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d'autres Grands que ceux-là y fufsent affis. Il est vray que les fal. les des deux costez estoient pleines d'Officiers debout: les uns

pour autorifer par leur présence

la folennité du Couronnement: les autres pour eftre prefts d'executer les commandemens de fa Majefté, felon que le Géneral des Moufquetaires les leur faifoit entendre de fa part, comme faifant ce jour-là l'office de GrandMaistre d'Hoftel; pour marque dequoy il portoit à la main le gros bafton d'or tout couvert de pierreries avec la pomme: & fe tenoit debout à la gauche de fa Majefté dont il recevoit les or dres, ou pour mieux dire, à laquelle il les donnoit; parce que le nouveau Roy, qui n'avoit jamais rien veu de femblable, ne faifoit & ne difoit rien que ce qu'on luy dictoit.

Le chef des Aftrologues & fon collegue ayans long-temps ob

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fervé la conftitution du ciel & la difpofition des étoilles vint enfin vers les dix heures du foir don

ner avis que le temps favorable pour couronner le Roy n'eftoit plus éloigné que de vingt minuttes, fa Majefté là deffus ordonna au General Duc, felon qu'ellemefme 'auparavant avoit appris de luy qu'elle devoit le faire, 'de les conduire tous deux à prendre leurs places, & laiffa écouler une partie de ces minutes.

Elle s'entretenoit cependant tout bas avec ce General,qui l'inftruifoit de la maniere qu'il falloit qu'elle fe comportast dans les diverfes rencontres de cette ceremonie, à quoy ce jeune Prince obeïffoit exactement pour ne point faillir, faute d'experience dans une action fi publique & fi importante.

Lors qu'il ne reftoit plus que quelques momens à écouler de ces vingt minutes, le grand Aftro

logue ayant fait un figne d'œil au General des Moufquetaires,pour luy faire entendre qu'on pouvoit commencer; celuy-cy le dit au Roy, lequel fuivant l'instruction qu'il en avoit receuë fe leva debout: les Seigneurs qui estoient là affis fe leverent auffi, & en mefme temps le Géneral se jetta aux pieds de fa Majesté s'inclinant jufques à terre, puis tout à genoux il tira de fon fein & de deffous fa vefte, un petit fac où eftoit la lettre que l'affemblée des Princes envoyoit au Monarque, comme nous l'avons déja marqué. Il ouvrit le fac, il prit cette lettre, il la baifa, il la fit toucher à fon front, il la presenta à fa Majesté, & fe releva. Le Prince l'ayant receüe, la luy rendit auffi-toft & luy commanda de l'ouvrir & de la lire: ce qu'il fit tout haut diftinctement & pofément, afin que tous ceux qui affistoient à la ceremonie pûffent

entendre ce qu'elle contenoit, & appriffent que les Grands de l'Eftat, tous d'une voix avoient élû le Prince là prefent pour Roy de Perfe, qu'ils le reconnuffent pour tel, & pûffent auffi en rendre témoignage s'il en eftoit befoin. Comme il eut achevé de la lire, le Roy luy commanda de faire venir l'Ancien de la Loy, ce qu'il fit, & alors ce Seigneur ancien s'eftant approché de fa Majefté, fe jetta à fes pieds, & aprés le falut accoûtumé, tel que nous l'avons décrit, il se releva & prit de la main du General la lettre qui venoit d'eftre leüe, pour la reconnoiftre & l'autorifer, verifier les fceaux, & attefter que cette lettre eftoit veritable. Car c'est à luy que cette reconnoiffance appartient comme Chef de la Loy & du Spirituel. L'ayant prife & portée à fa tefte par refpect, il la leut & regarda les sceaux, puis l'alla remettre devant le Roy,

avec trois inclinations de tefte, aprés qu'il fe fut mis à genoux. Par cette humble posture il montroit d'approuver cet écrit, & que l'élevation du Prince à l'Empire eftoit legitime. Pendant le que Iuge fpirituel eftoit occupé à cela, le Géneral des Moufquetaires écoutoit la resolution que prendroit fa Majefte fur la demande qu'il luy avoit faite du nom qu'il luy plairoit de porter, & fi c'eftoit fous celuy qu'elle avoit déja, ou fous quelque autre nouveau qu'elle vouloit estre couronnée. Le Prince répondit, que pour changer de qualité il ne vouloit point changer de nom, & qu'il retenoit celuy de Sefié, qui luy avoit efté donné dés fes premieres années. Le General rapporta cette volonté du Roy à l'Ancien de la Loy qui s'eftoit relevé des pieds du Prince & y avoit laiffé la lettre. Ces deux Seigneurs à l'instant, l'Ancien de

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