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nouveau Monarque commandoit que l'on portaft le corps du feu Roy fon pere.

Cette Ville eft tres-belle: pour fon antiquité, elle ne cede à gueres d'autres. Quelques-uns veulent que ce foit la Guriana des Anciens: elle eft fituée dans la province de Arak-agem, qui eft la Parthe, fur les frontieres de la Médie: elle montre comme un de fes plus glorieux ornemens, une fuperbe Mosquée toute bastie de marbre & de jafpe enrichy d'or. C'eft dans cette Mosquée qu'on voit les tombeaux de ces deux Monarques : le porphyre dont ils font bastis eft garni de lames d'or, & on a pris plaifir d'y employer avec profufion ce riche métail. On en pourra voir la defcription dans la Geographie Perfanne que nous avons apportée.

Or les Perfes ont pluftoft choifi Kom, Kachan, Metched, & Ardeüil, que d'autres villes, pour S

y placer les corps de leurs Rois parce qu'ils eftiment que ces villes-là ont pardeffus les autres de leur Empire quelque fecrette fainteté à caufe des Martyrs & des perfonnages illuftres felon leur Religion, qui y ont vécu & qui y ont efté inhumez. Car ils difent que Koom & Kachan ont efté par une providence divine deux retraites affeurées pour tous les vrais fidelles de leur Loy, que les Arabes dans les premiers temps du Mahometifme pourfuivoient injuftement: que les Imaams, par où ils entendent les Prophetes & les Pontifes légiti mes, s'y retirerent pour fe mettre à couvert des perfecutions; & qu'ils y ont eu leur fepulture.

C'est ce qu'il leur fait croire que ces Villes font faintes & bienheureuses, & qu'ils les furnomment dans tous les Contracts & dans toutes les écritures publiques. La premiere; Dar-el Mouve

el-din, c'est à dire l'habitation des Gens vivifiez en la Loy. Et la feconde Dar-el Moumenin. C'eft à dire l'Habitation des vrays fidelles, & pour les deux autres Villes Ardeüil eft furnommé Dar-el Irkaat, l'habitation de Direction, d'autant qu'un grand Saint qu'elle renferme, comme ils le qualifient, fut, difent-ils, envoyé de Dieu pour diriger les hommes dans la droite voye, & Metched est furnommé Moukeddés, lieu où l'on rend témoignage à la Loy & à Dieu, en la premiere eft inhumé entre plufieurs Saints felon leur Loy Cheik-Sefié, c'est à dire l'Ancien Pur, qui eft le premier de la race des Rois qui gouvernent aujourd'huy la Perfe; en la feconde l'Imaam Reza que les Perfes reverent avec une extrême fuperftition, ayant toûjours fon nom à la bouche: fi-bien qu'ils fe perfuadent que celuy dont le corps mort est enseveli auprés de luy,

eft bien en plus grande feureté de fon falut, que s'il eftoit enterré auprés de quelques autres Saints moins confiderables: Car fuivant leur doctrine, ceux dont la tombe eft placée auprés de quelque grand perfonnage, demeurent fous fa protection.

Le Roy à qui l'on donnoit inceffamment avis de la marche des Grands du Royaume ayant appris qu'ils eftoient arrivez à Kachan, envoya par un Exprés commander aux deux premiers Medecins, Mir-za Sahid, c'est à dire Seigneur Iufte, & Mir-za Kouchouk ainfi furnommé petit, pour le diftinguer d'avec fon frère, qui eftoit premier Medecin, de fe retirer à Kom dans le Palais Royal qui joint à la Mosquée, où font les tombeaux des Roys derniers deffunts, dans les appartemens qui leur feroient marquez, & que là ils priaffent Dieu le refte de leurs jours pour la profperité de

fceu mieux

fon trône, en reconnoiffance de la clemence dont il ufoit envers eux, & de ce qu'il ne les punif foit que de cette legere difgrace, bien qu'ils meritaffent de perdre la vie, pour n'avoir pas conferver celle de fon pere & de leur Roy. Le mefme Envoyé portoit auffi ordre à Mir-za Maf Joum, c'est à dire Seigneur innocent ou fans tache, dont nous avons parlé, qui eft fils du premier Miniftre & Montuely de Koom, comme qui diroit Maitre des ouvrages & Iuge de la Police, de faire inventaire de tous les biens de ces deux Medecins, de mettre fous le fceau ce qui fe trouveroit comptant, & d'envoyer au Roy cet inventaire lors qu'il feroit fait. Il leur a efté laiffé quelques vingt mille écus de rente avec quoy ils paffent leurs jours en cette ville. là, fans jamais fortir du Palais où ils font enfermez, attendans ce qu'un pouvoir fuprême or

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