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l'étendue du College, ainfi qu'un traitement plutôt Militaire qu'Eccléfiaftique, que le caractere bizarre & la conduite irréguliere de quelques Supérieurs étrangers rendoient encore plus infupportable.

Ce fut alors, Meffeigneurs, qu'un mécontentement amer fe faifit de tous les efprits, que des Supérieurs mal-adroits pouffoient à bout par des loix puériles par leur ignorance & leur irréligion manifefte, ainfi que par leurs diffentions fcandaleufes, qui ne difcon tinuoient pas de s'élever parmi eux: le ridicule qu'ils affectoient éternellement de jetter fur les Evêques, n'y entra pas pour peu de chofe, & malheureufement le mécontentement devint trop général; il éclata.

Nous ne parlerons point, Meffeigneurs, des moyens inouis, dont on fe fervit pour l'étouffer; toute la patrie n'en fut que trop fcandalisée : auffi ne purentils ne point contribuer à cette méfiance marquée, & à cette aigreur d'efprit qui furent de tous les tems des fources intariffables des diffentions & du défordre.

Des promeffes que firent les Supérieurs de foumettre à l'infpection des Evêques, au moins tout ce qui pouvoit toucher la pureté de la Doctrine, calmerent bientôt les efprits, les difpoferent à fupporter avec la réfignation la plus décidée, ce que le refte pouvoit avoir d'infupportable; mais que dira-t-on Meffeigneurs, à peine des Séminariftes avoient-ils vu écouler quelques jours avec cet efprit pacifique, qui fait le caractere de leur état, que tout d'un coup ils virent paroître des Réglemens d'un genre tout nouveau, qu'on leur propofoit à figner fous peine de démiffion.

Ce fut ici, Meffeigneurs, le moment de la crife. Des Allemands dont la Doctrine étoit évidemment fufpecte, propofoient des Inftituts de Doctrine & de Difcipline. Jettoit-on un coup d'œil fur ces Inftituts vantés, d'un côté l'on n'y voyoit que des

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invectives contre ce qu'on appelloit l'Hydre ultramontaine contre la bigotterie, la momerie, & autre chofe femblable , qu'ils vouloient faire paroître n'avoir été que le partage du Clergé Belgique; d'un autre côté, l'on voyoit exalter la Doctrine de plufieurs Auteurs reconnus pour dangereux, & fufpects a'néréfie. (a)

La Difcipline Eccléfiaftique la plus abfurde, la Doctrine la plus fufpecte, propofée par des Supérieurs étrangers étayés par des Militaires, à de jeunes Théologiens arrachés à leurs Evêques; quel contrafte d'idées! Ce fut alors, Meffeigneurs, qu'il fallut de la prudence, & du courage. Ce fut alors que les jeunes Théologiens affaillis de tous côtés par des promeffes fans bornes, ou par des menaces outrées répondirent unanimement: Spiritus fanctus pofuit Epifcopos regere Ecclefiam Dei: ce fut ainfi qu'ils infifterent plus vivement que jamais à ce que la Doctrine fût foumife au jugement des Evêques.

Mais quel fut l'effet de leurs juftes demandes? Les Supérieurs, toujours fideles à leur habitude de ne point tenir parole, s'oppofoient plus vigoureufement que jamais à toute relation qu'on defiroit avoir avec ceux qui de Droit Divin devoient juger de tout ce qui pouvoit toucher la Doctrine & la Difcipline Eccléfiaftique. Ils ne ceffoient de jetter du ridicule fur le pouvoir qu'on attribuoit à ces Pafteurs légitimes; ils ne rougiffoient pas d'affurer que chaque

(a) En y comprenant les Livres prônés & fuggérés dans le Plan d'Inftitut. on peut ajouter propres à conduire au Matérialisme & à l'Atheisme. L'Auteur de la Lettre & Emmannuel Flon fur le Plan des Séminaires, obferve que plufieurs de ces Ecrivains n'ont pas la tête faine; & c'est peut-être le bon moyen de les excufer; mais cela n'excuse pas le choix qu'on en fait pour corrompre la Jeuneffe Théologique, pour la rendre ignorante, déraisonnable & antichrétienne.

Théologien avoit un Droit égal à celui des Evêques, quant à ce qui concerne le jugement fur l'orthodoxie des Livres, dont il convient de faire ufage. Mille paradoxes de ce genre auffi contraires aux faints Conciles, qu'au bon fens, ne leur étoient malheureufement que trop familiers.

Ce fut à cette époque Meffeigneurs, que des Profeffeurs très-accrédités fe crurent obligés de faire cet aveu étonnant, qu'on leur propofoit à enfeigner une Doctrine hétérodoxe! que parmi les Auteurs claffiques, trois étoient notoirement hérétiques!

En fallut-il d'avantage pour s'appercevoir du danger dans lequel fe trouvoient les Supplians? Pouvoient-ils ne point fuir à grands pas ce lieu de contagion, qui n'offroit que des pieges à ceux qui ne fe fentoient pas capables d'éluder ces artifices, fi propres à rapprocher la chûte de ceux qui s'expofent au bord du précipice.

Le courage des Séminariftes l'emporta fur les maneges féduifans, infidieux qu'avoit inventé la fagacité perverfe des Supérieurs Allemands: les Supplians fe réfugierent vers leur Evêque, vers celui à qui l'Etre fuprême avoit confié le foin de les inftruire, & de les rendre dignes de l'état facré auquel ils fe croyoient appellés.

Mais le croira-t-on, Meffeigneurs, pourra-t-on fe perfuader , que ces ouailles difperfées, n'aient pas trouvé chez leur Pafteur toute la douceur, la confolation & l'afyle, qu'elles avoient droit d'en attendre à tant de titres! Il avoit plû au Gouvernement d'ériger une barriere infurmontable entre les Brebis & leur Pafteur, de les tenir éloignées à jamais du bercail que la Providence leur avoit deftiné.

Que refte-il donc aux Supplians? Frappés par la force d'un bras trop puiffant, éloignés pour toujours du facré Miniftere, auquel ils s'étoient deftinés, ils vont dans le fein de leurs familles, dans l'amertume & la désolation, perdre ce tems précieux, qui étoit

réfervé au Miniftere des Autels, au Service de Dieu & de la Patrie; ils vont arracher à leurs tendres parens des larmes qu'ils auroient dû épargner à leur vieilleffe; ils vont fe trouver les membres les plus inutiles de la Patrie; chers à la Société par les Ordres facrés qu'ils ont reçus, c'eft par ces mêmes Ordres facrés qu'ils lui font plus inutiles! Contrafte fingulier! des Citoyens deftinés au culte du Très-Haut, des Citoyens refpectés dans tous les âges, feront donc à charge à eux-mêmes, à leurs Familles, à leur Patrie!

Non, non, Meffeigneurs, nous vivons fous un Prince jufte, il ne fouffrira point que les annales de fon glorieux regne foient ternies, par le malheur d'aucun de fes fujets; fa religion eft furprise, Meffeigneurs, c'eft à vous à l'éclairer, c'eft à vous à concilier fes vaftes projets avee les Conftitutions Nationales, & le bien de l'Eglife. Si le Concile de Trente eft folemnellement reçu dans ce Pays, fi ce faint Concile a ordonné les Séminaires Epifcopaux, fi ces Etabliffemens ont leur propriété & leur exiftence civile, fi leur utilité eft inconteftable, comment cet objet échapperoit-il à vos foins paternels! iC'eft à ces caufes, Meffeigneurs, que les Sup-. plrans prennent la refpectueufe liberté de vous conju er par tout ce que la Religion & l'Etat peuvent y avoir d'intérêt, de leur accorder votre puiffante protection, de leur ouvrir cet ancien afyle, où à l'abri de la contagion du fiecle, ils puiffent être élevés & formés au faint Miniftere; c'eft fur cette illuftre Affemblée que toute la Patrie fixe actuellement fes regards, la protection qu'elle accordera aux Supplians , ne manquera pas de faire époque dans P'hiftoire.

Non, Meffeigneurs vous ne fouffrirez pas que les Supplians aient pour partage le fort le plus déplorable, & le plus affreux, ainfi que le plus inutile à la chere Patrie; vous poursuivrez dans vos glorieux

deffeins, vous ferez voir à la poftérité la plus reculée, qu'il ne peut y avoir des malheureux fous un Prince éclairé par la fageffe de nos Etats.

Ce font les vœux de

Vos très-humbles & très-
refpectueux Serviteurs,

B. van der Meusbrugghe, J. van de Putte, A.
Braemt, M. J. Bral, J. B. de Rycke, B.
Acke, J. M. A. de Volder, L. de Nobele,
L. van Crombrugghe, J. van Damme, M. Ver-
fele, C. J. de Baets, J. C. van Hemme, J.
Poelman, J. B. de Pauw, J. B. Neyt, L. J.
Vermeirsch, G. J. Nuytens, P. L. Clou, Pe-
trus Cornelis, E. Beyens, A. Mare, J. J.
Verhulst, B. Bullens, N. Hack, F. Gevaert.

REQUETE des Ecoliers en Théologie du Diecefe de Bruges, aux Etats de la Flandre, en leur Affemblée générale.

MESSEIGNEURS,

ANS un tems, que chaque Citoyen prend fon recours vers vous, les fouffignés Etudians en Théologie du Diocefe de Bruges, prennent la liberté de remontrer très-humblement :

Que les Supplians ayant embraffé l'Etat Eccléfiaftique, les uns au Séminaire-Epifcopal de Bruges, les autres dans l'Univerfité de Louvain, tous ont été appellés & concentrés dans un Séminaire-Général à Louvain.

Qu'à peine y arrivés, ils ont apperçu du premier abord, que la doctrine que l'on commençoit d'y enfeigner, étoit en plufieurs points très différente de

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