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Prince ne fçavoit pas encore de quelle maniere il falloit faire le Roy, ils luy demanderent, comme pour l'inftruire indirectement de ce qu'il avoit à faire, s'il ne plaifoit pas à fa Majefté de leur commander qu'ils la menaffent fur l'heure dans le Palais Royal, pour recevoir la Couronne: parce qu'il eftoit tres-important de ne pas differer plus long-temps. Le Prince en demeura d'accord, & leur ordonna de faire les cho fes comme ils le jugeroient plus à-propos. Alors le Géneral des Moufquetaires, fuivi de l'Eunuque Intendant, avec nombre d'autres perfonnes conduifit ce Prince dans l'appartement où les Rois ont accouftumé de tenir leurs féances publiques qu'on appelle Talaar, Tavieleh, où les Députez des principaux Officiers de l'Eftat, le grand Aftrologue, & les autres venus de la Cour furent admis à faire les trois pro

fternations ordinaires en fa prefence les Députez au nom de leurs Maistres; les autres en leur propre nom. Enfuite fans s'arrefter, sa Majesté entra dans un bain qui eft affez proche de cet appartement, pour s'y purifier felon que la Loy l'ordonne, & fe revêtir de nouveaux habits, pendant que tout fe préparoit au Couronnement avec beaucoup de diligence.

Dans ce mefme temps le Chef des Aftrologues & l'autre venu avec luy de la Cour s'eftant mis en lieu propre, propre, s'attacherent tresfortement à observer quelle feroit l'heure la plus heureuse, felon la difpofition des Aftres, à cette importante ceremonie. Toutes chofes furent préparées en moins d'une heure & demie par les foins tant du Géneral des Moufquetaires que de l'Eunuque voyant, qui dés le moment qu'ils arriverent au Palais des Dames,

& dans l'intervalle que le Prince avoit tardé à fortir du bain, avoient envoyé secrettement faire venir en diligence les meubles & les perfonnes neceffaires à cette folemnité.

Avant que de la representer, il me femble qu'il ne fera pas mal à propos de donner une defcription du lieu où elle se fit: je la tireray d'un de mes autres Ouvrages, où je dépeins la ville capitale de Perfe, & tout ce qu'elle contient de plus remarquable.

Vers le Septentrion affez proche des murailles du Palais, visà-vis d'une des portes qui mene à la principale entrée, est un appartement affez ancien qui forme un quarré, dont chaque costé eft de quatre-vingts pieds. Il a esté basti au fiecle paffé par le Roy Tahmas. De ce bastiment jufqu'à la porte paroist comme une fort large allée couverte de planes fort hauts, le long de la

quelle depuis l'entrée jusqu'à cet appartement font pofées en di ftance de dix à douze pas des mangeoires de pierre enduites de chaulx & de talc affez hautes; & cela pour y attacher les chevaux choifis de l'Ecurie Royale, pour l'ordinaire douze ou quinze, & quelquefois en plus grand nombre aux jours des grandes feftes, ou bien lors que quelques Ambaffadeurs & d'autres Etrangers confiderables font receus à la premiere audiance du Roy. On les y conduit par cette allée au milieu de ces chevaux orgueilleu fement enharnachez; car leurs harnois font tout couverts de pierreries, & tout leur attirail, chaînes, cloux, marteaux,sceaux, étrilles, bref generalement ce qui eft neceffaire dans une écu rie, eft de fin or maffif, comme nous l'avons décrit en fon lieu. A droite & à gauche de l'appar tement paroissent fur les coftez

quelques quarreaux de fleurs & des arbres plantez çà & là comme à l'avanture, qui font fans ordre à la façon des Perfes, chez lefquels il femble que la feule Nature jardine: cela s'entend pour les fleurs & les autres orne. mens fteriles des jardins. Au devant & du cofté du Midy le jardin s'étend au long & au large. On l'a divisé comme en parterres & en quarrez fpacieux, qui font féparez les uns des autres par de grands arbres, & femez de fleurs de tant de diverses fortes, qu'il y en a toûjours pendant les trois belles faifons de l'année.

Cet appartement eft prefque bafti de charpenterie, dont le bas ne s'étend pas au rez de chauffée, mais s'éleve pardeffus quelques trois pieds. Sa couverture est platte, foûtenuë de hauts piliers tournez, & couverts d'or bien épais, qui l'élevent à quelques

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