteur discret
Dont la main secourt l'indigence,
Tu me présentes le bienfait,
Et tu crains la reconnaissance.

Sans faste, sans admirateur
Tu vis à l'oubli condamnée,
Et l'oeil cherche encore ta fleur
Quand l'odorat l'a devinée.

Pourquoi tes modestes couleurs
Au jour n'osent-elles paraître ?
Auprès de la reine des fleurs
Tu crains de t'éclipser peut-être?

Rassure-toi; près de Vénus

Les Grâces nous plaisent encore :
On aime l'éclat de Phébus

Et les doux rayons de l'Aurore.

N'attends pas les succès brillans
Qu'obtient la rose purpurine;
Tu n'es pas la fleur des amans;
Mais aussi tu n'as pas d'épine.

Partage au moins avec ta sœur
Son triomphe et notre suffrage:
L'Amour l'adopte pour sa fleur;
De l'Amitié sois l'apanage.

Viens prendre place en nos jardins;
Quitte ce séjour solitaire;
Je te promets tous les matins
Une onde pure et salutaire.

Que dis-je ? non,

dans ces bosquets

Reste, violette chérie :

Heureux qui répand des bienfaits,

Et, comme toi, cache sa vie!

CONSTANT DUBOS.

LA VIOLETTE.

O fille du Printemps, douce et touchante image

D'un cœur modeste et vertueux,

Du sein de ces gazons tu remplis ce bocage
De tes parfums délicieux.

Que j'aime à te chercher sous l'épaisse verdure
Où tu crois fuir mes regards et le jour!
Au pied d'un chêne vert, qu'arrose une onde pure,
L'air embaumé m'annonce ton séjour.

Mais ne redoute pas cette main généreuse:
Sans te cueillir j'admire ta fraîcheur;
Je ne voudrais pas être heureuse
Aux dépens même d'une fleur.
Reste sur ta tige flexible,

Jouis des beaux jours du printemps;

Que les Zéphirs rafraîchissans,
Que ces rameaux et ce lierre sensible
Te défendent, l'été, des rayons dévorans!
Que l'automne aussi fasse éclore
Autour de toi des rejetons nombreux!
Que de l'hiver le souffle rigoureux
S'adoucisse et t'épargne encore!

Ah! comme ton parfum, dont la suave odeur
S'exhale dans les airs sans dévoiler tes charmes,
Que ne puis-je du pauvre, en essuyant les larmes,
Lui dérober l'aspect du bienfaiteur!

Timide comme toi, je veux dans ma retraite
Et dans l'oubli passer mes jours;

Un peu d'encens vaut-il ce trouble qui toujours
Poursuit notre gloire inquiète?

Simple en mes goûts, de paisibles loisirs
Rendent mon âme satisfaite;

Mon nom contente mes désirs,.*

Puisque l'Amitié le répète.

L'avenir m'oublîra; mais, chère à mon époux,
Dans mon enfant trouvant mon bien suprême,
Bornant ce monde à ce que j'aime,

Je n'étonnerai point le vulgaire jaloux.
Oui, comme toi, cherchant la solitude,
Ne me plaisant qu'en ces vallons déserts,
J'y viens rêver, et soupirer ces vers

Qui ne doivent rien à l'étude.

M.me BEAUFort-d'Hautpoul.

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