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la Loy à la droite, le General des Moufquetaires à la gauche, conduifirent fa Majefté à ce petit fiege d'or fervant de trône dont nous avons tantoft parlé, qui eftoit au milieu de la falle, fur le. quel l'Ancien de la Loy la pria de s'affeoir: ce qu'elle fit en la maniere qu'on luy avoit marquée felon les regles de la Religion, qui eft d'avoir le vifage tourné vers le Kaaba ou l'Oratoire de la Méque. Alors l'Ancien de la Loy s'eftant affis fur fes talons, qui est la pofture où les Mahometans fe mettent quand ils veulent prier Dieu, ou qu'ils fe trouvent en la prefence de quelques perfonnes qualifiées à quelques pas de fa Majefté, découvrit la couronne, l'épée & le poignard, & enfuite prononça une priere à Dieu qu'il commença par une Confeffion de leur Foy en abregé, & finit par une benediction fur les ornemens Royaux destinez à la ceremonie

du Couronnement. Elle ne dura pas plus de demy-quart-d'heure; & s'eftant relevé il prit l'épée, la ceignit au cofté gauche de fa Majesté, luy mit le poignard au cofté droit. Enfuitte ayant fait figne au grand Chambellan d'ofter la tocque de deffus la tefte du Roy, il mit en la place le Taagh ou la couronne, en prononçant quelques verfets de l'Alcoran qui venoient à propos. Ce qu'il avoit auffi fait auparavant, lors qu'il avoit ceint au Prince l'épée, & attaché le poignard.

Il finit & laiffa la place à Mirza Refia ce grand & fçavant Docteur dont nous avons parlé, qui fe prefenta pour faire le Kotbé. Ce mot en fon origine fignifie priere: mais il donne à entendre une priere en forme de harangue, & peut-eftre luy pourroit-on donner le nom d'oraison.

Par une ancienne couftume au de là de toute memoire, ces for.

tes d'oraisons doivent toûjours eftre divifées en quatre points, durer une demie heure, & avoir toûjours une mefme matiere. Il ne reste à l'Orateur que la liberté de changer les termes & le ftile, & de donner un nouveau tour à fes pensées.

La premiere partie s'appelle Hamde-Koda, loüange à Dieu, parce que l'Orateur n'y expose autre chofe, qu'une action de graces qu'on luy doit rendre continuellement de tous fes bienfaits, veu qu'il n'y a point d'inftant que nous n'en recevions de fa bonté quelque nouveau & particulier: que fes graces eftant comme les fources des grands fleuves qui coulent fans.ceffe & ne s'arreftent jamais, à caufe dequoy les bienfaits de Dieu font appellez par les Theologiens, des bienfaits coulans, nos remercimens doivent aussî eftre continuels & toûjours courans : que tout ce que cette Majesté fuprème expofe aux yeux des hommes,

foit dans les temps paffez, foit de nouveau, porte les caracteres & tient empreint le feau de fon amour envers nous, & rend témoignage que dans ce qu'il opere au dehors de luy,il fait tout pour le plus grand bien des hommes, cet eftre infini eftant le meilleur de tous ceux qui font le mieux, Ce font là leurs expreffions, & c'est à-peu-prés en ce fens que ce premier point eft conceu, qui dure quelque demy-quart-d'heure.

Le fecond point s'appelle Nead Berpegamberhou,ve doüafde Imaam, la loüange,memoire &reconnoiffance du Prophete, & des douze Defcendans & Lieutenans. Auli ne contient-il autre chose que des acclamations & des benedictions qu'ils donnent à ces perfonnes que leur fuperflition leur rend venerables: que ce font eux que Dieu a établis les quatorze purs & fans tache: qu'il les a fait fucceffivement les Seigneurs de tous les Mortels: que la foy n'eft point entiere, fiavec la confeffion de

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la Divinité l'on ne confesse aussi que Penvoy de ces quatorze eft legitime, fur lefquels les lumieres celeftes fe font répandues, afin qu'ils éclairaffent aux ames errantes, & qu'ils montraffent à tous le chemin de la verité: qu'ainfi nous fommes obligez de les glorifier, de celebrer leurs louanges, de leur defirer fans ceffe le falut & la paix, & à leur famille en terre toute forte de profperité: Que donc leur nom foit exalté pardeffus toutes Les chofes creées: Que la malediction s'augmente fur leurs ennemis : Que tous les hommes de l'Vnivers foient amenez & deviennent poussiere à leur perte: & d'autres voeux fembla. bles à ceux-cy que je traduis le plus à la lettre qu'il eft poffible.

Le troifiéme point est Seltenet ez Hokkom Koda, c'est à dire que ·la Royauté eft du commandement de Dieu ou d'inftitution divine; furquoy ils remarquent que depuis que Dieu a créé le monde, il a toûjours gouverné fon peuple par des Pro

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